Une saison en enfer
Entre maladies et chutes, les Visma-Lease a bike ont vécu une année 2024 noire, et particulièrement leurs leaders, Wout Van Aert et Jonas Vingegaard. Les Néerlandais ont essayé d’en tirer des leçons, mais la malchance demeure, à quelques jours du week-end
"Quand je passe un an sans gagner,
ce qui n’est pas arrivé souvent dans ma carrière,
on se demande si on va lever les bras à nouveau"
- RABOBANK FUTUR SPONSOR DE VISMA-LEASE A BIKE
27 Feb 2025 - L'Équipe
PIERRE MENJOT
Ça y est, les premiers pavés s’offrent au peloton au milieu des odeurs de frites, la saison commence pour de vrai avec le weekend d’ouverture belge, le Nieuwsblad samedi, Kuurne-Bruxelles-Kuurne dimanche, et tous les rêves sont permis. Les Visma-Lease a bike en avaient de grands il y a un an et tout était parti sur de très bonnes bases avec deux victoires royales, Jan Tratnik (désormais chez Red Bull-Bora) sur la première course, Wout Van Aert sur la seconde, puis le doublé Paris-Nice - Tirreno Adriatico (jamais réalisé) avec Matteo Jorgenson et Jonas Vingegaard, mi-mars.
Mais tout a fichu le camp dans des proportions inimaginables pour la meilleure équipe du monde, faisant de 2024 « une saison folle », d’après le Danois. « Pour l’équipe, je ne pense pas que c’était une mauvaise année », conteste Jorgenson, arrivé l’hiver dernier, l’un des rares à éviter les blessures, en plus de réussir de grands résultats (vainqueur d’À Travers la Flandre et 2e du Dauphiné, outre sa victoire sur la Course au soleil). « Si vous comparez à 2023 (où l’équipe néerlandaise a remporté les trois Grands Tours), c’est évidemment presque impossible à reproduire, poursuit l’Américain. Mais 2e au nombre de victoires (en réalité 4e, avec 32), 2e au classement UCI, 2e du Tour, cen’est pas si mal. »
Tous les frelons sont tombés comme des mouches
Le souci, concède le directeur sportif Grischa Niermann, « c’est que quand les soucis touchent vos coureurs majeurs, cela crée d’énormes problèmes pour l’équipe ». Pour Wout Van Aert, tout a basculé le 27 mars quand il a été pris dans une chute lors d’À Travers la Flandre (fractures à la clavicule droite, aux côtes, contusion à un poumon), à quelques jours de ses objectifs majeurs, le Tour des Flandres et ParisRoubaix. Une semaine plus tard, Vingegaard chutait lour dement lors du Tour du Pays basque – « J’ai cru mourir », avouat-il ensuite – et ne savait même pas s’il pourrait remonter à vélo, alors qu’il était alité huit jours à l’hôpital de Vitoria (fractures à une clavicule et aux côtes, contusion pulmonaire et pneumothorax).
Maisau-delàdesdeuxstars,cesonttous les frelons qui tombaient comme des mouches. Une clavicule de Wilco Kelderman à Paris-Nice, les problèmes de dos de Cian Uijtdebroeks toute l’année, le triple forfait pour le Tour de Dylan Van Baarle, Steven Kruijswijk (chutes) et Sepp Kuss (malade) à quelques jours du départ de Florence, un demi-effectif au Giro après dix jours, la grippe intestinale de Christophe Laporte en mars : la liste fait peur, bien que loin d’être exhaustive. Et elle pèsera au quotidien.
« La motivation, le moral pouvaient être bas, confie Johannes Staune-Mittet, passé chez Decathlon-AG2R cet hiver et notamment présent lors de la grave chute de son leader danois. Des gars comme moi, on n’était pas là pour nos propres objectifs mais pour aider Jonas à gagner des courses. Une fois qu’il n’est plus là, il faut changer de mentalité, essayer d’exister, mais ce n’est pas si simple de switcher de mentalité et de se mettre à courir pour autre chose. »
CHRISTOPHE LAPORTE Pas épargné et vidé mentalement en fin
La chute de Wout Van Aert (en jaune, en bas à droite de la photo du haut) lors d’À Travers la Flandre, et celle de Jonas Vingegaard au Tour du Pays basque. d’année, Laporte avoue « des moments de doute, oui. Quand je loupe plein de courses qui me tenaient à coeur, quand je passe un an sans gagner, ce qui n’est pas arrivé souvent dans ma carrière, on se demande si on va lever les bras à nouveau. Donc j’avais hâte de fermer le livre sur cette saison 2024. »
Au bout du bout, le Varois aperçut une éclaircie, avec la victoire dans la boue de Paris-Tours, en octobre. Van Aert aussi revit le jour, finalement aligné au départ du Tour et en larmes après la 1re étape à Rimini, où sa 3e place lui rappelle d’où il vient. Il glane une médaille olympique (3e du chrono à Paris), brille à la Vuelta (3 victoires d’étape) mais chute à nouveau en troisième semaine. « Cette fois, ç’a été plus dur que les précédentes pour se remotiver, souffle le Belge, car cette blessure a été plus grave que ce qu’on pensait.
Pour Vingegaard, cela tient du « miracle » d’être au départ de la Grande Boucle, comme de tenir tête à Pogacar pendant un peumoinsdedeuxsemaines,etdeluiarracher une étape, au Lioran (11e étape). « Je fais ça depuis vingt ans et je n’avais jamais vu un athlète progresser si vite, raconte son entraîneur Tim Heemskerk. Il y a une part de génétique, je ne peux pas l’ex primer d’une autre manière. » Pour le double vainqueur du Tour (2022-2023), la longue période off, du fait de la naissance de son fils en septembre, fut mise à profit pour se renforcer et retrouver le muscle perdu en avril et qui lui est indispensable pour concurrencer l’explosif Pogacar. Pour Van Aert, l’hiver fut quasiment un copier-coller de l’année précédente, puisque l’ancien maillot vert du Tour sesentaiten grande forme à l’approche des classiques. Cela implique donc un programme léger en cyclo-cross en décembre-janvier, et s’il a été autorisé à s’aligner aux Mondiaux de Liévin, le 2 février (2e derrière Van der Poel), cela ne l’a pas exempté d’une séance à 6 heures et 168 kilomètres dès le lendemain.
Le chat noir est toujours là
De toutes ces galères, le staff de Visma a essayé de tirer des leçons. « Dans nos évaluations, on a fait en sorte de ne pas placer les chutes, les blessures, les maladies du côté de la malchance, explique Niermann. Il faut aussi examiner au sein de l’équipe, dans la manière de faire, voir où on peut s’améliorer, ce qu’on peut faire. Ce sont de petites choses qui, on l’espère, auront de bons résultats. » Laporte: « On a fait un débrief, oui. C’est dur de dire que c’est à cause de ceci ou de cela, on en discute. Mais on n’a pas vraiment tiré d’enseignement (rires). »
Ni chassé le chat noir. En 2025, Dylan Van Baarle a laissé une clavicule en Australie dès son premier jour de course, Laporte est forfait pour le week-end d’ouverture après avoir été longtemps malade, tandis que l’équipe a vécu « une semaine de malchance », soufflait le directeur sportif Jesper Morkov, à l’UAE Tour, terminé avec deux coureurs sur sept, du fait des chutes et des maladies. Mais depuis un an, Visma le sait: la vérité de février n’est pas celle de la saison.
RABOBANK FUTUR SPOSNOR DE VISMA-LEASE A BIKE
La Rabobank va soutenir Visma-Lease a bike et apparaîtra sur le maillot de l'équipe néerlandaise à partir du Tour de France (5-27 juillet). Un retour au premier plan pour la banque néerlandaise, qui s'était progressivement retirée du peloton cycliste à partir de 2012.
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