Cyclisme : les championnats d’europe sous la menace de manifestations propalestiniennes
Le dispositif de sécurité entourant les épreuves sur les routes de la Drôme et de l’ardèche a été renforcé.
« Quand des manifestants ou des groupes veulent prendre une course en otage,
c’est très difficile de pouvoir l’empêcher »
- Michel Callot Président de la Fédération française de cyclisme
2 Oct 2025 - Le Figaro
Jean-Julien Ezvan
Les routes de la Drôme et de l’ardèche accueillent, depuis mercredi (avec les titres de la Suissesse Marlen Reusser et du Belge Remco Evenepoel dans les contre-la-montre) et, jusqu’à dimanche, les championnats d’europe de cyclisme. Un événement annuel créé en 2016 et accueilli pour la troisième fois dans l’hexagone, après Plumelec en 2016 et Plouay en 2020. Près de 900 athlètes (un record) et 14 titres décernés en 5 jours composent un programme qui fait la fierté du cyclisme français. Ainsi, 51 nations sont au rendez-vous, dont l’équipe nationale d’israël, qui alignera 13 coureurs (3 juniors, 9 espoirs et 1 élite). Une sélection objet de toutes les attentions, de toutes les précautions au regard de l’actualité internationale quand, sur fond de guerre à Gaza, des voix réclament avec insistance le retrait de l’équipe Israelpremier Tech du circuit professionnel.
Le 14 septembre, le Tour d’Espagne, encombré de manifestations propalestiniennes quasi quotidiennes (quatre étapes ont été écourtées), s’est terminé dans la confusion. La convergence dans Madrid de milliers de manifestants ayant envahi le circuit final a contraint le peloton à mettre pied à terre, avant que les organisateurs décident d’imposer un terme précipité à l’épreuve le jour de l’épilogue.
Michel Callot, le président de la Fédération française, souligne : «J’espère que nous ne sommes pas dans les proportions et les conséquences de la Vuelta. Ce qui s’est produit sur le Tour d’Espagne a mis au grand jour ce que nous connaissons depuis toujours : l’exposition et la fragilité d’une course cycliste quand on veut la prendre en otage parce que nous sommes un sport qui a cette vertu d’aller au-devant de son public dans la gratuité. Donc, on ne contrôle pas les spectateurs qui sont au bord des routes. Et naturellement, quand des manifestants ou des groupes, en particulier quand il y a une violence associée à ces groupes, veulent prendre une course en otage, c’est très difficile de pouvoir l’empêcher. Donc, forcément, cela nous préoccupe pour notre sport. »
Avant le Tour d’Espagne, les autres grands tours ont, durant l’année, été également la cible de contestataires. En mai, lors du Tour d’Italie, des manifestants propalestiniens avaient tendu une corde peu avant l’arrivée de la 15e étape à Naples. Lors de la 11e étape du Tour de France autour de Toulouse, un étudiant avait fait irruption à l’arrivée du tandem qui se disputait la victoire (le Norvégien Jonas Abrahamsen et le Suisse Mauro Schmid) avec un tee-shirt estampillé du slogan « Israël hors du Tour ». Il avait été sèchement plaqué contre les barrières par un responsable de l’organisation.
Les préfectures de la Drôme et de l’ardèche ont dévoilé dans un communiqué les «mesures de vigilance» mises en place à l’occasion des championnats d’europe : « Cet événement sportif majeur a fait l’objet d’une préparation minutieuse pendant plus d’un an, coordonnée par les services préfectoraux, en lien étroit avec l’organisateur et les élus locaux, dans l’objectif de garantir le bon déroulement des épreuves et d’assurer la sécurité des coureurs et du public. Le contexte international récent a conduit à rehausser le dispositif de sécurité. Au total, près de 100 gendarmes seront mobilisés chaque jour lors des épreuves qui se dérouleront dans la Drôme et plus de 300 gendarmes et policiers chaque jour lors des épreuves qui se dérouleront en Ardèche. Ils seront assistés par des renforts spécialisés dans la sécurisation des grands événements et en maintien de l’ordre. Une unité spécialisée dans l’observation par drone sera également mobilisée. Les zones de concentration du public, dans les villes d’arrivée et de départ, feront l’objet d’une attention particulière. Elles seront protégées par des dispositifs antibélier ainsi que des dispositifs prévisionnels de secours. »
Michel Callot précise : « L’équipe israélienne a engagé des coureurs dans trois courses seulement, qui ont lieu vendredi, samedi et dimanche. Sur ces courses-là, nous serons évidemment encore plus attentifs. » Et tient à rappeler : «Le sport doit rester un vecteur d’universalité, de paix. C’est la magie du sport. Ce ne doit pas être un instrument de politisation. »
David Lappartient, le président de l’Union Cycliste Internationale, avait, lors des récents championnats du monde au Rwanda, indiqué : « Le CIO a confirmé notre position, qui est que le sport n’est pas un outil de sanction, mais un outil au service d’un idéal, qui est de mettre les gens ensemble avec pour objectif de promouvoir la paix. Et la paix ne passe pas par l’exclusion.»
L’équipe Israel-Premier Tech vient toutefois d’être exclue du Tour d’Émilie, programmé le 4 octobre. « Pour des raisons de sécurité publique. Le climat est très lourd, il y avait trop de dangers pour les coureurs d’Israel-Premier Tech comme pour les autres. C’est une décision que je regrette de devoir prendre d’un point de vue sportif, mais, d’un point de vue de la sécurité publique, je n’avais pas d’autre choix », a expliqué à L’AFP Adriano Amici, l’organisateur.
« D’ici au Tour de France (Grand Départ de Barcelone le 4 juillet et trois étapes en Espagne, NDLR), espérons que le conflit à Gaza soit résolu», avait lancé le directeur du Tour d’Espagne, Javier Guillén au terme de la Vuelta. À l’occasion d’une table ronde à l’ambassade de France à Berlin, Christian Prudhomme, le directeur du Tour de France, avait expliqué dans la foulée à L’AFP : « Les courses cyclistes sur route sont soumises aux soubresauts de la vie, d’une manière générale, depuis toujours. Le cyclisme sur route est dans la vie, il ressent plus qu’ailleurs dans un stade fermé ce qui se passe au quotidien. Des brigands attaquaient les coureurs du Tour dans les années 1920. Il y a toujours eu ça. Quand nous allons quelque part, il y a toujours des usines qui ferment, et il y a des négociations qui sont forcément nécessaires. On connaît cette fragilité-là, c’est une évidence. D’ordinaire, la force des épreuves, c’est justement que les gens ne veulent pas qu’elles soient perturbées. Là, on est dans un phénomène complètement nouveau… »

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