MAJKA - Le témoin privilégié
Rafal Majka (à droite sur la photo ci-dessus au côté de Tadej Pogačar)
a été de toutes les victoires du Slovène sur le Tour de Lombardie.
Vainqueur des quatre dernières éditions, Tadej Pogacar a pu s’appuyer sur l’expérience du Polonais, qui disputera son quatorzième et dernier Tour de Lombardie avant de prendre sa retraite.
"Je pense que c’est ce jour-là que Pogačar
a commencé à gagner ses courses en solo"
- RAFAL MAJKA, À PROPOS DE L’ÉDITION 2023
11 Oct 2025 - L'Équipe
YOHANN HAUTBOIS
BERGAME (ITA) – Le petit Oliwier est donc le seul enfant au monde qui boude, la tête réfugiée dans le cou de son père Rafal Majka, au moment de prendre une photo avec Tadej Pogacar. Le Slovène et son équipier polonais ont préféré en rire, hier, dans la banlieue de Milan et cette attitude ne devrait pas remettre en cause le lien quasi sacré entre les deux grimpeurs d’UAE Emirates XRG. Depuis 2021 et son arrivée au sein de la formation émirienne, Majka a disputé les quatre Tours de Lombardie remportés par son leader.Rafal Majka (à droite sur la photo ci-dessus au côté de Tadej Pogacar) a été de toutes les victoires du Slovène sur le Tour de Lombardie.
L’ancien meilleur grimpeur du Tour de France (2014 et 2016) incarne une sorte de talisman dont le champion d’Europe devra profiter une dernière fois, aujourd’hui, puisque le Polonais mettra la flèche à la fin de la saison, à 36 ans, avec quatorze « Classiques des feuilles mortes » au compteur : « Parce que j’ai débuté dans une équipe italienne (Petroli Firenze), je voulais finir sur une course italienne, spécialement le Lombardie. Je me souviens de l’édition en 2013, j’avais fini troisième derrière Joaquim Rodriguez et Alejandro Valverde. Et maintenant, je termine ma carrière avec le meilleur cycliste du monde, une légende.»
L’édition 2022 remportée au sprint
En 2021, donc, Majka s’était élancé de Côme pour la première fois avec «Pogi » et il n’a pas oublié « comment Tadej avait été rattrapé par Fausto Masnada dans la descente (rires) » . Le Bergamasque était chez lui, sur les routes sinueuses qu’il connaissait par coeur, et il était parvenu à combler le trou que le Slovène avait créé dans le passo di Ganda, à 32 km de l’arrivée, à 3 km du sommet. Pogacar découvrait le Monument alors ( « c’était une surprise qu’il gagne, pour moi, il avait certes du talent mais p…, à la fin, je n’avais pas les mots» ) et, à deux reprises, il manqua d’aller dans le décor: «Aujourd’hui, c’est un coureur complètement différent, il est devenu tellement intelligent, il lit parfaitement les courses. » Pourtant, à l’époque, déjà, il avait su utiliser les forces adverses, plus que sa propre équipe encore en rodage, en profitant des attaques de Tiesj Benoot (chez DSM alors) pour voir Remco Evenepoel, Rigoberto Uran et Alexander Vlasov tous sauter à la corde. Vincenzo Nibali et ses derniers feux, aussi. Bien que rejoint par Masnada, le Slovène s’était i mposé au sprint à Bergame comme, tuons tout suspense, il le ferait l’année suivante.
À la différence que, cette fois-là, son équipe avait imposé un rythme de dingue et Majka, d’une régularité remarquable sur l’épreuve italienne chez UAE (24e en 2021, 23e en 2022, 25e en 2023 et 80e l’an passé), était évidemment de la partie: «Avec Diego (Ulissi), on avait attendu la dernière ascension pour vraiment accélérer, Joao Almeida avait aussi travaillé dans la première ascension du Ghisallo, et à la fin, Tadej… Ciao, ciao, ciao! ( rires). »
Seul Enric Mas, en pleines cannes après sa victoire sur le Tour d’Émilie quelques jours avant, avait fait plus que lui résister dans le Ghisallo, essayant même de le larguer à 6 kilomètres du terme, en vain. À 150 mètres de la ligne, l’Espagnol lançait le sprint, le Slovène enclenchait, semblait s’incliner au point de se rasseoir sur sa selle avant de se dresser de nouveau sur les pédales pour l’emporter.
L’image d’une arrivée avec un adversaire est devenue rare puisque, les deux années suivantes, il a affirmé sa marque de fabrique, partir seul et ne jamais être repris. Il y a deux ans, il avait ainsi attaqué à trois reprises dans le passo di Ganda, il restait alors 37 kilomètres à parcourir. « Je pense que c’est ce jour-là qu’il a commencé à gagner ses courses en solo, observe le Polonais. Et plus facilement aussi. On le voit maintenant, il peut attaquer n’importe où, gagner n’importe où et je n’ai jamais vu ça de ma vie. J’ai pourtant travaillé pour Peter Sagan, Alberto Contador, mais ce gars est une machine, un tueur.»
Un tueur avec ses fragilités et, en 2023, il avait crampé, se frappant les muscles à 12 kilomètres de l’arrivée pour tenir le coup. Une époque révolue pour le vainqueur de trois étapes du Tour : « Il a tout amélioré chez lui, le mental mais aussi le physique. On voit qu’il est devenu un homme, qu’il est plus costaud.» Tellement que, l’an passé, il avait plié l’affaire encore plus vite, à 48,5 kilomètres de la ligne ( « Je n’étais même plus surpris, on le savait » ), en attaquant dans le col de Sormano et en broyant Remco Evenepoel (2e à 3’16’’). Dans la cité bergamasque, aujourd’hui, Rafal Majka tireras es derniers feux (« Je veux juste passer la ligne, peu importe comment »), heureux du travail accompli et de la transmission effectuée, auprès de Pavel Sivakov, notamment, 6e l’an passé au service du Slovène pour la première fois.
Hier, le Français ne voyait pas comment le double champion du monde ne pourrait pas rejoindre Fausto Coppi et ses cinq victoires, selon une méthode collective éprouvée: «C’est assez simple sur le papier. Rouleau compresseur toute la journée et on lance la fusée dans le final.» L’année prochaine et les suivantes, Rafal Majka regardera ce scénario écrit d’avance dans son canapé: «Tadej a encore cinq années devant lui, pour tout gagner, battre tous les records.»
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