«Tu sens le poids de l’histoire»
Julien Escudé s’impose devant Bonaventure Kalou lors du 16e de finale aller de la Coupe de l’UEFA entre l’Ajax et Auxerre (1-0 ; 1-3), en février 2005.
Reconnaissable à sa bande verticale rouge, le maillot de l’Ajax Amsterdam n’a pas évolué depuis son intronisation en 1911. Julien Escudé, ancien capitaine du club, assure que cela se ressent sur le terrain.
22 Oct 2025 - L'Équipe
BERNARD LIONS
Julien Escudé s’est offert un joli cadeau d’anniversaire, le 17 août 2003, jour de ses 24 ans. Il raconte: « Quand je suis revenu dans le vestiaire, après l’échauffement, j’ai pris une grande respiration puis j’ai enfilé le maillot de l’Ajax. Pour la première fois de ma vie. Cela fait vraiment quelque chose. J’ai alors ressenti une grande fierté. D’autant plus que j’entretenais déjà un lien particulier avec ce maillot. Il revêt beaucoup d’importance pour ma famille.» Paul, son père décédé cinq ans plus tôt, se voulait un disciple du Roumain Stefan Kovacs, successeur de Rinus Michels sur le banc de l’Ajax (1971-1973).
« Alors entraîneur en D4 à Pau, mon père prônait et suivait le football total de Kovacs, retrace-t-il. J’ai conservé son livre (*) et le marquepage sur lequel il prenait des notes en le lisant. Comme quoi, le destin m’a mis ce maillot sur le dos et a voulu que je devienne le premier Français à le revêtir. Quand tu le portes, tu sens le poids du passé et de l’histoire. Parce qu’il appartient au patrimoine du football et que tu le remarques de loin, avec sa grande bande verticale rouge sur fond blanc demeurée inchangée au fil des années.»
Elle n’existait toutefois pas, à l’origine. Sur la première photo connue de l’Ajax, club créé le 18 mars 1900, les joueurs posent avec une tenue d’un rouge sombre, avec une bande claire autour de la taille. Puis ils ont adopté un maillot avec des bandes verticales rouges et blanches, similaire à celui du Sparta Rotterdam. Ce qui a d’ailleurs posé un problème lors de l’accession des Ajacides en Première Division, le 21 mai 1911.
L’iconique esthétique du maillot imposée indirectement par… la Fédération nationale
La Fédération des Pays-Bas a alors demandé à ses dirigeants de modifier leur maillot ainsi que de rajouter le nom Amsterdam à leur club, car il existait déjà un autre Ajax, à Leyde. Ainsi est né, un peu forcé, le légendaire maillot blanc, avec une bande verticale rouge au milieu.
Si la tenue extérieure se renouvelle chaque année et qu’une troisième a été lancée en 2004, celle à domicile demeure inchangée. Avec deux petits ajouts d’importance au fil du temps, toutefois : deux (à partir de 2007), puis trois étoiles dorées (depuis 2011), symbole de ses trente titres de champion, ont été posées sur le coeur, au-dessus du blason du club, et le chiffre quatre, planté au centre de l’écusson de la Ligue des champions, sur l’épaule droite.
« Quand tu enfiles ce maillot mythique rouge et blanc, tu sens que tu portes une institution du football aimée et respectée par tout le monde et ce que cela représente de défendre les couleurs du club le plus titré des Pays-Bas et vainqueur de quatre Ligues des champions, confie Escudé. Pour qu’il ne soit pas trop lourd à porter, surtout si tu es étranger, il faut être costaud dans sa tête et bien préparé.»
Choisi par Ronald Koeman, alors entraîneur, pour succéder au défenseur Cristian Chivu et encadrer les jeunes, « alors qu’ils étaient déjà des phénomènes » , sourit-il en repensant à Zlatan Ibrahimovic, Nigel de Jong et autre Wesley Sneijder, l’ancien Rennais a gagné son seul titre de champion dès la première année, puis brandi la Supercoupe des Pays-Bas en tant que capitaine, celle d’après. «J’ai offert mon premier maillot à ma mère et gardé celui du titre et un de chaque saison, ainsi que ceux extérieurs, dont un jaune, vert sombre, très beau » , dit-il. Après l’avoir revêtu une 81e et dernière fois, le 28 août 2005 contre le Feyenoord Rotterdam (1-2), l’ancien international (13 sélections de 2006 à 2010) est parti, la tête haute, enfiler avec autant de succès celui du Séville FC.
(*) « Football total » de Stefan Kovacs, publié aux éditions Calmann-Lévy.
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Pour l’écusson, retour vers le passé
22 Oct 2025 - L'Équipe
B. Li.
Si l’Ajax a commencé par jouer sur un terrain situé dans la partie est de la ville, le quartier juif d’Amsterdam, – ce qui explique que ses supporters les plus radicaux se font appeler les Joden (les « Juifs » en néerlandais) –, le club amstellodamois ne puise pas ses racines dans le judaïsme, mais dans la mythologie grecque. Ses fondateurs ont en effet choisi de l’appeler Ajax en hommage au fils de Télamon, dit « Ajax le Grand », un héros de la guerre de Troie, connu pour sa force, son audace et son courage. L’Ajax ne se servait toutefois pas du visage caractéristique du héros grec pour son écusson, au départ. Il était constitué d’une image d’un footballeur portant la tenue de l’Ajax, entouré par le texte : « Amst. Football-Club Ajax ». Le portrait d'« Ajax le Grand », présenté de profil et casqué, n’est apparu pour la première fois que le 20 septembre 1928, accompagné d’un bouclier rouge et blanc. Figurant sur le devant et au centre du maillot à partir de 1973, il a été déplacé sur le côté gauche avec l’arrivée du sponsor TDK en 1983, puis recentré après son départ, en 1991. Date à laquelle, dans un souci de modernité, il a été redessiné et stylisé par onze coups de crayon, comme le nombre de joueurs dans une équipe. Au grand dam des fans des Ajacides qui lui préfèrent le premier logo, incarnation d’un football total ayant conquis l’Europe au début des années 1970. Après une guéguerre longue de vingt ans, ils ont fini par obtenir gain de cause. Le 18 mars 2025, jour de son 125e anniversaire, l’Ajax a annoncé renouer avec son écusson classique (voir en haut de la page).

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