Ici, c’est le Nord
Pour la première fois depuis 2001, le Tour s’élancera ce samedi du nord de la France. Une terre de passion pour le cyclisme, entretenue par des acteurs, des lieux et des événements qui ont fait sa renommée.
2 Jul 2025 - L'Équipe
DOSSIER RÉALISÉ PAR PHILIPPE LE GARS
Charles Crupelandt, à jamais le premier
Surnommé « le Taureau du Nord », Charles Crupelandt, décédé en 1955 à 68 ans, est le premier Nordiste vainqueur d’une étape du Tour en 1910. Elle arrivait à… Roubaix. Il s’y impose encore deux fois l’année suivante à Chamonix et à Marseille, et en 1912 à Dunkerque. Avant de remporter deux fois Paris-Roubaix (en 1912 et 1914). Il reste à ce jour le seul Roubaisien au palmarès de l’Enfer du Nord. Le dernier secteur pavé de l’épreuve, juste avant l’entrée sur le vélodrome, porte d’ailleurs son nom depuis 1996. Sa carrière fut interrompue par la Première Guerre mondiale. Appelé sur le front, il fut décoré de la Croix de guerre en 1915 pour acte de bravoure.
Jean Stablinski, le règne des Polonais
L’histoire socio-économique du nord de la France est étroitement liée à l’éclosion des coureurs polonais issus de l’immigration à la sortie de la Première Guerre mondiale. L a F r a n c e , a l o r s e n m a n q u e d e main-d’oeuvre, signa un accord avec la Pologne pour accueillir des dizaines de milliers de ses ressortissants appelés à travailler dans les champs et au fond des mines.
Les Boleslaw Napierala, César Marcellak, Alexandre Pawlisiak ou Édouard Klabinski, premier vivier de cyclistes polonais du Nord, furent suivis par celui qui a marqué l’histoire : Jean Stablinski, champion du monde en 1962 (il est décédé en 2007 à 75 ans), qui avait également travaillé sous terre avant d’exceller sur le vélo. La génération suivante fut emmenée par Robert Mintkiewicz et Christian Palka dans les années 1970 puis Bruno Wojtinek une décennie plus tard (2e de Paris-Roubaix en 1985).
Les Vasseur, la dynastie régionale
Dans la famille Vasseur, originaire de Steenvoorde tout près de la frontière belge, on retrouve les frères Alain et Sylvain. Le premier gagna une étape du Tour au Felsberg en Allemagne en 1970. Le second fut l’un des équipiers de Bernard Hinault à ses débuts chez Gitane-Campagnolo (en 1976). Il y a aussi Cédric, le fils d’Alain, aujourd’hui manager de l’équipe Cofidis. En 1997, il remporte à son tour une étape sur le Tour à La Châtre (Indre) et récidive, dix ans plus tard, à Marseille. Avant les Vasseur père et fils, seuls les Belges Émile et Émile Jr Masson avant-guerre (deux étapes en 1922 pour le père et une en 1938 pour le fils) et la famille Molinéris – Pierre en 1952 et Jean-Luc en 1974 – avaient réalisé cet exploit.
Jean-Marie Leblanc, le gardien du temple
« Avec lui, le Tour est bien gardé. » Jacques Goddet, le patron historique du Tour de France (de 1937 à 1988) résuma un jour ainsi l’oeuvre de Jean-Marie Leblanc à la tête de l’épreuve phare du cyclisme. Originaire de l’Avesnois, l’ancien coureur (pro de 1967 à 1971, il disputa le Tour en 1968 et 1970) devenu journaliste à La Voix du Nord puis à L’Équipe, en a pris les rênes en 1988.
En 1998, il eut à gérer le scandale de l’affaire Festina, en n’ayant qu’une priorité: ramener coûte que coûte le Tour à Paris. Après avoir transmis le témoin à Christian Prudhomme en 2006, il reste à bientôt 81 ans (il les fêtera le 28 juillet) un grand témoin de l’histoire du cyclisme.
Philippe Crépel, l’entrepreneur
Le Lillois, décédé en 2023 à 78 ans, a marqué l’histoire du cyclisme bien au-delà de ses frontières régionales. Philippe Crépel se définissait lui-même comme un « serviteur du cyclisme » , un sport où il a tout connu. Coureur chez Pelforth-SauvageLejeune, Sonolor-Lejeune et Bic à la charnière des années 1960 et 1970, il fonde en 1979 l’équipe La Redoute-Motobécane au maillot vert, aide ensuite à la création de La Vie claire comme intermédiaire auprès de Bernard Tapie (en 1984) puis de l’équipe Novémail avec Peter Post (en 1993).
Coordinateur général du Grand Palais à Lille, il fut aussi à l’origine de la création de la Tropicale Amissa Bongo en 2006 au Gabon, avant de relancer la cyclosportive Lille-Hardelot, son «dernier bébé», symbole de son attachement viscéral à sa région.
Alain Bondue, l’incontournable
Le Roubaisien (66 ans) a écrit les plus belles pages du cyclisme nordiste, sur la piste d’abord où il a remporté deux titres mondiaux en poursuite (en 1981 et 1982) et une médaille d’argent aux Jeux de Moscou (1980). Alain Bondue se consacre ensuite plus à la route sous les couleurs de La Redoute, l’équipe basée chez lui à Roubaix, puis de Système U sous la houlette de Cyrille Guimard.
Deuxième de Milan-San Remo en 1982 après avoir chuté au sommet du Poggio alors qu’il était échappé avec Marc Gomez, il marque les esprits dans la région avec une troisième place décrochée sur ParisRoubaix en 1984. Une course qui résume sa carrière vouée à cette terre de cyclisme. Manager de l’équipe Cofidis de 1998 à 2004, il apportera ensuite son expertise sur plusieurs chaînes de télévision, dont la RTBF en Belgique.
Cofidis, l’insubmersible
Après Pelforth dans les années 1960 et La Redoute au début des années 1980, Cofidis représente non seulement le Nord mais détient également le record de longévité avec un même sponsor dans le peloton actuel. Créée en 1997 par François Migraine décédé l’an dernier, l’équipe démarre avec
Les Quatre Jours de Dunkerque, ici la Porte d’Aire à Cassel, se disputent désormais sur six jours en mai. C’est la course à étapes la plus importante en France derrière le Tour, Paris-Nice et le Critérium du Dauphiné. un leader, Lance Armstrong. Mais l’Américain atteint d’un cancer ne portera jamais le maillot en course.
Tour à tour, la formation sera dirigée par Cyrille Guimard (1997-1998), puis Alain Bondue (1998-2004), Éric Boyer (20052012), Yvon Sanquer (2012-2017) et Cédric Vasseur depuis huit ans. Malgré une histoire mouvementée en raison d’affaires de dopage notamment en 2004, l’équipe a toujours su résister aux tempêtes et rebondir.
Les Quatre Jours de Dunkerque, la tradition
Si Dunkerque est connu pour son carnaval, les Quatre Jours ont aussi fait sa réputation en 70 ans d’existence. Derrière le Tour, Paris-Nice et le Critérium du Dauphiné, c’est la course à étapes la plus importante en France. Courue à ses débuts sur quatre jours autour de la cité portuaire, elle s’est développée sur tout le département puis la région dans les années 1960 en passant à cinqpuis six jours. Clin d’oeil à son « concurrent » du mois de mai, le leader de l’épreuve porte un maillot rose comme celui du Giro.
Le vélodrome de Roubaix, le joyau
Inauguré en 2012, le vélodrome couvert qui porte le nom de Jean Stablinski , « Le Stab », a accueilli les Championnats du monde sur piste en 2021 et 2023 et fait partie des plus beaux anneaux en Europe. Il jouxte le vélodrome en plein air sorti de terre avant la Deuxième Guerre mondiale, théâtre depuis 1943 de l’arrivée de Paris-Roubaix (hormis les éditions de 1986, 1987 et 1988).
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