Le fil de Miroir
Par Jean-Emmanuel Ducoin
Rédacteur en chef
Miroir du cyclisme - n. 475/2025
Une histoire incroyable, une aventure scellée par le temps long, une course de forcenés. Ce n'était au départ qu'une envie, héritière d'un rêve venu presque du fond des âges. Un rêve enfin exaucé Après trente ans de silence, Miroir du cyclisme reparaît. Les dictionnaires, qui possèdent la réputation d'avoir raison sur tout, se trompent sur un point: le vélo n'est pas qu'un moyen de locomotion. C'est aussi un conte de fées. Il en a l'extravagance et la candeur, la gravité et la dramaturgie, car tout y est possible, à commencer par le bonheur.
De 1960 à 1994, nos aïeux inventèrent une écriture
de l'information sportive fervente et engagée.
Le cyclisme n'est pas un sport; c'est un genre. Les genres déclinent ou se transforment, comme les civilisations. Miroir du cyclisme n'était pas une revue; c'était un genre. Nous osons aujourd'hui le ressusciter. Dans la continuité des Illustres, avec la tragédie classique, l'épopée versifiée, pour prendre la mesure du monde dans ses beautés humaines et ses excès.
De 1960 à 1994 (avec le numéro 474), Miroir du cyclisme inventa une autre écriture de l'information sportive vivante, fervente et engagée. Durant plus de trente ans, Miroir a été le magazine « cycliste » le plus mythifié de l'histoire, au point de devenir, à l'époque, la revue de « référence » sur le sujet. Une chevauchée unique, légendaire, tant par son succès qu près des lecteurs que par la place qu'elle occupe encore dans les mémoires. Miroir fut le Tour d'enfance de générations de champions, introduits dans un univers grandiose. On n'y par lait que de Géants et de légendes, des ouvriers du vélo devenus des Forçats, des hommes et des femmes comme vous et nous. Car l'épreuve sportive et la pratique elle-même reproduisent la vie. En moins commun et en plus violent: donc en plus vrai.
Nos aïeux n'étaient pas n'importe qui, ni là par hasard. Beaucoup furent des résistants sous l'Occupation. Ils s'appelaient Maurice Vidal (Libération), Mice Jacques Augendre (l'Équipe, le Monde), Émile Besson (l'Humanité), Jean Bobet ('l'Équipe, le Monde), Jean-Paul Brouchon (Radio France), Robert Chapatte (télévision), Pierre Chany (l'Équipe). Jacques Marchand (l'Équipe, le Matin de Paris), Abel Michéa (l'Humanité), etc. Des passionnés insensés, des manieurs de plume, des stylistes, des inventeurs, des irréguliers assoiffés qui suivaient à travers champs les exploits et les violences des utopies. Tous réunis pour un même projet. Et une ambition qui les dépassait: Miroir du cyclisme.
Le cyclisme y était vécu comme une fête, mais avec une lucidite totale. Miroir savait se montrer intraitable, comme le montre, dans les archives, la place de choix occupée par les dessins de presse et les caricatures. Par le texte ou par l'image, la «valse des millions» fut dénoncée très tôt, et à travers elle la cohorte de menaces induites par une financiarisation croissante du sport. Entre enthousiasme et indignation, Miroir avait trouvé son ton. Et l'imposa. Les plus grands champions en furent même des collaborateurs réguliers et participèrent à sa gloire. De Jacques Anquetil à Bernard Thévenet, de Luis Ocaña à Eddy Merckx, de Cyrille Guimard à Bernard Hinault, de Laurent Fignon à Jeannie Longo. Les collectionneurs des numéros en savent quelque chose: rien ne manque dans la vie des héros de la petite reine. Un temps limité, des personnages marqués, des intrigues, du suspense, des exploits, des rebondissements, des lenteurs, des accélérations, des rires, des catastrophes. Un roman, finalement. Destiné aux romantiques et aux audacieux.
Nous ne portons pas de «morale»,
mais un regard et une vision
du monde appliqués au cyclisme.
Nous voilà dans les pas de la grande Histoire. Pas un rêve de grandeur; juste un songe d'immensité. En 2025, Miroir du cyclisme, avec un comité de rédaction éclectique, ne renaît donc que pour se réinventer, mais en préservant l'état d'esprit, pour ne pas dire cette ligne de conduite. Il n'entend ni singer ce qu'il fut, ní regarder uniquement dans les rétros. Miroir se veut à la fois populaire et fort dans son contenu, en plaçant toujours l'humain et les collectifs d'abord, dans une époque où l'individualisme règne en maître, singulièrement dans le cyclisme. Nous nous sommes mis en quête d'histoires et de parcours de vie, avec la volonté de «raconter» notre époque, et avec comme but de rechercher la vérité e de la dire. Aucun sujet n'est tabou, afin de dénoncer les dérives du sport actuel, de l'argent roi au dopage, des inégalité aux injustices, du mercantilisme brutal à la préfiguration d'un nouveau genre de coureurs, proches des héros virtuels.
Miroir ne porte pas de « morale » mais un regard et une vision du monde appliqués au cyclisme, en essayant de ne laisser personne sur le bas-côté. Nous entendons traiter le sport professionnel masculin et féminin, mais aussi toutes les pratiques inhérentes au cyclisme, sans oublier les évolutions sociologiques et politiques qui font du vélo un enjeu planétaire. Nous croyons en la légende des Cycles; pas à la fin d'un cycle. Le cyclisme, singulièrement depuis la création en 1903 du Tour de France, nous trouble parce qu'il nous parle d'un pays proche et d'un monde lointain, souvent en mode onirique. Parce qu'il demeure sans doute la plus ordinaire et la plus difficile des aventures a l'extrême, vaste livre d'images à destination des peuples, balançant entre ses traditions et les exigences de la compétition moderne.
«C'est en allant vers la mer que le fleuve reste fidèle à sa source», disait Jean Jaurès. Symboliquement, ce Miroir du cyclisme que vous tenez en main n'est pas le numéro 1 d'une «nouvelle formule », mais bien le numéro 475. Nous reprenons le récit là où nos prédécesseurs l'avaient laissé.
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Il filo del Miroir
Di Jean-Emmanuel Ducoin
Caporedattore
Miroir du cyclisme - N. 475/2025
Una storia incredibile, un'avventura sigillata dal tempo, una stirpe di folli. Tutto è iniziato come un desiderio, erede di un sogno che proveniva quasi dalle profondità del tempo. Un sogno finalmente realizzato. Dopo trent'anni di silenzio, Miroir du cyclisme riappare. I dizionari, che hanno la reputazione di avere ragione su tutto, sbagliano su un punto: la bicicletta non è soltanto un mezzo di trasporto. È anche una fiaba. Ne ha la stravaganza e il candore, la gravità e il dramma, perché tutto è possibile, a partire dalla felicità.
Dal 1960 al 1994, i nostri antenati hanno inventato
un modo fervente e impegnato di scrivere notizie sportive.
Il ciclismo non è (solo) uno sport; è un genere. I generi declinano o si trasformano, come le civiltà. Miroir du cyclisme non era (solo) una rivista; era un genere. Oggi osiamo farla rivivere. Seguendo le orme de Les Illustres, con la tragedia classica e l'epica in versi, per fare il punto sul mondo nelle sue bellezze e nei suoi umani eccessi.
Dal 1960 al 1994 (con il numero 474), Miroir du cyclisme ha inventato una forma diversa di cronaca sportiva, vivace, fervente e impegnata. Per oltre trent'anni, Miroir è stata la rivista di "ciclismo" più mitizzata della storia, al punto da diventare, all'epoca, la rivista di "riferimento" sull'argomento. Un'edizione unica e leggendaria, sia per il successo di pubblico che per il posto che ancora occupa nella memoria collettiva. Miroir è stato il Tour d'infanzia per generazioni di campioni, introdotti in un universo grandioso. Parliamo solo di giganti e leggende, di corridori diventati galeotti, di uomini e donne come voi e noi. Perché l'evento sportivo e la pratica stessa riproducono la vita. Meno comune e più violenta: quindi, più reale.
I nostri antenati non erano persone qualunque, né erano lì per caso. Molti erano stati combattenti della Resistenza durante l'occupazione. I loro nomi erano Maurice Vidal (Libération), Mice Jacques Augendre (L'Équipe, Le Monde), Émile Besson (L'Humanité), Jean Bobet (L'Équipe, Le Monde), Jean-Paul Brouchon (Radio France), Robert Chapatte (televisione), Pierre Chany (L'Équipe), Jacques Marchand (L'Équipe, Le Matin de Paris), Abel Michéa (L'Humanité) eccetera. Folli entusiasti, pennaioli, stilisti, inventori e assetati irregolari che seguivano le imprese e la violenza delle utopie da una costa all'altra. Tutti uniti per un unico progetto. E un'ambizione che li ha superati: Miroir du cyclisme.
Lì il ciclismo è stato vissuto come una festa, ma con totale lucidità. Miroir sapeva essere intransigente, come testimonia negli archivi il posto di rilievo occupato da vignette e caricature giornalistiche. Attraverso testi o immagini, il "valzer dei milioni" fu denunciato molto presto, e attraverso di esso la schiera di minacce indotte dalla crescente finanziarizzazione dello sport. Tra entusiasmo e indignazione, Miroir aveva trovato il suo tono. E lo aveva imposto. I più grandi campioni ne erano persino collaboratori fissi e ne condividevano la gloria. Da Jacques Anquetil a Bernard Thévenet, da Luis Ocaña a Eddy Merckx, da Cyrille Guimard a Bernard Hinault, da Laurent Fignon a Jeannie Longo. I collezionisti di questi numeri ne sanno qualcosa: non manca nulla alle vite degli idoli della reginetta. Un tempo definito, personaggi forti, intrighi, suspense, gesta, colpi di scena, rallentamenti, accelerazioni, risate, disastri. Un romanzo, in definitiva. Destinato ai romantici e agli audaci.
Non offriamo una "morale",
ma una prospettiva e una visione
del mondo applicata al ciclismo.
Eccoci qui, sulle orme della grande Storia. Non un sogno di grandezza; solo un sogno di immensità. Nel 2025, Miroir du cyclisme, con una redazione eclettica, rinasce solo per reinventarsi, pur preservando il suo spirito, per non dire il suo principio-guida. Non intende né imitare ciò che era una volta, né guardarsi solo allo... specchio. Miroir mira a essere allo stesso tempo popolare e potente nei suoi contenuti, mettendo sempre al primo posto le persone e le collettività, in un'epoca in cui l'individualismo regna sovrano, soprattutto nel ciclismo. Ci mettiamo alla ricerca di storie e percorsi di vita, con il desiderio di "raccontare" la nostra epoca, e con l'obiettivo di cercare la "verità" e raccontarla. Nessun argomento è tabù, per denunciare gli eccessi dello sport odierno, dal denaro al doping, dalla disuguaglianza all'ingiustizia, dal brutale consumismo alla prefigurazione di un nuovo tipo di corridore, vicino agli idoli virtuali.
Miroir non offre una "morale", ma piuttosto una prospettiva e una visione del mondo applicate al ciclismo, cercando di non lasciare indietro nessuno. Intendiamo coprire lo sport professionistico maschile e femminile, ma anche tutte le pratiche inerenti il ciclismo, senza dimenticare gli sviluppi sociologici e politici che rendono il ciclismo una questione globale. Crediamo nella leggenda dei Cicli, non nella fine di un ciclo. Il ciclismo, in particolare dalla nascita del Tour de France nel 1903, ci turba perché ci parla di un Paese vicino e di un mondo lontano, spesso in modalità onirica. Perché rimane la più ordinaria e la più difficile delle avventure estreme, un immenso libro illustrato per i popoli, in equilibrio tra le sue tradizioni e le esigenze della competizione moderna.
"È andando verso il mare che il fiume rimane fedele alla sua sorgente", diceva Jean Jaurès. Simbolicamente, questo Miroir du cyclisme che tenete in mano non è il numero 1 di una "nuova formula", ma il numero 475. Stiamo riprendendo la storia da dove i nostri predecessori si erano fermati.


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