LE SOLO DE POGI


Avec 20 victoires cette saison dont le Tour de France, le Tour des Flandres, Liège-bastogne-liège et le Tour de Lombardie, Tadej Pogacar vient d’enchaîner une nouvelle saison exceptionnelle qui lui vaut naturellement un deuxième Vélo d’or.

12 Dec 2025 - Vélo Magazine
PAR GILLES COMTE. 
PHOTOS JEAN-BAPTISTE AUTISSIER/L’ÉQUIPE.

Une septuagénaire en legging panthère et à la crinière auburn traverse le hall de l’hôtel. Deux colosses dégarnis à l’accent guttural reviennent de la piscine en peignoir blanc. Une dame en déambulateur a toutes les peines du monde à rentrer dans l’ascenseur. Un couple aux cheveux blancs s’engage dans une minuscule galerie où une vitrine laisse entrevoir des mannequins aux hanches épaisses habillés de maillots de bain deux pièces d’une rare laideur. Plus loin, un salon de coiffure et une bijouterie, de très bon goût cette fois, mais chère. Le 5 étoiles au sud de Gran Canaria a des allures de résidence pour seniors. Notre montre indique 15 h 45. Dans quinze minutes, nous avons rendez-vous avec Tadej Pogacar. Il ne sera pas à l’heure. On le sait, on vient tout juste de l’apercevoir en tenue arc-en-ciel, de retour d’un entraînement avec quelques équipiers. Habituellement, la préd’une équipe cycliste, même réduite à sa plus simple expression, ne passe pas inaperçue, mais cette fois, c’est à peine si on les remarque. À moins que leur jeunesse éclatante tranche un peu trop violemment avec une clientèle guettée par les lumbagos. Cela dit, on pouvait trouver au moins un point en commun entre la star slovène et les personnes qu’il croisait dans le hall d’entrée : il traînait la savate.

DENRÉE rare

Alex Carera, son agent, s’approche et nous prévient : Tadej sera en retard – on le savait –, il rentre de six heures de vélo, il doit prendre sa douche, manger un bout. La veille, le champion du monde a roulé trois heures, mais il a complété sa sortie par une séance de padel, dont il est friand (il y joue beaucoup à Monaco). Ce qui nous a le plus marqué lorsque nous l’avons vu rejoindre sa chambre, c’est son air concentré, contrastant avec le large sourire de Pavel Sivakov, comme s’il était déjà entré de plain-pied dans 2026. Noël, pourtant, est dans un mois. Ses adversaires ne doivent pas s’attendre à des cadeaux l’an prochain. On en est là de nos réflexions quand Pogi apparaît soudain. Plus rapidement que ce que l’on avait craint. Il porte un vague tee-shirt, un jean délavé, une casquette américaine, il ressemble enfin à un jeune homme en villégiature. Il sourit à notre manière de l’aborder : « Quelle est la question qui revient toujours et qui provoque ton ras-lebol ? » « À cette période de l’année, j’ai toujours droit à “c’est quoi ton programme l’an prochain ? C’est quoi tes objectifs ?’’ Tout le monde sait pourtant après quoi je cours. Si j’ai un ras-le-bol pour une question, c’est bien celle-là ! »

Être en tête à tête avec Tadej Pogacar ne laisse pas indifférent. C’est même une denrée très rare d’après Mike, le relation presse de son équisence

Deux ou trois journaux privilégiés en cours de saison, pas plus. On se dit que c’est comme rencontrer Eddy Merckx à l’époque de sa splendeur, et on pensait que le phénomène ne se reproduirait plus jamais, qu’on en resterait à envier nos glorieux prédécesseurs. S’offrir la proximité intimiste de Pogacar, c’est toucher soi-même à l’histoire du cyclisme, s’approprier un bout de légende. Toutefois, Merckx, rouflaquettes des seventies, sourcils en accent circonflexe, regard et cheveux sombres, dégageait une certaine noblesse qui se mariait bien avec son statut d’icône du sport. Peut-être faut-il déjà considérer Pogacar comme le plus grand coureur de tous les temps, car Merckx lui-même n’a jamais enchaîné deux années d’une telle qualité, mais son apparence banale, ses allures adolescentes – qu’il cultive jalousement – tue un peu la magie d’être en face d’un athlète appelé à occuper le panthéon du sport aux côtés des Pelé, Mohamed Ali, Michael Jordan, Roger Federer et bien entendu Eddy Merckx. C’est peutêtre ce qui a fait dire à Roger De Vlaeminck (4 Paris-roubaix) – qui pourtant ne portait pas son compatriote dans son coeur mais qui a trouvé là un moyen de glorifier son époque autant que son statut de rival – que Tadej Pogacar « était tout juste bon à lacer les chaussures d’eddy ! », ajoutant avec une condescendance qui puait le conflit générationnel : « Si j’avais 22 ans aujourd’hui et que je devais le confronter, il ne serait pas en mesure de me lâcher. »


Le 24 juillet dernier, Pogi en jaune entre Vif et Courchevel, 
étape reine du Tour 2025.

AUTO-ÉVALUATION

C’est dans la réponse du Slovène, qui évite la surenchère et l’esprit polémique, que résident sa noblesse personnelle et sa façon d’évoluer audessus de la mêlée, en grand seigneur donc : « Je m’évalue moi-même. Si quelqu’un me surestime, cela ne me dérange pas. Si quelqu’un me sous-estime, cela ne me dérange pas davantage. » Sobre et tranchant comme ses attaques en course. Tadej Pogacar vient donc d’enchaîner deux saisons qui paraissaient inimaginables il y a peu dans un cyclispe. me ultrasophistiqué qui réclame de faire des choix. En 2025, saison entamée par une victoire à L’UAE Tour, il a gagné les Strade Bianche, le Tour des Flandres, la Flèche Wallonne, Liège-bastogne-liège, le Critérium du Dauphiné, le Tour de France (son 4e déjà), les Championnats du monde et d’europe, le Tour de Lombardie. Au quotidien espagnol Marca qui lui demandait de se noter, il s’est attribué un 9. On s’en étonne, on lui demande pourquoi pas un 10 : « Oui, bien sûr, en termes de succès, j’aurais pu me donner 10/10. Mais il existe toujours des points à améliorer. Des petites fautes en course, des ajustements dans la préparation. » Là où il semble incorrigible, c’est dans son apparente hyperactivité qui nous pousse à lui rappeler qu’à l’époque des Merckx et De Vlaeminck, et bien plus tard encore, le vélo, c’était entraînement/compétition/repos. Rien d’autre n’existait en dehors de ce bloc triangulaire. Aujourd’hui, et il en est l’une des victimes complaisantes lui dit-on, il convient d’ajouter une quatrième composante : les obligations liées au marketing, les sollicitations extrasportives, les devoirs à l’égard des partenaires financiers, l’omniprésence sur les réseaux sociaux. Le surlendemain, notre triple Vélo d’or doit participer à la Gran Fondo Pico de las Nieves pour promouvoir le tourisme sportif à Gran Canaria. À peine sa saison terminée, il s’était rendu en Andorre pour l’andorra Cycling Masters où il avait défié Primoz Roglic, Jonas Vingegaard et Isaac Del Toro dans une course-exhibition (ascension chronométrée + critérium) exclusivement dessinée pour ce quatuor d’exception. Début novembre, il avait rendez-vous au siège de son équipe à Abu Dhabi pour l’inauguration d’une statue à son effigie, et il avait marqué de sa présence les Championnats du monde e-sport organisés par la plateforme Mywhoosh, un des partenaires de l’équipe UAE Team Emirates. Quelques jours avant notre rencontre sur l’île au large des côtes africaines, il participait au Beking Monaco, une épreuve caritative et un dîner de gala dont l’argent est reversé à différentes associations solidaires (lire notre article sur Matteo Trentin, lauréat du Prix Gino-mäder). Sans parler bien entendu des obligations à la marge. Est-il raisonnable d’en faire autant à l’intersaison ?

« J’AURAIS PU ME DONNER 10/10. 
MAIS IL EXISTE TOUJOURS DES FAUTES À CORRIGER » 
   - TADEJ POGACAR

DERRIÈRE UNE VITRE

Tadej s’avachit un peu plus sur sa chaise, pince la visière de sa casquette américaine pour la faire coulisser doucement vers l’arrière. Il est exactement comme il nous était apparu l’année dernière pour un même face-à-face d’avant-vélo d’or : un rien flegmatique, laissant penser qu’il est moyennement motivé par l’idée de se livrer à l’exercice de l’interview, mais en même temps soucieux de développer ses réponses, qu’il distille d’une voix un peu terne qui se perd parfois en bout de phrase. À la fois coopératif et amical mais donnant aussi l’impression d’être derrière une vitre. Même quand il n’est pas sur son vélo, Pogi est insaisissable. « Ça aide à faire grandir notre sport, tranche-t-il, mais plus il grandit, plus nous, les coureurs, devons en faire ! » Un cercle vertueux ou vicieux que Pogacar lui-même ne semble pas trop savoir comment décembre 2025 qualifier, en soulignant toutefois « l’importance des réseaux sociaux dans un sport où les investissements sont de plus en plus conséquents. » Signe des temps, le vélo Colnago qu’il a utilisé pour la première fois en juillet dans l’étape du mont Ventoux a été mis aux enchères par la maison américaine Sotheby’s, et il est parti pour 163 430 euros, de quoi faire sauter au plafond Roger De Vlaeminck, l’homme qui n’aurait jamais lâcher sa roue dans une classique. En revanche, la célébrité ne semble pas affecter plus que ça le résident monégasque : « Bien sûr, il y aura toujours le lourdingue qui va se jeter sur toi alors que tu es à table au restaurant, et certaines réactions sont d’autant plus étonnantes qu’on ne s’attendait pas à te voir là, mais en règle générale, les fans sont charmants, respectueux. La notoriété peut être un peu compliquée à vivre, mais ce n’est pas désagréable de se sentir reconnu dans la rue, j’aime bien l’idée que les gens me voient dans la vie normale, habillé autrement qu’en cycliste, et qu’ils réalisent qu’un coureur n’est pas qu’une machine à pédaler. »


Le 18 juillet, il remportait le contre-la-montre en côte, à Peyragudes.

HOMME D’INFLUENCE

Avec le ton de l’évidence qui cache un fond de malice, Tadej Pogacar a parfois une réponse qui fait immédiatement regretter la question. On lui explique par exemple que Tim Wellens, dans la presse belge, a affirmé qu’il n’avait rencontré aucune difficulté à mettre ses ambitions personnelles de côté dans les grandes courses d’un jour tant il appréciait l’ambiance et la cohésion qui existaient entre équipiers quand le champion slovène était présent, d’une part pour sa jovialité, d’autre part pour les probabilités de victoire : « Je ne sais pas à quoi ressemble l’atmosphère de l’équipe quand je ne suis pas là, je ne peux donc pas en parler (sourire en coin)... » Au demeurant, on cherchait juste à parler de son influence qui agit par cercles concentriques et s’étale désormais bien au-delà de la sphère de son équipe. En interne, il n’y a pas que l’expérimenté Tim Wellens, 34 ans, qui ne tarit pas d’éloges à propos de son leader, mais aussi, à l’autre extrémité de l’échelle des âges, Pablo Torres, tout juste 20 ans (depuis le 10 novembre) qui élève Pogi au rang d’idole, s’abreuvant de la moindre de ses paroles et expliquant un jour que son modèle absolu lui avait dit de ne respecter que deux règles : « Reste calme en course et kiffe ta vie ! » « Pablo est jeune, talentueux et il a la tête bien faite. Oui, c’est vrai, je lui ai fait comprendre qu’il devait s’épargner un maximum de stress, y compris quand les événements tournent en sa défaveur. Il y a ce qui dépend de nous en course, et ce qui dépend des autres, je lui rappelle que le cyclisme est un jeu et qu’il ne sert à rien de se projeter trop loin dans l’avenir. Moi, on me demande souvent quand je vais arrêter, si c’est en 2028 (c’était la rumeur) ou plus tard, mais tant que j’aborde le vélo de cette manière, je ne me préoccupe pas trop de mon futur, le présent me suffit amplement. »

« JE NE ME PRÉOCCUPE PAS TROP DE MON FUTUR, 
LE PRÉSENT ME SUFFIT AMPLEMENT » 
- TADEJ POGACAR AU SUJET D’UNE 
  RETRAITE EN 2028 RELANCEUR DE WOUT

Aujourd’hui, Tadej Pogacar est devenu un référent absolu, l’axe autour duquel tourne la planète cycliste, avec une influence qui infuse le peloton de manière parfois surprenante. Cette année, un seul coureur l’a lâché à la pédale : Wout van Aert à Montmartre, dans la dernière étape du Tour de France. Dans l’esprit du Flamand, en mal de résultats depuis trop longtemps, ce fut comme une résurrection. Battre le meilleur coureur du monde au terme d’un final d’une rare intensité, contre la volonté du Maillot Jaune qui n’a guère l’habitude de se voir privé d’une victoire pour laquelle il a mis toute son énergie et toute sa hargne, a complétement relancé la carrière de Van Aert, dont on annonce déjà un gros printemps en 2026. Ce n’est pas une vue de l’esprit, c’est de cette manière que l’ancien vainqueur de Milan-san Remo exprime son ressenti, proche de la reconnaissance. « Ah oui, c’est une façon de voir les choses ! s’étonne Pogacar en nous fixant d’un regard qui cherche à savoir si on n’exagère pas un peu. Mais revenir à sa vérité (sic), c’est seulement à ses jambes qu’il le doit. À ses jambes et à sa détermination. Quiconque jouait la gagne ce jour-là faisait un beau vainqueur. Peu importe l’identité du deuxième ou du troi mais décembre 2025 sième, Wout a juste rappelé qu’il est l’un des meilleurs coureurs au monde. »

Remco Evenepoel, qui lui a infligé l’humiliation de le rejoindre dans le contre-la-montre des Championnats du monde de Kigali, donne un autre exemple de l’influence de Pogacar. Lors des Championnats d’europe, il a résisté près d’une minute à l’accélération du Slovène au plus fort de la pente dans Saint-romain-de-lerps, et remarqué que l’écart, comme à d’autres occasions, se stabilisait ensuite très vite, dans des proportions qui n’avaient rien d’impressionnant. Remco Evenepoel en a donc déduit qu’il devait spécifiquement travailler cette capacité à endurer le rythme de son adversaire un peu au-delà de la minute. Il suit désormais des exercices précis en ce sens.

« Remco, Jonas (Vingegaard), Mathieu (Van der Poel)… nos confrontations nous tirent vers le haut. Chacun cherche à s’améliorer pour battre l’autre », se contente de répondre l’homme aux vingt victoires cette année. À propos d’evenepoel, Pogacar a récemment déclaré que le Belge, recruté par Red Bull-bora-hansgrohe, lui inspirait une crainte particulière s’il franchissait un nouveau palier. On soupçonne notre Vélo d’or d’une sorte de « formule de politesse », le genre de déclarations politiquement correctes auxquelles on ne croit pas soi-même. Il nous fait répéter : « Une quoi ? Une formule de politesse ? » Non, je le pense vraiment. Si je reste au même niveau et qu’il progresse, l’écart entre nous se réduit. Si j’évolue un cran au-dessous et lui un cran au-dessus, il sera meilleur que moi. » L’un des rares échecs cette année de Tadej Pogacar se situe à l’amstel Gold Race. Seul aux commandes à un peu plus de quarante kilomètres de l’arrivée, on croyait l’affaire pliée, Remco Evenepoel, tractant Mattias Skjelmose (l’opportuniste vainqueur), avait effacé l’écart seconde après seconde grâce à son exceptionnelle position aérodynamique qui tranche avec celle du champion du monde. Cette position, très en avant, avec un angle de bassin qui augmente donc la prise à l’air, nous intrigue, même si on sait que c’est de là que Pogi tire la quintessence de sa force au niveau des lombaires et de la sangle abdominale, véritable usine à watts. On lui demande comment il cherche un compromis entre les chiffres livrés par des tests aérodynamiques et sa position instinctive sur la machine : « Des tests ? Je n’en passe pas avec mon vélo de route habituel. L’essentiel est de se sentir à l’aise avec une position que tu dois tenir pendant cinq ou six heures, et il ne faut pas risquer de détruire un équilibre pour gagner dix watts », répond celui qui utilise de surcroît des manivelles courtes (165 mm et même 160 mm lors du chrono de Caen, dans le Tour de France), dont l’effet est de réduire l’amplitude rotatoire des jambes tout en augmentant la fréquence de pédalage (« J’ai testé pour la première fois les “165” un jour d’août 2023, j’ai cette curiosité à innover, à essayer des choses nouvelles. »)

« JE SUIS RESTÉ CINQ JOURS SANS ROULER, 
CE QUI NE M’ARRIVAIT JAMAIS APRÈS LE TOUR »
   - TADEJ POGACAR

GESTION DU MAL

Dans l’histoire de ce sport, les exemples ne manquent pas de coureurs qui ont souffert du genou – jusqu’à l’opération parfois – à cause d’une position que le corps finissait par rejeter, et c’est d’un mal de genou que le Maillot Jaune s’est plaint dans la 17e étape du Tour de France qui arrivait à Valence : « Ça fait plus de quinze ans que je roule sans que ma position n’entraîne aucune complication, elle n’en est donc pas la cause. » Il l’index sur le côté extérieur du genou et trace une petite ligne droite : « C’est là que j’avais mal. Le soir, au CHU de Valence, j’ai passé une IRM qui montrait une anomalie sur l’extrémité du quadriceps qui se termine vers le genou, c’était un peu gonflé. » Dans la presse belge, Tim Wellens a évoqué la crainte d’un abandon. « C’est vrai, car tu ne sais jamais à quoi ressemblera le jour suivant, surtout qu’il s’agissait de l’étape du col de la Loze. Je me disais “merde, si ça empire… si je ne parviens pas à contenir la douleur… peut-être que… que… je ne sais pas, je n’ai jamais connu ce problème avant, j’ignore ce qui peut arriver. Les doutes te font penser aux pires scénarios. Peut-être que je devrais mettre pied à terre, peut-être que je vais rentrer à la maison… Non, pas question de laisser mes équipiers en plan, pas après avoir été collectivement aussi brillants, pas si près du but !” Au final, la douleur est restée gérable jusqu’au bout. »27 avril, deuxième Monument empoché de la saison avec Liège-Bastogne-Liège.


CORPS EN PANIQUE

C’est donc pour cette raison qu’il paraissait un peu éteint dans les Alpes, étrangement passif, au point que toute la presse a évoqué une fatigue mentale et déclaré que, finalement, le Slovène s’ennuyait sur les courses de trois semaines : « Au lendemain de la Loze, l’étape de la Plagne avait été elle aussi exigeante à cause de la pluie et du froid, et en conférence de presse, j’ai dit que, oui, j’étais fatiglisse gué. » Il se marre et ajoute : « Après ça, pendant des mois, chaque fois que je voyais un journaliste, sa première question était : “Êtes-vous fatigué ?” » Cela dit, on lui rappelle que sa mère elle-même a dit dans un média qu’elle ne l’avait jamais vu aussi exténué, et qu’elle pouvait comprendre qu’il arrête le vélo : « Ton corps joue avec ses limites pendant trois semaines, et il est déjà en train de lutter pour se reposer en deuxième semaine, en mode Come on (allez), on a besoin d’un break là, non ? Avec l’apparition d’une douleur au genou, il est un peu en panique. L’esprit, le corps stressent, se fatiguent plus rapidement. J’ai pris deux kilos en raison d’une rétention d’eau (Surcharge mentale, fatigue émotionnelle ou état inflammatoire sont des causes possibles). Mon visage était… différent. Fatigué, gonflé. Tu n’es pas beau, et au fond de toi non plus tu n’es pas beau (sic), tu ne te sens pas un fashion model quand tu es dans la rue, tu es simplement mal dans ta peau… Le corps lance juste une alerte. Après ça, je suis resté cinq jours sans rouler, ce qui ne m’arrivait jamais après le Tour. Je suis re

« JE NE SAIS PAS ET JE M’EN CONTREFICHE. 
LE DERNIER TEST, ÇA DEVAIT ÊTRE EN 2018 OU 2019 »
   - TADEJ POGACAR À PROPOS DE SA VO2 MAX

From page 14 sur le vélo le samedi suivant, tout était normal. » Cette confession intime nuance le portrait d’un champion indestructible, dont il faut noter cependant la capacité à se regénérer, sa force de résilience. Il nous vient d’ailleurs à l’esprit le témoignage de Joseba, un des masseurs D’UAE : l’an dernier, au Tour de Catalogne, Pogacar s’était imposé au sommet de Vallter sous des trombes d’eau et des températures très basses. Au bout d’une minute à peine de massage, les muscles du Slovène étaient revenus à la normale là où il faut parfois une heure pour qu’ils retrouvent leur souplesse ! « J’ignore si c’est vrai, je ne me masse pas moi-même, plaisante-t-il, mais c’est exact que j’ai des muscles hyper souples. Il ne faut pas en tirer des conclusions trop hâtives : pour certains, c’est comme s’ils avaient des cailloux dans les muscles, pour d’autres, c’est du beurre, sans que cela traduise leur journée ou présage de la suite, chacun est différent. »


JAMAIS SAN REMO

Puisqu’il est question de physiologie, on lui demande s’il confirme les chiffres de Ole Kristian Berg, un chercheur norvégien, selon lesquels sa VO2 max devait probablement se situer entre 91 et 96 ml/kg/mn, bien au-dessus par exemple d’un Chris Froome à 88. Dans la valeur haute, il serait même à un niveau jamais atteint auparavant (on situe Greg Lemond à 93, référence absolue jusmonté que-là) : « Je ne sais pas et je m’en contrefiche. Le dernier test que j’ai passé, ça devait être en 2018 ou 2019, mais honnêtement, je n’ai pas retenu le chiffre, qui de toute façon a dû évoluer depuis. »

Avant de le quitter, on cherche à savoir qui l’a poussé le plus loin dans ses retranchements en 2025 : « Mathieu ! » Dans sa bouche, ça ressemble à « Matteo » un peu mâchouillé, mais il n’y a aucun doute sur l’identité du personnage puisqu’il précise aussitôt : « Que ce soit à San Remo, Roubaix ou aux Flandres, il m’a poussé à un stade supérieur de mes limites ! » Sa réponse nous invite à une dernière question : « Si je te dis que tu gagneras un jour Paris-roubaix, mais jamais Milan-san Remo, tu me réponds quoi ? » « Il y a de fortes chances pour que tu aies raison (rires) ! Et de fortes chances aussi que je ne gagne ni l’un ni l’autre ! » Dans le hall de l’hôtel, quelques couples grisonnants songent à aller prendre l’apéritif au bord de la piscine, d’autres partent en balade sur la promenade qui longe l’atlantique. C’est la fin d’une journée ordinaire dans la vie de Tadej Pogacar.

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