Robert Redford - Une grande pointure hollywoodienne


Robert Redford, à Sundance, 
dans l’Utah, en 2009.

Star de légende, cinéaste, producteur et citoyen engagé dans la défense de l’environnement, créateur du Festival de Sundance, l’acteur restera comme une des plus séduisantes figures du cinéma américain. 
Il s’est éteint à 89 ans.

« La politique est une part importante de nos vies, 
mais je peux mieux faire entendre ma voix en restant neutre. 
Parce que je suis très critique sur le système » 
   - Robert Redford

17 Sep 2025 - Le Figaro
Marie-Noëlle Tranchant

Les Grecs avaient inventé un mot qui pourrait qualifier Robert Redford : « kalos kagathos. » La star hollywoodienne a montré que cette harmonie claire de la beauté et de l’intelligence tournée vers le bien était un modèle tout à fait transposable dans l’amérique du XXE siècle. Il s’est éteint ce mardi, à l’âge de 89 ans, a annoncé le New York Times.

À ses débuts, il renvoie l’image éclatante de la jeunesse californienne blonde et sportive des années 1950. Avec ce sourire craquant qui n’appartient qu’à lui, où l’humour le dispute à la pudeur. Mais tout son parcours fera de lui une personnalité morale et politique d’une rare cohérence, artiste et citoyen engagé d’un même élan dans la défense de l’environnement, des libertés civiles, de l’indépendance de la création.

Être responsable : un mot-clé pour comprendre Redford, a dit Jane Fonda, lors de leur dernier duo à la Mostra de Venise, en 2017, pour la présentation de Our Souls at Night. Une romance lumineusement crépusculaire, où les deux stars se retrouvaient après trois films mémorables ensemble, The Chase (La caccia, ndr), d’arthur Penn, Pieds nus dans le parc, de Gene Sacks et Le Cavalier électrique, de Sydney Pollack.

Né le 18 août 1936 dans un quartier populaire de Santa Monica, à Los Angeles, Robert Redford a connu enfant la pauvreté de la Grande Dépression. Son père est vendeur de lait avant de devenir comptable à la Standard Oil. Les années de formation montrent des influences complexes. Le jeune Californien est « fasciné par l’irlande de sa grand-mère », selon son biographe Michael Feeney Callan. Les femmes de la famille ont des personnalités fougueuses. Sa mère lui donne l’amour des grands espaces et l’envie de défendre le rêve américain dans ce qu’il a de plus grand. Son ascendance multiple (irlando-anglo-écossaise et un peu française) ajoute un tropisme européen : adolescent, il part étudier les Beaux-arts en France et en Italie.

À 20 ans, il est à Paris, obscur rapin sans le sou et porté sur l’alcool. Il date de ce séjour difficile et formateur sa première prise de conscience politique : «C’était au lendemain de l’affaire de Suez. Les Français n’aimaient pas les Américains. C’est la première fois que j’ai été amené à réfléchir sur les événements internationaux. » Il mesure aussi les limites de son talent de peintre. À son retour en Amérique, il cherche toujours sa voie. Illustrateur ? Décorateur de théâtre? En tout cas ce garçon volontiers solitaire, plutôt timide et pas du tout démonstratif, ne songe pas à devenir acteur.

Une jeune fille de 18 ans, Lola Van Wagenen, le sauve de la déprime et de l’alcool. Ils se marient en 1958. Ils divorceront vingt-six ans plus tard, après avoir eu trois enfants. C’est elle qui va l’orienter vers le métier d’acteur, qu’il aborde avec réticence, à Broadway. Il prétendait avec humour ne pas avoir appris à jouer : selon lui, être un bon acteur consiste avant tout à « essayer de ne pas être mauvais », et à ne pas avoir peur du public. Il n’ira jamais vers l’outrance. Solaire mais discret, ses interprétations relèvent du « sous-jeu ».

Le temps des vaches maigres de ses jeunes années prend fin avec Daisy Clover, de Robert Mulligan, en 1965, où Robert Redford incarne le séducteur cynique de Natalie Wood. L’acteur enchaîne avec The Chase (La Poursuite impitoyable, 1966) d’arthur Penn, première rencontre avec Jane Fonda et Propriété interdite (1966), première rencontre avec Sydney Pollack, qui lui offrira quelquesuns de ses meilleurs rôles : Jeremiah Johnson (1972), Nos plus belles années (1973), Les Trois Jours du Condor (1975), Le Cavalier électrique (1979), Out of Africa (1986), Havana (1990).

En attendant, le triomphe arrive avec le western de George Roy Hill, Butch Cassidy et le Kid (1970). Redford devient aussi populaire que son prestigieux partenaire, Paul Newman. Le réalisateur réunira de nouveau ces duettistes de haut vol dans L’arnaque, en 1973. L’année suivante, il sera le mélancolique Gatsby le Magnifique de l’adaptation de Jack Clayton (scénario de Coppola). Robert Redford peut savourer la gloire et la fortune. Il ne dédaigne pas le succès, les belles voitures et faire tourner les têtes. Il ne s’en contente pas non plus. Son image de beau blond charmeur au sourire craquant qui fait rêver dans les magazines l’agace vite. « Moralement, je me sens plutôt brun ! », corrigeait-il avec humour. Il fait partie des quelques grandes pointures hollywoodiennes qui ont un véritable univers artistique, Paul Newman, Clint Eastwood, Warren Beatty, Jack Nicholson plus marginalement.

Dès les années 1970, Redford devient producteur, avec un premier film politique, Votez Mckay, de Michael Ritchie, satire des moeurs électorales. C’est l’époque de la contestation et de l’engagement avec tambours et trompettes. Redford affiche sa haine pour Nixon et fait un coup d’éclat en produisant Les Hommes du président, dans lequel il joue également, d’alan J. Pakula, sur le Watergate. Le film sort en 1976, mais Redford s’est emparé du sujet dès 1972, année où l’affaire éclate. Il a immédiatement contacté Woodward et Bernstein, les journalistes du Washington Post à l’origine du scandale : il voulait faire le film de leur point de vue. « Leurs méthodes ne sont pas différentes de celles qu’ils ont dénoncées, observe-t-il avec réalisme. Mais le résultat est positif. »

Il y a chez Robert Redford acteur et producteur des lignes de force qui annoncent le cinéaste qu’il va devenir : un romantisme moral et politique, un amour profond de la nature, une réflexion sur l’illusion et la réalité, un désenchantement du succès et du pouvoir. En 1980, il signe son premier film, Des gens comme les autres, qui remporte quatre oscars. À travers l’histoire d’une famille brisée par la mort accidentelle de l’aîné des deux fils, Redford analyse les blocages de la société américaine, figée dans une idéologie du bonheur et du succès qui lui fait refouler toute vérité tragique. On en retrouvera les échos dixhuit ans plus tard dans son cinquième film, L’homme qui murmurait à l’oreille des chevaux (1998). Dans le rôle titre de

Tom Booker, dresseur guérisseur, il représente l’accord subtil avec la nature face aux raideurs de la société. Entretemps, il réalise Milagro (1988), fable moqueuse sur la lutte de petits cultivateurs mexicains du Texas contre des promoteurs immobiliers qui veulent construire un parc d’attractions sur leurs terres ancestrales. Il filme déjà admirablement les couchers de soleil, comme dans son film suivant Et au milieu coule une rivière (1991). « Sans doute un reliquat de mon passé de peintre, dira-t-il alors. J’aime les couchers de soleil. C’est un moment puissant et triste. » Sa beauté est inséparable du sentiment de la disparition. Un jour sombre dans le passé. Et au milieu coule une rivière est le plus purement lyrique des films de Redford.

Tiré d’une nouvelle de Norman Maclean, il raconte le destin de deux frères, fils d’un pasteur du Montana qui les élève dans le culte de la religion et de la pêche à la mouche : «Toutes les bonnes choses, estimait-il - que ce soit la truite ou le salut de l’âme - viennent par la grâce. La grâce vient par l’art et l’art est difficile. » Le sage aîné deviendra professeur d’histoire. Le turbulent cadet (Brad Pitt, double juvénile de Redford), merveilleux pêcheur à la mouche à la grâce innée, fera une brève carrière de journaliste et de mauvais garçon avant de mourir assassiné. Sous la chronique familiale, le film compose un poème plus mystérieux sur le temps qui passe, la nostalgie de l’inaccompli, la solitude et l’impuissance à aimer ceux que nous aimons, l’alliance immémoriale entre la perfection et la mort.

La beauté sauvage et limpide des paysages du Montana, montagnes, forêts, rivières étincelantes, admirablement photographiées, parle mieux que tous les discours amoureux de Redford sur la nature. Son engagement écologique n’est pas un simple volet du programme obligé d’un démocrate progressiste. Il a des racines personnelles profondes : « Je suis né dans l’ouest, c’est la partie du pays que je préfère, et une grande part de mavie» , a-t-il dit. De là son intérêt pour la civilisation des Indiens d’amérique (il a écrit un livre et produit plusieurs films qui leur sont consacrés) et par extension la défense des cultures minoritaires comme celle de la communauté hispanique évoquée dans Milagro. C’est une sensibilité très incarnée, et par bien des aspects, traditionnelle, qui nourrira sa réflexion et ses engagements publics.

Dès les années 1960, il a acquis un petit terrain dans l’utah, et entrepris d’y construire lui-même sa maison en appliquant des principes écologiques : respect de l’environnement, utilisation des énergies naturelles. Au fil des années, il ne cessera d’agrandir son domaine, qui compte à présent plus de 600 hectares. Il y aménage une station de ski, mais préserve aussi des espaces sauvages. Surtout, il y crée en 1980 le Sundance Institute, destiné à favoriser le jeune cinéma indépendant, loin des grands studios. Des consultants aident des auteurs novices à peaufiner leurs scénarios. Bientôt, des ateliers de réalisation permettent de tourner les films sur place. Cinq ans plus tard, le Sundance Institute est devenu un centre de création florissant, et Redford lance le Sundance Film Festival, si couru aujourd’hui qu’il attire les majors, et qu’on lui a reproché de se vendre à Hollywood.

Politiquement, sa vision est claire. Il n’a jamais envisagé de s’impliquer directement dans l’action politique, mais revendique pleinement son rôle d’influence : « La politique est une part importante de nos vies, mais je peux mieux faire entendre ma voix en restant neutre. Parce que je suis très critique sur le système. »

Pour lui, les médias américains sont partagés en deux camps, libéral et conservateur, qui réagissent l’un par rapport à l’autre. Et s’il n’accorde nul crédit aux conservateurs, il ne veut pas devenir l’otage de l’autre bord. « J’aime les gens qui font l’effort de devenir conscients, ditil. J’ai grandi avec une envie forte d’indépendance, je ne voulais appartenir à aucune organisation, aucun parti, aucun courant de pensée. Ça a toujours fait partie de ma vie. »

En 2015, invité à L’ONU sur le réchauffement climatique, il se présente comme «un acteur, un père et un grand-père, et un citoyen responsable », et il se réfère au pape François pour situer la question sur le plan de la morale. « Votre mission est aussi simple qu’effrayante : sauver le monde avant qu’il ne soit trop tard », dit-il. La même année, il vient à l’unesco défendre les cultures des peuples autochtones. À la fois idéaliste et pragmatique, efficace dans ses réalisations, et généreux dans ses convictions, Redford a mis son immense talent, son charme et son humour au service d’une vision large de l’existence, et d’un rare souci du bien commun. Les couchers de soleil seront désormais plus beaux et plus tristes.

***

Sex-symbol malgré lui

Étienne Sorin, M.-n.t. et Éric Neuhoff
17 Sep 2025 - Le Figaro

L’anecdote est éloquente. Durant la préparation du Lauréat, le réalisateur Mike Nichols faisait passer des bouts d’essai pour le rôle de Benjamin Braddock, étudiant encore puceau. À tous, il posait la question : « Que faites-vous quand une fille vous dit non?» Robert Redford, qui avait postulé, répondit : « Je ne sais pas, ça ne m’est jamais arrivé.» C’est Dustin Hoffman qui figura en haut de l’affiche. On imagine qu’il fut plus disert sur le sujet. Tel était, dès le début, Robert Redford : pas seulement un physique avantageux, mais une personnalité qui ne se limitait pas à sa blondeur.

Des beaux gosses, il y en a eu, à Hollywood. Des comme lui, on n’en trouvait qu’un. À une époque, les dames étaient bien embêtées : il leur fallait choisir entre lui et Paul Newman, Butch Cassidy et le Kid (petit jeu : lequel jouait qui ?). Dans L’arnaque, le smoking lui convenait à merveille - Newman ne s’en tirait pas mal non plus, devant une table de poker. Les années 1970 ont été son royaume, sa cour de récréation. Qui mieux que lui pouvait incarner un champion de ski dans La Descente infernale ? S’il s’était présenté aux élections présidentielles comme dans Votez Mckay, les citoyens se seraient jetés sur les urnes. À côté, Kennedy ressemblait à M. Tout-lemonde.

Trappeur barbu et couvert de peaux de bêtes, Jeremiah Johnson aurait poussé n’importe qui à s’enfoncer dans la neige des Rocheuses. Il respirait la santé, la chlorophylle, mêlait le naturel et la sophistication. La veste de tweed et le bonnet qu’il porte dans Les Trois Jours du Condor rivalisaient avec le maillot qu’arborait le joueur de baseball du Meilleur. Dans ses Mémoires, Faye Dunaway rappelle la difficulté qu’elle avait dans le premier de ces films à prendre des mines effrayées parce que Redford l’avait kidnappée. Il finit par coucher avec elle. Elle ne déposera pas plainte.

Dans la salle, les spectatrices ne rêvaient que de ça. Il n’y avait que lui pour zigzaguer à Solex dans les rues de Manhattan. Le costume blanc de Gatsby lui allait comme un gant. Il fallait le voir arpenter sa propriété de West Egg, observer au loin la lumière verte qui clignotait de l’autre côté de la baie. Le couple qu’il formait avec Meryl Streep dans Out of Africa reste gravé dans les esprits. La scène où il lave les cheveux de sa partenaire regorge de sensualité et de romanesque. Soudain, le public au complet regrettait de ne pas avoir eu une ferme en Afrique.

Sex-symbol exempt de perversité, il séduit sans effort. Sa présence va de soi. La caméra tombait aussitôt amoureuse de lui. Sur la pellicule, l’injustice règne. Des générations successives ont cru que le journalisme se résumait à porter des cravates dénouées et des chemises oxford aux manches retroussées comme le Bob Woodward des Hommes du président. Décrocher son téléphone, un crayon entre les lèvres, voilà une attitude que les apprentis reporters s’amusaient à imiter. Appelez ça comme vous voulez, charme, charisme, cela existe.

« Un sourire 100 % américain »

Qui, à part lui, était capable de mâcher du chewing-gum avec élégance? Il plaisait aux dames. Les hommes ne le détestaient pas. L’exploit était de taille. Les mauvaises langues prétendaient qu’il était minuscule (légende : il mesurait 1,79 mètre). Les jaloux assuraient qu’il avait la peau grêlée. Broutilles que tout cela. Le scénario de Proposition indécente ne tient pas debout. Redford obligé de payer 1 million de dollars pour passer une nuit avec Demi Moore, qui a donc inventé cette situation saugrenue ? L’inverse aurait été plus vraisemblable.

Même les chevaux n’étaient pas insensibles à son attrait, à condition qu’il leur murmure à l’oreille. On lui pardonnait jusqu’à ses cheveux teints en orange dans All Is Lost où son bateau coulait au milieu de l’océan Indien. Ses apparitions dans Captain America ou Avengers avaient de quoi décevoir les aficionados : « nobody’s perfect. » À la fin, dans Nos âmes la nuit (2017), il tombait dans les bras de Jane Fonda qui l’avait déjà épousé dans Pieds nus dans le parc (1967). Maintenant, le Sundance Kid a rejoint son vieux pote Butch Cassidy qui l’a sans doute accueilli en lui confiant : « Pendant un instant, j’ai cru qu’on avait un problème. » Un souvenir, un dernier. Dans Nos plus belles années, le professeur lit à haute voix la copie qu’a rédigée Redford, son élève en pull jacquard. Le texte s’intitule «Un sourire 100% américain». Il commence ainsi : « En un sens, il ressemblait à son pays. Tout lui arrivait trop facilement, mais au moins il le savait. » Résumé parfait. Tel était, oui, Robert Redford. 

***

Robert Redford, a Sundance, 
nello Utah, nel 2009.

Robert Redford - Una gran nome di Hollywood

Star leggendaria, regista, produttore e cittadino impegnato nella difesa dell'ambiente, ideatore del Sundance Festival, l'attore rimarrà una delle più affascinanti figure del cinema americano.

Si è spento all'età di 89 anni.

«La politica è una parte importante della nostra vita,
ma posso far sentire meglio la mia voce rimanendo neutrale.
Perché sono molto critico nei confronti del sistema»
   - Robert Redford

17 settembre 2025 - Le Figaro
Marie-Noëlle Tranchant

I greci avevano inventato un'espressione che potrebbe descrivere Robert Redford: «kalos kagathos». La star di Hollywood ha dimostrato che questa chiara armonia tra bellezza e intelligenza orientata al bene era un modello perfettamente trasferibile nell'America del XX secolo. È scomparso martedì, all'età di 89 anni, secondo quanto annunciato dal New York Times

All'inizio della sua carriera, incarnava l'immagine brillante della gioventù californiana bionda e sportiva degli anni '50. Con quel sorriso accattivante che solo lui possedeva, in cui l'umorismo rivaleggiava con la modestia. Ma tutto il suo percorso lo avrebbe reso una personalità morale e politica di rara coerenza, artista e cittadino impegnato con lo stesso slancio nella difesa dell'ambiente, delle libertà civili e dell'indipendenza della creazione.

Essere responsabili: una parola-chiave per comprendere Redford, ha affermato Jane Fonda durante la loro ultima apparizione insieme alla Mostra del Cinema di Venezia nel 2017, in occasione della presentazione di Our Souls at Night. Una storia d'amore luminosa e crepuscolare, in cui le due star si sono ritrovate dopo tre film memorabili insieme, The Chase (La caccia, ndr), di Arthur Penn, Pieds nus dans le parc, di Gene Sacks e Le Cavalier électrique, di Sydney Pollack.

Nato il 18 agosto 1936 in un quartiere popolare di Santa Monica, a Los Angeles, Robert Redford ha conosciuto da bambino la povertà della Grande Depressione. Suo padre era un venditore di latte prima di diventare contabile alla Standard Oil. Gli anni della formazione mostrano influenze complesse. Il giovane californiano è “affascinato dall'Irlanda di sua nonna”, secondo il suo biografo Michael Feeney Callan. Le donne della famiglia hanno personalità vivaci. Sua madre gli trasmette l'amore per i grandi spazi e il desiderio di difendere il Sogno Americano nella sua forma più grande. Le sue origini multiple (irlandesi, inglesi, scozzesi e un po' francesi) aggiungono un tropismo europeo: da adolescente, parte per studiare Belle Arti in Francia e in Italia (a Firenze, ndr).

A vent'anni si trova a Parigi, oscuro pittore senza un soldo e dedito all'alcool. È proprio durante quel periodo difficile e formativo che nasce la sua prima consapevolezza politica: «Era il giorno dopo la crisi di Suez. I francesi non amavano gli americani. È stata la prima volta che mi sono trovato a riflettere sugli eventi internazionali». Si rende anche conto dei limiti del suo talento di pittore. Al suo ritorno in America, è ancora alla ricerca della sua strada. Illustratore? Scenografo teatrale? In ogni caso, quel ragazzo volutamente solitario, piuttosto timido e per nulla espansivo, non pensa per niente di diventare attore.

Una ragazza di 18 anni, Lola Van Wagenen, lo salva dalla depressione e dall'alcool. Si sposano nel 1958. Divorzieranno ventisei anni dopo, dopo aver avuto tre figli. È lei che lo orienterà verso la professione di attore, che lui affronta con riluttanza, a Broadway. Sosteneva con umorismo di non aver imparato a recitare: secondo lui, essere un buon attore significa soprattutto «cercare di non essere pessimi» e non avere paura del pubblico. Non ricorre mai all'esagerazione. Solare ma discreto, le sue interpretazioni sono caratterizzate da un «sottotono».

Il periodo di magra dei suoi primi anni termina con Daisy Clover, di Robert Mulligan, nel 1965, dove Robert Redford interpreta il cinico seduttore di Natalie Wood. L'attore prosegue con The Chase (1966) di Arthur Penn, primo incontro con Jane Fonda, e Proprietà vietata (1966), primo incontro con Sydney Pollack, che gli offrirà alcuni dei suoi ruoli migliori: Jeremiah Johnson ne Corvo rosso non avrai il mio scalpo! (1972), Hubbell Gardiner in The Way We Were (Come eravamo  (1973), Joseph (Joe) Turner ne I tre giorni del Condor (1975), Sonny Steele ne Il cavaliere elettrico (1979), Denys Finch-Hatton ne La mia Africa (1986), Jack Weil in Havana (1990).

Nel frattempo, il trionfo arriva con il western di George Roy Hill, Butch Cassidy (1970). Redford diventa popolare quanto il suo prestigioso partner, Paul Newman. Il regista riunirà nuovamente quella coppia di alto livello in La stangata, nel 1973. L'anno successivo, Redford interpreterà il malinconico Gatsby nell'adattamento di Jack Clayton (sceneggiatura di Francis Ford Coppola). Robert Redford può godersi la gloria e la fortuna. Non disdegna il successo, le belle auto e far girare la testa, ma non si accontenta. La sua immagine di biondo affascinante dal sorriso accattivante che fa sognare sulle riviste lo infastidisce presto. «Moralmente, mi sento piuttosto bruno!», correggeva con umorismo. Fa parte dei pochi grandi nomi di Hollywood che hanno un autentico universo artistico, insieme con Paul Newman, Clint Eastwood, Warren Beatty e, in misura minore, Jack Nicholson.

Già negli anni '70, Redford diventa produttore con un primo film politico, Votez McKay (Il Candidato), di Michael Ritchie, satira sui costumi elettorali. È l'epoca della contestazione e dell'impegno con tamburi e trombe. Redford manifesta la sua avversione per Nixon e fa colpo producendo Tutti gli uomini del presidente, in cui recita anche, di Alan J. Pakula, sul Watergate. Il film esce nel 1976, ma Redford si era interessato all'argomento già nel 1972, anno in cui scoppiò lo scandalo. Contatta immediatamente Woodward e Bernstein, i giornalisti del Washington Post all'origine dello scandalo: voleva realizzare il film dal loro punto di vista. «I loro metodi non sono diversi da quelli che hanno denunciato», osserva con realismo. «Ma il risultato è positivo».

Nell'attore e produttore Robert Redford si intravedono già le linee-guida che preannunciano il regista che diventerà: un romanticismo morale e politico, un profondo amore per la natura, una riflessione sull'illusione e sulla realtà, un disincanto nei confronti del successo e del potere. Nel 1980 firma il suo primo film, Gente comune (Ordinary People), che vince quattro Oscar. Attraverso la storia di una famiglia distrutta dalla morte accidentale del figlio maggiore, Redford analizza i blocchi della società americana, congelata in un'ideologia di felicità e successo che le fa reprimere ogni tragica verità. Ne ritroveremo gli echi diciotto anni dopo nel suo quinto film, L'uomo che sussurrava ai cavalli (1998). Nel ruolo principale di Tom Booker, addestratore e guaritore, rappresenta il sottile accordo con la natura di fronte alla rigidità della società. Nel frattempo, realizza Milagro (1988), una favola ironica sulla lotta dei piccoli agricoltori messicani del Texas contro i promotori immobiliari che vogliono costruire un parco divertimenti sulle loro terre ancestrali. Già in quel film, come nel successivo Et au milieu coule une rivière (A River Runs Through It, 1991), filma in modo ammirevole i tramonti. «Senza dubbio un residuo del mio passato di pittore», dirà allora. «Adoro i tramonti. È un momento potente e triste». La sua bellezza è inseparabile dal senso di scomparsa. Un giorno cupo nel passato. E In mezzo scorre il fiume è il più puramente lirico dei film di Redford.

Tratto da un racconto di Norman Maclean, narra il destino di due fratelli, figli di un pastore del Montana che li cresce nel culto della religione e della pesca con la mosca: «Tutte le cose buone, riteneva, che fossero le trote o la salvezza dell'anima, vengono dalla grazia. La grazia viene dall'arte e l'arte è difficile». Il saggio fratello maggiore diventerà professore di storia. Il turbolento minore (Brad Pitt, giovane sosia di Redford), meraviglioso pescatore a mosca dotato di grazia innata, avrà una breve carriera come giornalista e ragazzaccio prima di morire assassinato. Sotto la cronaca familiare, il film compone una poesia più misteriosa sul tempo che passa, la nostalgia dell'incompiuto, la solitudine e l'impotenza di amare coloro che amiamo, l'alleanza immemorabile tra la perfezione e la morte.

La bellezza selvaggia e limpida dei paesaggi del Montana, montagne, foreste, fiumi scintillanti, fotografati in modo ammirevole, parla meglio di tutti i discorsi amorosi di Redford sulla natura. Il suo impegno ecologico non è una semplice parte del programma obbligatorio di un democratico progressista. Ha radici personali profonde: «Sono nato nell'Ovest, è la parte del Paese che preferisco e una parte importante della mia vita», ha detto. Da qui il suo interesse per la civiltà dei Nativi americani (ha scritto un libro e prodotto diversi film a loro dedicati) e, per estensione, la difesa delle culture minoritarie come quella della comunità ispanica evocata in Milagro. È una sensibilità molto incarnata e, per molti aspetti, tradizionale, che alimenterà la sua riflessione e il suo impegno pubblico.

Già negli anni '60 acquistò un piccolo appezzamento di terreno nello Utah e iniziò a costruirvi la sua casa applicando princìpi ecologici: rispetto dell'ambiente, utilizzo di energie naturali. Nel corso degli anni non smise mai di ampliare la sua tenuta, che ora conta più di 600 ettari. Vi ha realizzato una stazione sciistica, ma ha anche preservato alcune aree selvatiche. Soprattutto, nel 1980 fonda il Sundance Institute, con l'obiettivo di promuovere il cinema indipendente giovane, lontano dai grandi studios. Dei consulenti aiutano gli autori esordienti a perfezionare le loro sceneggiature. Ben presto, dei laboratori di regia consentono di girare i film sul posto. Cinque anni dopo, il Sundance Institute è diventato un fiorente centro di creazione e Redford lancia il Sundance Film Festival, oggi così popolare da attirare le major, tanto da essere accusato di essersi venduto a Hollywood.

Politicamente, la sua visione è chiara. Non ha mai pensato di impegnarsi direttamente nell'azione politica, ma rivendica pienamente il suo ruolo di influenza: « La politica è una parte importante della nostra vita, ma posso far sentire meglio la mia voce rimanendo neutrale. Perché sono molto critico nei confronti del sistema".

Per lui, i media americani sono divisi in due fazioni, liberal e conservatrice, che reagiscono l'una all'altra. E se non dà alcun credito ai conservatori, non vuole diventare ostaggio dell'altra fazione. «Adoro le persone che si sforzano di diventare consapevoli», dice. «Sono cresciuto con un forte desiderio di indipendenza, non volevo appartenere ad alcuna organizzazione, nessun partito, nessuna corrente di pensiero. Questo ha sempre fatto parte della mia vita».

Nel 2015, invitato all'ONU sul tema del riscaldamento globale, si presenta come «un attore, un padre e un nonno, nonché un cittadino responsabile» e fa riferimento a Papa Francesco per inquadrare la questione dal punto di vista morale. «La vostra missione è tanto semplice quanto spaventosa: salvare il mondo prima che sia troppo tardi», afferma. Lo stesso anno, si reca all'UNESCO per difendere le culture dei popoli indigeni. Idealista e pragmatico al tempo stesso, efficace nelle sue realizzazioni e generoso nelle sue convinzioni, Redford ha messo il suo immenso talento, il suo fascino e il suo umorismo al servizio di una visione ampia dell'esistenza e di una rara attenzione al bene comune. I tramonti saranno d'ora in poi più belli e più tristi.

***

Sex symbol suo malgrado

Étienne Sorin, Marie-Noëlle Tranchant, Éric Neuhoff
17 settembre 2025 - Le Figaro

L'aneddoto è eloquente. Durante la preparazione del film Il laureato, il regista Mike Nichols faceva dei provini per il ruolo di Benjamin Braddock, uno studente ancora vergine. A tutti poneva la domanda: «Che cosa fate quando una ragazza vi dice di no?». Robert Redford, che aveva fatto il provino, rispose: «Non lo so, non mi è mai successo». Alla fine fu Dustin Hoffman a ottenere la parte. Immaginiamo che sull'argomento fosse più loquace. Robert Redford era così fin dall'inizio: non solo un bel fisico, ma una personalità che non si limitava al suo essere biondo.

A Hollywood c'erano molti bei ragazzi, ma uno come lui era unico. A un certo punto, le donne erano davvero in difficoltà: dovevano scegliere tra lui e Paul Newman, Butch Cassidy e Sundance Kid (giochino: chi interpretava chi?). In La stangata, lo smoking gli stava a pennello, ma neanche Newman se la cavava male al tavolo da poker. Gli anni '70 sono stati il suo regno, il suo parco giochi. Chi meglio di lui poteva interpretare un campione di sci in La discesa infernale? Se si fosse candidato alle elezioni presidenziali come in The Candidate, i cittadini si sarebbero precipitati alle urne. Al suo fianco, (John) Kennedy sembrava un uomo qualunque.


Trapper barbuto e coperto di pelli di animali, Jeremiah Johnson avrebbe spinto chiunque ad affondare nella neve delle Montagne Rocciose. Trasudava salute, clorofilla, mescolando naturalezza e raffinatezza. La giacca di tweed e il berretto che indossa ne I tre giorni del Condor rivaleggiavano con la maglia indossata dal giocatore di baseball ne Il migliore. Nelle sue memorie, Faye Dunaway ricorda la difficoltà che aveva nel primo di questi film a fingere di essere spaventata perché Redford l'aveva rapita; alla fine lui finisce per andare a letto con lei e lei non sporgerà denuncia.

In sala, le spettatrici non sognavano altro. Solo lui poteva sfrecciare in sella alla sua Solex per le strade di Manhattan. Il costume bianco di Gatsby gli calzava a pennello. Bisognava vederlo passeggiare nella sua tenuta di West Egg, osservando in lontananza la luce verde che lampeggiava dall'altra parte della baia. La coppia che formava con Meryl Streep in Out of Africa (La mia Africa) rimane impressa nella memoria. La scena in cui lava i capelli alla sua partner è ricca di sensualità e romanticismo. Improvvisamente, tutto il pubblico si rammaricò di non avere una fattoria in Africa.

Sex symbol privo di perversità, seduce senza sforzo. La sua presenza è naturale. La telecamera si innamorava immediatamente di lui. Sullo schermo regna l'ingiustizia. Generazioni successive hanno creduto che il giornalismo si riducesse a indossare cravatte slacciate e camicie Oxford con le maniche arrotolate come Bob Woodward in Tutti gli uomini dell'presidente. Alzare il telefono, una matita tra le labbra, ecco un atteggiamento che gli apprendisti giornalisti si divertivano a imitare. Chiamatelo come volete, fascino, carisma, ma esiste.

«Un sorriso 100% americano»

Chi, oltre a lui, era in grado di masticare una gomma con eleganza? Piaceva alle donne. Gli uomini non lo detestavano. Era un'impresa notevole. Le malelingue sostenevano che fosse piccoletto (leggenda: era alto 1,79 metri). Gli invidiosi assicuravano che avesse la pelle butterata. Tutte sciocchezze. La trama di Proposta indecente non regge. Redford ridottosi a pagare un milione di dollari per passare una notte con Demi Moore, chi ha ideato quella situazione così assurda? Il contrario sarebbe stato più plausibile.

Persino i cavalli non erano insensibili al suo fascino, a patto che lui sussurrasse loro all'orecchio. Gli si perdonavano persino i capelli tinti di arancione in All Is Lost, dove la sua barca affondava nel mezzo dell'Oceano Indiano. Le sue apparizioni in Captain America o Avengers erano deludenti per gli appassionati: «Nobody's perfect». Alla fine, in Nos âmes la nuit (Our Souls at Night, Le nostre anime di notte, di Ritesh Batra, 2017), cadeva tra le braccia di Jane Fonda, con la quale si era già sposato in A piedi nudi nel parco (1967). Ora, il Sundance Kid ha raggiunto il suo vecchio amico Butch Cassidy, che lo avrà accolto confidandogli: «Per un attimo ho pensato che avessimo un problema». 

Un ricordo, l'ultimo. In Nos plus belles années (The Way We Were, Come eravamo), il professore legge ad alta voce il tema scritto da Redford, suo studente in maglione jacquard. Il testo si intitola «Un sorriso 100% americano». Inizia così: «In un certo senso, assomigliava al suo Paese. Tutto gli veniva troppo facile, ma almeno ne era consapevole». Un riassunto perfetto. Quello, sì, era Robert Redford.

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