« Une journée vraiment étrange»


Le peloton avait terminé le 15 juillet 2001, lors de la 8e étape du Tour, 
hors délai à plus de 35 minutes du vainqueur du jour Erik Dekker (Rabobank).

Alors que le Tour de France retrouve Pontarlier aujourd’hui, sa dernière venue, en 2001, avait donné lieu à une journée dingue, au cours de laquelle quatorze échappés s’étaient joué la gagne. Et le reste des coureurs avait terminé hors délai, avant d’être repêché.

“L’échappée prend du temps, du temps, et au bout d’un moment, 
on s’est rendu compte qu’on allait être hors délai !’’ 
   - THIERRY GOUVENOU, ANCIEN COUREUR 
      DE BIGMAT-AUBER 93

26 Jul 2025 - L'Équipe
PIERRE MENJOT

LA PLAGNE (SAVOIE) – L’étape d’aujourd’hui, au profil d’une petite classique entre Nantua et Pontarlier, s’annonce explosive. Mais difficile de l’imaginer aussi folle que la dernière arrivée du Tour de France dans la sous-préfecture du Doubs. Un jour où « le Tour a perdu la tête » , comme le titrait L’Équipe le lendemain. Un jour où 161 coureurs sur 175 avaient terminé hors délai, alors que le peloton passait sous la banderole des 25 kilomètres au moment où Erik Dekker s’imposait.

Au matin de cette 8e étape, à Colmar, « sous des trombes d’eau » , se souvient Thierry Gouvenou, alors chez BigMat-Auber 93, le brief est clair. « C’était une journée pour l’échappée », rembobine Marc Wauters, coureur de Rabobank à l’époque. Le Belge ne manque pas sa mission et file à l’avant, avec quatorze autres coureurs, parmi lesquels ses équipiers Dekker ou Bram de Groot, l’Australien Stuart O’Grady (Crédit Agricole), le Kazakhstanais Andreï Kivilev (Cofidis) ou les Français Jacky Durand (La Française des Jeux), Ludovic Turpin (AG2R Prévoyance), François Simon (Bonjour) et Pascal Chanteur (Festina). Et un os qui s’est glissé parmi eux: Alexandre Vinokourov (Telekom).

Le Kazakhstanais est une vraie menace pour le général (à moins d’une minute d’Armstrong à ce moment-là), « alors ça roulait super fort derrière nous, le peloton ne voulait pas nous laisser nous échapper, explique O’Grady. Par la main de Dieu, Vino a eu une crevaison. Et le peloton a laissé partir».

Commence alors le concours de l’équipe qui en fait le moins.

Les Crédit Agricole du Maillot Jaune, Jens Voigt, laissent faire puisqu’ils ont O’Grady à l’avant, bien placé au général grâce à la victoire dans le contre-la-montre par équipes à Bar-le-Duc. Les cadors du général ne voient pas de danger potentiel parmi les fuyards. Les équipes de sprinteurs ont du monde à l’avant. «Alors personne n’a voulu assurer le moindre train», résume Grischa Niermann, de Rabobank.

Devant, «on a roulé assez fort pour rester chauds», rigole O’Grady. Derrière, avec le vent de face, « c’était un enfer, s’esclaffe Gouvenou. Des trombes d’eau, le froid, car on était sur du 4 ou 5 degrés en plein mois de juillet, donc on n’était pas prêts, une longue étape (222,5 km)… Donc l’échappée prend du temps, du temps, et au bout d’un moment, on s’est rendu compte qu’on allait être hors délai ! Là, ça s’est mis à rouler à fond dans le peloton, pour éviter de perdre davantage de temps, sauf qu’il faisait tellement froid qu’on avait les jambes tétanisées. » « On ne reprenait rien, alors que c’était très, très dur, grimace Niermann. Une journée vraiment étrange. »

L’écart ne faiblit pas, car à l’avant, ça ferraille. Les échappés ont 35 minutes d’avance et chacun joue sa carte. « Pour moi, l’important était de garder le groupe ensemble pour reprendre le Maillot Jaune, explique O’Grady. Donc je faisais le maximum pour conserver l’écart. » Les Rabobank, en surnombre, visent la gagne.

Le peloton a profité du règlement pour ne pas être éliminé

« Après trois heures de course, on a commencé à attaquer, revit Wauters, aujourd’hui directeur sportif chez Lotto. On s’est retrouvés à quatre pour jouer le sprint avec Erik (Dekker), Servais (Knaven, Domo Farm Frites) et “Speedy” (Aitor) Gonzalez (Kelme-Costa Blanca). Erik était plus fort que moi au sprint, donc j’ai essayé de rouler pour lui, d’autant que j’avais gagné la 2e étape cette année-là grâce à lui, je voulais lui renvoyer l’ascenseur.C’ est un bon souvenir, une étape fantastique. »

O’Grady, 5e à 2’32’’, est le nouveau leader du Tour, pour deux jours. François Simon, arrivé dans le même groupe que l’Australien, et Kivilev, à peine plus loin, reprennent 33 minutes aux coureurs du général, ce qui leur servira jusqu’à Paris. Le Troyen, Maillot Jaune durant trois jours, termine 6e de la Grande Boucle, lui qui n’avait jamais fait mieux que 30e. Le leader de Cofidis échoue au pied du podium à Paris, son meilleur classement également (il mourra en 2003 après une chute sur Paris-Nice).

Le peloton, qui finit comme il peut, profite du règlement : si le nombre des coureurs parvenus hors délai est supérieur à 20 % des partants, il n’y a pas d’élimination. « Heureusement, sinon ça aurait été très long à quatorze jusqu’à Paris, se marre O’Grady. Je ne crois pas que j’aurais gagné le Tour, non. » L’Équipe voit dans cette journée un recul des pratiques dopantes, le rouleau compresseur habituel qui a besoin de jours off, et même Marc Madiot, alors directeur sportif chez « La Française », y croit (« Aujourd’hui, la tendance est au beau fixe »), tout en prévenant : « Vous savez, chat échaudé… » La suite lui donnera raison : le Tour 2001 n’a pas de vainqueur au palmarès.

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