POGACAR COPPI CONFORME
Tadej Pogacar a écrasé le Tour de Lombardie comme il a écrasé toute la saison. Un 25e succès pour couronner une domination folle, pas vue depuis un demi-siècle.
13 Oct 2024 - L'Équipe
ALEXANDRE ROOS
En remportant pour la quatrième fois de rang le Tour de Lombardie, Tadej Pogacar rejoint Fausto Coppi au palmarès. Avec cette vingt-cinquième victoire, le Slovène boucle une saison monumentale. CÔME (ITA) – La seule surprise fut finalement de découvrir, au moment où il s’est extrait du cocon du car de son équipe hier matin et qu’une clameur grimpait dans le ciel de Bergame, de celles qui escortent les stars, que Tadej Pogacar avait cette fois opté pour un cuissard blanc pour accompagner son maillot arc-en-ciel. Un dérapage esthétique à nos yeux, amorti par une météo bien plus clémente que ce que l’on pouvait craindre en milieu de semaine et qui lui permit de scintiller, immaculé, au moment de passer la ligne d’arrivée à Côme. Pour le reste, comme pressenti, rien n’a échappé au contrôle du champion du monde.
Une échappée de courageux a bien tenté de prendre les devants assez tôt, car c’était le seul espoir de faire bosser les UAE de bonne heure. Elle compta une vingtaine d’unités, avec des durs à cuire – Matej Mohoric, Dani Martinez, Thymen Arensman, Tiesj Benoot, Antonio Tiberi, Rudy Molard… –, mais jamais assez d’avance, à peine une minute au pied de Sormano, autant dire rien. Remco Evenepoel a tenu son rang, mais quand Pogacar est là, sa place est celle de 2e. Le Belge n’a même pas essayé de s’agripper à la roue du Slovène quand il a attaqué, il sait que c’est vain, qu’il n’y a rien à y gagner si ce n’est de se faire exploser le caisson ( voir page 11).
Il restait 48,5 km jusqu’à l’arrivée et un peu plus de 6 bornes jusqu’au sommet de la montée de Sormano quand il s’envola et en quelques tours de manivelles, il creusa un océan avec ses adversaires. Il appuya encore plus dans la partie de transition, plutôt plate, entre Sormano et San Fermo della Battaglia, où il brisa à distance Evenepoel, parti seul dans la descente, qui, lui, brisa en retour ses poursuivants, Enric Mas, Lennert Van Eetvelt et Pavel Sivakov notamment. Plus de trois minutes sur la ligne sur le double champion olympique, entre 4’30” et 5’sur le reste du top 10, un gouffre qu’on n’avait pas vu en Lombardie depuis la victoire d’Eddy Merckx en 1971.
Des succès aussi nombreux qu’impressionnants
Un quatrième sacre de rang dans la Classique des Feuilles Mortes qui nous ramène à Fausto Coppi et à la fin des années 1940 (1946 à 1949, ainsi que 1954). À l’image de l’ensemble de sa saison, exceptionnelle, folle, avec laquelle on ne peut trouver des comparaisons, quand il y en a, qu’en piochant a minima un demi-siècle en arrière ( voir pages 10-11).
Il y a deux dimensions extraordinaires dans l’année du Slovène. D’abord, le nombre de ses succès, sur lequel il faut bien s’arrêter un instant. Vingt-cinq victoires, du jamais vu pour un non-sprinteur depuis vingt saisons et l’instauration du World Tour, une période où le calendrier est resté plus ou moins le même. En seulement cinquante-sept jours de course, ce qui raconte une suprématie, un absolutisme. Le doublé Giro-Tour de France assorti de douze étapes, deux Monuments, la Lombardie et Liège-Bastogne-Liège, les Strade Bianche, le Championnat du monde, une liste à donner envie à ses collègues du peloton de raccrocher les vélos. Ensuite, les écarts, immenses, avec le reste du monde. Des Strade Bianche début mars, premier jour de course et premier succès, à la Lombardie hier, il a concassé son opposition, il s’est appliqué à démontrer sa supériorité, sa différence avec les autres, le monde qui les sépare de lui. Lancé dans une course qu’il mène seul, pour l’histoire, pour être le meilleur.
Autour de lui, c’est désormais le désert. On ne lui connaissait que deux véritables adversaires, Mathieu Van der Poel sur les classiques, Jonas Vingegaard dans le Tour de France, les seuls qui ont été en mesure de lui briser les reins, mais nous ne sommes plus sûrs que ce soit encore le cas, même si l’on a hâte de voir comment le Danois va se reconstruire dans l’optique de juillet. Dans la trajectoire globale de sa carrière, cette année a été un immense bond en avant pour Pogacar, un énorme palier et il est difficile de savoir ce qu’on peut mettre sur le compte de ses progrès, de sa maturation physique ou, par exemple, de son changement d’entraîneur l’hiver dernier.
Une mainmise qui peut lasser, voire instiller le doute
De même qu’il est compliqué de deviner quelle direction va prendre la courbe de ses performances, à 26 ans, au coeur de ses plus belles années, s’il va stagner, encore s’améliorer, ce qui serait effrayant, ou commencer à ployer sous le poids des six saisons écoulées et des efforts imposés à son corps. Dans tous les cas, à l’heure actuelle, personne ne peut jouer avec lui à ce niveau. Ce qui a forcément également des revers.
Le suspense s’est étiolé au fil de ses épopées, de ses raids dingues, ses exploits se sont banalisés et si on a vu sa popularité grossir, s’il a assis son statut de patron et d’étoile de son sport, on a aussi senti poindre chez certains de la lassitude. C’est le propre des règnes des despotes, mais aussi l’écume du quotidien, qui s’efface avec le temps. On se souvient encore des morceaux d’anthologie de la carrière de Merckx, pas du sentiment d’exaspération ou de découragement que sa gloutonnerie a pu provoquer.
La suspicion, en revanche, est plus tenace, dans un sport qui n’aime plus les dominations, qu’on regarde de travers. Comme pour les champions avant lui, il y a pour Pogacar ce que l’on peut rationaliser et ce que l’on n’est pas en mesure d’expliquer, ce qui est le propre de l’extraordinaire. Dans cette zone grise se nichent le doute, sain, naturel, indispensable, mais aussi les croyances, qui appartiennent à chacun. Au nom du passé, de ses errements, le champion du monde sait qu’il aura à répondre aux doutes de tous. C’est son fardeau, de même que sa responsabilité. Le prix à payer quand on aspire à être le plus grand.
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POGACAR COPPI-CONFORME
L'APOTEOSI
Tadej Pogacar ha schiacciato il Giro di Lombardia come aveva fatto per tutta la stagione. La sua 25ª vittoria ha coronato un dominio folle che non si vedeva da mezzo secolo.
Vincendo il Giro di Lombardia per la quarta volta consecutiva, Tadej Pogacar raggiunge Fausto Coppi sul podio. Con questa venticinquesima vittoria, lo sloveno completa una stagione monumentale.
13 ottobre 2024 - L'Équipe
ALEXANDRE ROOS
CÔME (ITA) - Alla fine, l'unica sorpresa è stata scoprire, mentre usciva dal bozzolo del suo pullman di squadra ieri mattina e un clamore si levava nel cielo di Bergamo, quello che scorta le stelle, che questa volta Tadej Pogacar aveva optato per dei pantaloncini bianchi da abbinare alla sua maglia iridata. Uno scivolone estetico, a nostro avviso, ammortizzato da un clima molto più mite di quello che si poteva temere a metà settimana, che gli ha permesso di brillare immacolato mentre tagliava il traguardo di Como. Per il resto, come previsto, nulla è sfuggito al controllo del campione del mondo.
Una coraggiosa fuga ha tentato di andare in avanscoperta fin dalle prime battute, essendo l'unica speranza di far lavorare presto l'UAE. La fuga contava una ventina di corridori, tra i quali alcuni corridori forti - Matej Mohoric, Dani Martinez, Thymen Arensman, Tiesj Benoot, Antonio Tiberi, Rudy Molard... - ma non ha mai avuto un vantaggio sufficiente, appena un minuto ai piedi di Sormano, che è come niente. Remco Evenepoel ha tenuto duro, ma quando c'è Pogacar, il suo posto è quello di 2°. Il belga non ha nemmeno cercato di aggrapparsi alla ruota dello sloveno quando ha attaccato, sa che è inutile, che non c'è nulla da guadagnare se non farsi saltare le cervella (vedi pagina 11).
A 48,5 km dall'arrivo e a poco più di 6 km (ai -6,5 km, ndr) dalla cima della salita di Sormano, ha preso il largo e in pochi giri di pedivelle ha aperto un varco sugli avversari. Ha spinto ancora di più nel tratto di transizione piuttosto pianeggiante tra Sormano e San Fermo della Battaglia, dove ha staccato Evenepoel, che era andato da solo in discesa, il quale a sua volta ha staccato gli inseguitori, tra cui Enric Mas, Lennert Van Eetvelt e Pavel Sivakov. Più di tre minuti sul traguardo sul doppio campione olimpico, tra i 4'30” e i 5' sul resto della top 10, un abisso che non si vedeva in Lombardia dalla vittoria di Eddy Merckx nel 1971.
Numerosi e impressionanti successi
Il quarto titolo consecutivo nella Classica delle foglie morte ci riporta a Fausto Coppi e alla fine degli anni Quaranta (dal 1946 al 1949, oltre al 1954). La sua stagione nel complesso è stata eccezionale, folle, e i paragoni, se ci sono, possono essere fatti solo guardando indietro di almeno mezzo secolo (vedi pagine 10-11).
L'anno dello sloveno ha due dimensioni straordinarie. In primo luogo, il numero di successi ottenuti, di cui bisogna tenere conto per un momento. Venticinque vittorie, mai raggiunte da un non corridore per venti stagioni e l'introduzione del World Tour, un periodo in cui il calendario è rimasto più o meno lo stesso. In soli cinquantasette giorni di corsa, che raccontano di una supremazia, di un assolutismo. La doppietta Giro-Tour de France con dodici tappe, due Monumenti, il Lombardia e la Liegi-Bastogne-Liegi, le Strade Bianche, il Campionato del Mondo: un elenco che farebbe venire voglia ai suoi colleghi di gruppo di appendere la bicicletta al chiodo. Poi ci sono gli enormi divari con il resto del mondo. Dalle Strade Bianche di inizio marzo (il 2 marzo, ndr), il primo giorno di gara e il suo primo successo, al Lombardia di ieri, ha schiacciato gli avversari, ha lavorato duramente per dimostrare la sua superiorità, la sua differenza dagli altri, il mondo che li separa da lui. È in gara da solo, per fare la storia, per essere il migliore.
Intorno a lui c'è il deserto. Conosciamo solo due veri avversari, Mathieu van der Poel nelle classiche e Jonas Vingegaard al Tour de France, gli unici in grado di spezzargli la schiena, ma non siamo più sicuri che sia così, anche se non vediamo l'ora di vedere come il danese si ricostruirà in vista di luglio. Nella traiettoria complessiva della sua carriera, quest'anno per Pogacar è stato un enorme balzo in avanti, un enorme plateau, ed è difficile capire cosa attribuire ai suoi progressi, alla sua maturazione fisica o, ad esempio, al cambio di allenatore avvenuto lo scorso inverno.
Una presa che può essere faticosa, e anche instillare dubbi
Così come è difficile prevedere la direzione che prenderà la sua curva di rendimento a 26 anni, nel cuore dei suoi anni migliori, se ristagnerà, se migliorerà ancora, il che sarebbe spaventoso, o se inizierà a cedere sotto il peso delle ultime sei stagioni e delle richieste poste al suo corpo. In ogni caso, al momento nessuno può giocare con lui a questo livello. Il che, inevitabilmente, ha anche i suoi svantaggi.
Man mano che la suspense delle sue epopee e delle sue folli scorribande diminuiva, le sue imprese diventavano comuni e, mentre la sua popolarità cresceva ed egli si affermava come capo e stella del suo sport, alcuni cominciavano a sentire la stanchezza. È il segno distintivo dei regni dei despoti, ma è anche la feccia della vita quotidiana, che svanisce con il tempo. Ricordiamo ancora l'antologia della carriera di Merckx, non il senso di esasperazione o di scoraggiamento che la sua ingordigia può aver provocato.
Il sospetto, invece, è più tenace, in uno sport che non ama più il dominio, che viene guardato di traverso. Come per i campioni che lo hanno preceduto, anche per Pogacar c'è ciò che si può razionalizzare e ciò che non si può spiegare, che è la caratteristica dello straordinario. In questa zona grigia si trova il dubbio, che è sano, naturale ed essenziale, ma anche le convinzioni, che appartengono a tutti. In nome del passato, dei suoi errori, il campione del mondo sa che dovrà rispondere ai dubbi di tutti. Questo è il suo fardello e la sua responsabilità. Il prezzo da pagare per aspirare a essere il più grande.
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