Marc Madiot : « Ces très grosses formations vont créer un déséquilibre »
Lors du Tour de Pologne, le 5 août. « Sur les 30 coureurs de
l’UAE, 20 pourraient être leaders dans d’autres équipes. »
Marc Madiot, manager de Groupama-fdj, s’inquiète de voir quelques super-teams, aux budgets démesurés, accaparer tous les talents. Le transfert du double champion olympique Remco Evenepoel en est un nouvel exemple.
11 Aug 2025 - L'Humanité
ENTRETIEN RÉALISÉ PAR ÉRIC SERRES
Marc Madiot, le manager de la formation Groupama-FdJ, considère que le départ du champion olympique belge Remco Evenepoel de la Soudal-Quick Step pour Red Bull-Bora-hansgrohe est symptomatique de ce qu’est en train de devenir le cyclisme. Un milieu très fermé où quelques équipes, aux budgets démesurés, accaparent tous les talents des autres formations.
- Vous tirez la sonnette d’alarme après le départ de Remco Evenepoel de chez Soudal-Quick Step pour Red Bull-Bora-hansgrohe. Pourquoi ?
Je ne suis pas le seul à être inquiet. Même Patrick Lefevere, l’ancien patron d’Evenepoel, est inquiet. Il y a dorénavant une concentration des moyens financiers et des cyclistes dans seulement quelques équipes. Si on prend les 100 premiers coureurs du classement mondial, on en a 90 qui se concentrent sur quatre à cinq équipes. Cela va devenir compliqué pour les deux tiers du peloton. Si l’on prend l’équipe UAE de Tadej Pogačar, sur les 30 coureurs, il y a 20 leaders qui pourraient l’être dans d’autres équipes. Les budgets de ces équipes sont tels que tout leur est permis. De plus, elles n’ont pas les mêmes règles sociales que nous en France. Dans notre pays, il y a des contrats de travail avec les charges que cela implique. Dans ces équipes, les coureurs sont tous des travailleurs indépendants, donc pas de charges pour les employeurs. Exister face à cela va devenir difficile. Nous étions précédemment sur un schéma où il y avait des sponsors qui attendaient un retour sur investissement. Si vous investissiez 10, vous deviez rendre 10. Aujourd’hui, ce schéma n’existe plus ou presque. Quand vous vous appelez UAE, vous ne venez pas pour un retour sur investissement mais pour véhiculer l’image d’un pays. Donc « no limit » !
- En quoi cela pose-t-il un problème ?
En fait, pour notre sport, ces très grosses formations vont créer un déséquilibre. Les plus petites équipes ne pourront pas suivre, exister sportivement et disparaîtront. Même le système économique des courses va en pâtir. Si on enlève les gros organisateurs de courses comme ASO, RCS ou Flanders, que vont devenir ceux qui organisent de plus petites courses ? Ils ont déjà du mal à vivre et faire venir de grosses formations. Si cela continue, ils ne pourront plus les attirer et vont disparaître. Le cyclisme sport populaire et accessible va être réservé à une élite. Je sais par exemple que certains voudraient faire payer les spectateurs pour accéder aux cols et cela ne choque personne. Changement d’époque…
- Pourtant, ce genre de grosses formations existaient avant. Renault-Gitane, par exemple, dans les années 1980.
Il n’y avait pas autant d’écarts. Puis cela ne durait pas très longtemps. Certaines années, on faisait chou blanc. En 1984, on a gagné 10 étapes sur le Tour de France et, l’année suivante, on faisait un zéro pointé. On était dans un phénomène purement sportif.
- Mais, alors, que va-t-il se passer si rien ne change ?
Ce que je crains, c’est que les sponsors finissent par se décourager et n’y trouvent plus leur compte. Des équipes espagnoles comme Movistar ou belges comme Lotto, Intermarché, Alpecin ou Soudal, et d’autres sont en difficulté. En Belgique, et on n’en parle pas beaucoup chez nous, certaines équipes tentent de s’associer pour tenir le coup.
- Quelles sont les solutions pour mettre fin à cette inflation ?
Il y en a pas mal. Ainsi instaurer un budget cap pour les équipes. Un même budget pour tout le monde. On peut aussi instaurer un salary cap pour l’achat d’un coureur. On pourrait également imaginer, au niveau social, que toutes les formations soient sur le même modèle économique et dans le même pays. Je pense à la Suisse où se trouve l’union cycliste internationale. Les bases juridiques des équipes pourraient-elles être les mêmes ? Cela égaliserait les coûts sociaux. Mais je ne sais pas si c’est jouable.
- Craignez-vous que les jeunes pépites françaises s’en aillent peu à peu vers ces mastodontes sans que vous ne puissiez rien y faire ?
C’est déjà le cas. Prenons Lenny Martinez. J’ai payé une indemnité de formation à son club pour qu’il rentre dans notre pôle espoirs, la Conti. On finit sa formation, il signe pro chez nous, puis, l’an dernier, il décide de partir chez Bahrain-Victorious. Nous n’avons reçu aucune indemnité de transfert. C’est le système et on ne peut rien y faire pour l’instant, en attendant que l’union cycliste bouge enfin !
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Il gruppo al Giro di Polonia del 5 agosto. Marc Madiot: "Dei 30 corridori
della UAE Emirates-XRG, 20 potrebbero essere leader in altre squadre."
Marc Madiot: “Queste squadre così grandi creeranno uno squilibrio”
Marc Madiot, manager del Groupama-FDJ, è preoccupato di vedere pochi super-team con budget sproporzionati monopolizzare tutti i talenti.
Il trasferimento del due volte campione olimpico Remco Evenepoel ne è un nuovo esempio.
11 agosto 2025 - L'Humanité
INTERVISTA DI ÉRIC SERRES
Marc Madiot, manager del team Groupama-FdJ, ritiene che la partenza del bicampione olimpico belga Remco Evenepoel dalla Soudal-Quick Step alla Red Bull-Bora-hansgrohe sia sintomatica di ciò che il ciclismo sta diventando: un ambiente molto chiuso in cui pochi team, con budget sproporzionati, monopolizzano tutti i talenti delle altre squadre.
- Sta lanciando l'allarme dopo l'addio di Remco Evenepoel dalla Soudal-Quick Step alla Red Bull-Bora-hansgrohe. Perché?
Non sono l'unico a preoccuparsi; anche Patrick Lefevere, l'ex capo di Evenepoel, lo è. Ora c'è una concentrazione di risorse finanziarie e corridori in poche squadre. Se prendiamo i primi 100 corridori della classifica mondiale, 90 di loro sono concentrati in quattro o cinque team. Questo diventerà sempre più complicato per due terzi del gruppo. Se prendiamo la UAE Emirates-XRG di Tadej Pogačar, su 30 corridori, ce ne sono 20 che potrebbero essere leader in altre formazioni. I budget di queste squadre sono tali che è loro consentito fare qualsiasi cosa. Inoltre, non hanno le stesse normative sociali che abbiamo in Francia. Nel nostro Paese, ci sono contratti di lavoro con i relativi costi. In queste squadre, i corridori sono tutti lavoratori autonomi, quindi non ci sono costi per i datori di lavoro. Affrontare questa situazione diventerà sempre più difficile. In precedenza avevamo un sistema in cui gli sponsor si aspettavano un ritorno sull'investimento. Se investivi 10, dovevi restituire 10. Oggi, questo sistema non esiste quasi più. Quando ti chiami Emirati Arabi Uniti, non vieni per un ritorno sull'investimento, ma per trasmettere l'immagine di un Paese. Quindi, "nessun limite"!
- Perché questo è un problema?
In effetti, per il nostro sport, queste squadre molto grandi creeranno uno squilibrio. Le squadre più piccole non saranno in grado di tenere il passo, di "esistere" in termini sportivi e scompariranno. Anche il sistema economico delle corse ne soffrirà. Se eliminiamo i grandi organizzatori di gare come ASO, RCS o Fiandre, che cosa ne sarà di coloro che organizzano gare minori? Hanno già difficoltà a sopravvivere e ad attrarre grandi squadre. Se si continua così, non saranno più in grado di attrarle e scompariranno. Il ciclismo, uno sport popolare e accessibile, sarà riservato a un'élite. So, ad esempio, che alcuni vorrebbero far pagare l'ingresso degli spettatori ai passi di montagna, e questo non sorprende nessuno. Un cambio d'epoca...
- Eppure, questo tipo di grandi squadre esistevano già prima. La Renault-Gitane, per esempio, negli anni '80.
Non c'era così tanta distanza. E poi (la Renault-Gitane) non è durata molto a lungo. Qualche anno siamo rimasti a mani vuote. Nel 1984 abbiamo vinto 10 tappe al Tour de France e l'anno successivo zero. È stato un fenomeno puramente sportivo.
- Ma allora, che cosa succederà se nulla cambia?
Quello che temo è che gli sponsor alla fine si scoraggeranno e non lo troveranno più redditizio. Squadre spagnole come la Movistar, o belghe come Lotto, Intermarché, Alpecin o Soudal, e altre, stanno faticando. In Belgio, e qui non ne parliamo molto, alcune squadre stanno cercando di unire le forze per sopravvivere.
- Quali sono le soluzioni per porre fine a questa sorta di inflazione?
Ce ne sarebbero parecchie. Ad esempio, stabilire un tetto massimo di budget per le squadre. Lo stesso budget per tutti. Potremmo anche stabilire un tetto massimo per l'acquisto di un corridore. Potremmo anche immaginare, a livello sociale, che tutte le squadre seguano lo stesso modello economico e nello stesso Paese. Penso alla Svizzera, dove ha sede l'Unione Ciclistica Internazionale. Il quadro giuridico per le squadre potrebbe essere lo stesso? Questo equilibrerebbe i costi sociali. Ma non so se sia fattibile.
- Teme che le giovani stelle francesi si avvicinino gradualmente a questi giganti, senza che lei possa fare nulla al riguardo?
È già così. Prendiamo Lenny Martinez. Ho pagato al suo club un indennizzo di formazione affinché lui potesse entrare nella nostra squadra giovanile, la Conti. Abbiamo terminato la sua formazione, ha firmato un contratto da professionista con noi e poi, l'anno scorso, è passato alla Bahrain-Victorious. Non abbiamo ricevuto alcun indennizzo di trasferimento. Questo è il sistema, e non possiamo farci niente per ora, mentre aspettiamo che l'Unione Ciclistica finalmente faccia una mossa!
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