Bruno Genesio, le coach de Lille qui commence à se faire un nom en Europe
PIERRE Lahalle / PRESSE SPORTS
L’entraîneur lillois, Bruno Genesio (au centre), félicite Jonathan David, buteur contre Feyenoord Rotterdam, après la large victoire de Lille (6-1) contre le club néerlandais, le 29 janvier au stade Pierre Mauroy, à Villeneuve-d’ascq, lors de la huitième journée de Ligue des champions.
Face à Dortmund en Ligue des champions, le technicien du Losc se sait attendu.
4 Mar 2025 - Le Figaro
Baptiste Desprez
La séquence a pu faire sourire mais elle témoigne de la considération pour le travail effectué par Bruno Genesio. Quand Didier Deschamps a annoncé en début d’année son départ de l’équipe de France après la Coupe du monde 2026, Zinédine Zidane est apparu comme une évidence… mais le nom du technicien de 58 ans a aussi filtré en cas de désistement du mythe « ZZ ». Un non-sujet pour le principal intéressé, flatté par la situation, mais surtout respectueux des deux champions du monde 1998. « Ce sont deux monstres du football français et mondial, a soufflé, non sans un rictus, l’entraîneur des Dogues. Pour moi il n’y a pas de discussions.»
Effectivement, il n’y a pas de débat et sauf cataclysme, Zidane sera le prochain patron des Bleus. Mais cette anecdote en dit long sur le changement de notoriété de Bruno Genesio, qui défie Dortmund mardi soir en huitième de finale aller de la Ligue des champions (21 heures, Canal+). Dans l’enfer du « Mur jaune » et des 80000 supporteurs du BVB, son Losc, club français le mieux classé avec sa septième place de la première phase, passe un nouveau test grandeur nature pour tenter d’étirer une aventure nordiste entamée le 6 août dernier face au Fenerbahçe d’un certain José Mourinho au 3e tour des qualifications de la C1.
Ce rendez-vous face au 10e de Bundesliga et finaliste l’an dernier n’a pas de quoi effrayer Genesio et sa bande après le bon parcours initial. Avec respect et confiance, malgré la gifle subie (4-1) au Parc des Princes face au PSG avec des Lillois ménagés, l’ambition est là. Difficile d’en être autrement quand vous avez à votre tableau de chasse le Real (1-0) et l’atlético de Madrid (1-3) de Carlo Ancelotti et Diego Simeone, battus en phase de poule. Deux exploits à mettre au crédit de l’ancien coach de l’olympique Lyonnais (2015-2019), qui font écho à celui réalisé en 2018 contre Pep Guardiola (victoire à Manchester et nul à Lyon en phase de groupe) et lui avaient valu le surnom moqueur de « Pep » à l’époque. Sept ans plus tard, la donne a changé.
Aujourd’hui, si ses amis l’appellent parfois de cette manière pour le chambrer, Bruno Genesio - réputé comme très taquin avec ceux qui l’entourent inspire surtout le respect à travers son parcours d’entraîneur (Villefranchesur-saône, Besançon, Lyon, Beijing Guoan, Rennes, Lille), sa longévité et ses résultats récents avec le Losc. Les railleries ont cessé. L’estime est totale. «Ila fait fermer beaucoup de bouches, avance au Figaro Mathieu Valbuena, qui l’a connu dans le Rhône entre 2015 et 2017. C’est un super coach, proche de ses joueurs, humain, franc du collier mais surtout un très grand tacticien.»
« C’est un fou de jeu »
Cette saison avec les Dogues, en plus de surprendre Ancelotti et Simeone, il a tenu la dragée haute à Motta avec la Juventus (1-1) et longtemps fait jeu égal avec le Liverpool d’arne Slot (2-1). Un CV qu’il partage avec un certain Jürgen Klopp. « Je ne m’en fous pas, c’est valorisant, pose-t-il sans en rajouter, l’humilité en bandoulière. Mais j’ai l’habitude de dire que ce n’est pas moi qui bats ces grands coachs, c’est une équipe, un club et ça montre qu’on travaille bien. »
Fan de Carlo Ancelotti mais aussi d’arrigo Sacchi, Bruno Genesio a su renverser une situation qui l’a vu se faire siffler à ses débuts à Lyon dans le costume d’entraîneur principal par ses propres supporteurs qui auraient préféré voir José Mourinho diriger L’OL pour l’entrée au Groupama Stadium en janvier 2016. Une pétition avait même été signée pour empêcher sa promotion, lui l’enfant du club et l’adjoint de Gérard Houllier, Rémi Garde ou encore Hubert Fournier. « C’est une des grandes forces de Bruno, avance Jean-michel Aulas, son président à l’époque. Il a du caractère, des idées de jeu et ce qui lui arrive aujourd’hui est un juste retour des choses.»
Même sentiment du côté de Maxime Gonalons (2006-2017), enfant du club et jeune retraité. « C’est vraiment une belle personne qui garde des contacts avec ses anciens joueurs, avance l’ancien milieu de terrain. Il est très fort dans sa capacité à concerner tout le monde, à garder un groupe sous pression, même ceux qui ne jouent pas. Sa franchise est pertinente, bien sentie.»
Mais Gonalons met aussi en avant l’essentiel : le terrain. « On l’a taclé sur le surnom “Pep”, mais c’est un fou de jeu. Bruno adore réfléchir sur la tactique. Sa priorité, c’est de bien faire jouer ses groupes, d’avoir le ballon, la possession et d’exploser vite vers l’avant. Toutes ses équipes jouent bien au football.» Aujourd’hui, certains supporteurs de L’OL le regrettent quand ils le voient prendre la lumière en Ligue des champions depuis le début de la saison. La versatilité du football. Trop tard.
Après une vie passée dans le monde du football, en tant que joueur et entraîneur, avec un passage en Chine après son départ de Lyon, il ne lui manque qu’une chose : des titres. « Cela bonifierait tout son travail que ce soit à Lille ou dans un grand club étranger, atteste Gonalons. Il a trop longtemps été sous-coté mais celui lui a donné de la force. » Mathieu Valbuena, qui l’a récemment croisé sur son lieu de vacances, voit plus loin. « Son image a changé car au début, il était sous-coté. Le temps montre que c’est un excellent entraîneur, qui n’a rien à envier à certains qu’on monte en épingle. Son humilité et sa passion parlent pour lui. » En cas de qualification contre Dortmund, Bruno Genesio serait le premier entraîneur à hisser le LOSC en quart de finale de Ligue des champions.
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