Pavé de bonnes intentions


Deuxième hier de la course d’ouverture des classiques, Paul Magnier, qui a devancé au sprint Jasper Philipsen, semble destiné à s’imposer sur les flandriennes un jour.

"Il y a une petite déception. 
Mais on est heureux car on ne devrait 
rien attendre d’un gars de 20 ans"
- JURGEN FORÉ, PATRON DE SOUDAL QUICK STEP

"Une course comme Paris-Roubaix, dans quelques années, doit lui convenir. 
Il a vraiment le gabarit pour être le nouveau Tom Boonen"
   - YVES LAMPAERT, SON COÉQUIPIER CHEZ SOUDAL-QUICK STEP

2 Mar 2025 - L'Équipe
DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL YOHANN HAUTBOIS

NINOVE (BEL) – Pour un novice, le départ du Nieuwsblad, dans le brouhaha d’un hangar désuet du parc de la Citadelle de Gand, ressemble à une foire aux bestiaux qui prendraient la direction du Kuipke, vélodrome mythique des Six-Jours, surchauffé par les jeux de lumière et la musique techno. Même beau bazar, un peu plus tard, dans le secteur pavé d’Haaghoek, à un écho du Leberg, où les fans trimballaient des sonos lourdes comme leurs glacières remplies d’Omer selon une démarche cahin-caha que le seul revêtement irrégulier ne pouvait expliquer.À son aise sur les pavés du mur de Grammont, Paul Magnier a fait hier une entrée remarquée dans le monde des Flahutes.

Pour certains, la journée serait longue et probablement se terminerait-elle sur le canapé. Paul Magnier l’a conclue à la deuxième place au terme d’un bizutage dans cet univers de démence collective avec des gamins de 10 ans, à peine, qui redressent fièrement au-dessus du front la visière de leur casquette Molteni alors qu’ils serrent leur carnet contre la poitrine, le crayon dans l’autre main, dans l’attente excitée de pouvoir accrocher le regard de Wout Van Aert ou Arnaud De Lie. Ce monde n’est donc pas totalement foutu, encore moins si le jeune coureur de Soudal Quick Step, dauphin de Soren Waerenskjold, confirme tous les espoirs que son talent dessine.

Sa formation belge ne s’y est pas trompée et elle n’a pas attendu qu’il ait l’âge d’un cador pour miser sur lui. Hier, sur les pavés des Ardennes flamandes, le Français de 20 ans a été adoubé par Jurgen Foré, nouveau grand patron du Wolfpack depuis la mise en retrait de Patrick Lefévère, en début d’année : « On doit encore être patient, on ne doit pas lui mettre la pression mais il adore être le leader. C’est un gamin fantastique, on peut espérer un beau futur avec lui.» S’il avait sauté le Norvégien d’Uno-X Mobility sur la ligne, on parlerait d’un présent radieux après des débuts déjà réussis l’an passé (5 victoires), qu’il a confirmés lors de l’Étoile de Bessèges, début février. Mais il s’est incliné, et quand il ne gagne pas, il garde ce geste de dépit et de rage sur son cintre qu’on avait entraperçu à Plouay l’an passé (battu par Marc Hirschi) puisqu’il ne se résout pas à la défaite. «Il y a une petite déception, admet Foré. Mais on est heureux car on ne devrait rien attendre d’un gars de 20 ans. Ce qu’il réalise est fantastique.»

Fantastique d’avoir, avec son équipe autour de lui, résisté à la tentative de bordure de l’équipe UAE à 92 kilomètres de l’arrivée, d’avoir grimpé l’Eikenberg totalement pavé (et où Jordi Meeus a sauté), d’avoir tenu le tempo des Visma-Lease a bike puis d’avoir survécu aux attaques d’Antonio Morgado (deux fois), de Joshua Tarling. Bien calé, au chaud dans la roue de ses équipiers, il n’a pas serré le moteur quand AlpecinDeceuninck, pour le compte de Jasper Philipsen, a provoqué la cassure dans le Molenberg, il a avalé le Grammont puis le Bosberg comme il a pu, en serrant les dents : « On avait mis des personnes d’expérience autour de lui, explique le directeur sportif Wilfried Peeters. C’est important pour une équipe, pour des équipiers, de savoir qu’ils roulent pour un leader. »

Une fois la déception immédiate digérée, le coureur – né au Texas parce que ses parents y ont travaillé jusqu’à ses 4 ans – pouvait savourer ce résultat sur une course qu’aucun Français n’a jamais remportée ! « J’ai vu que Soren m’a passé sur la droite, je me suis souvenu qu’il m’avait battu à Bessèges, j’ai pensé que c’était une bonne roue à prendre, rembobinait-il. Ensuite, je ne me rappelle plus, je sens Jasper Philipsen qui passe à gauche, je me dis que c’est le moment de lancer… J’étais mort, comme tout le monde, mais avec cette deuxième place, je suis content de bien lancer la saison des classiques. »

Si, chez les jeunes, il grimpait plutôt bien, il a opéré depuis un virage, pris du poids cet hiver, pour se destiner aux Flandriennes. Selon son coéquipier Yves Lampaert, « une course comme Paris-Roubaix, dans quelques années, doit lui convenir. Il a vraiment le gabarit pour être le nouveau Tom Boonen, mais il faut aussi de la chance et les jambes au bon moment.» Pour le reste, le Belge ne s’inquiète pas de la mentalité de ce « très bon garçon, sympa. Il écoute mais il sait déjà bien ce qu’il veut».

De loin, Julian Alaphilippe a dû apprécier la performance de son ancien protégé et ses propos d’après-courses (« je n’ai pas eu le temps de regarder mes watts, le plus important, c’est le résultat à l’arrivée ») alors que le double champion du monde passé chez Tudor regrettait, en janvier, cette génération avec le regard vissé sur les compteurs. La spontanéité de Paul Magnier, son envie de jouer sur le vélo raconte une autre histoire, assez fidèle à ce sport et à son pays d’adoption, « fan de vélo, a-t-il remarqué à Ninove. Il y avait beaucoup d’ambiance, avec des encouragements, j’ai entendu plusieurs fois mon nom, ça motive. Ce sont des courses que j’aime bien, qui me correspondent.» Elles ne vont pas lui résister longtemps.

***

Waerenskjold, l’inattendu

Cette fois, Soren Waerenskjold a pensé à lui, pas à sa petite amie qui s’étonnait qu’il ne gagne pas plus souvent au sprint et à laquelle il avait dédié sa victoire lors de la deuxième étape de l’Étoile de Bessèges. Il y a un mois, le Norvégien faisait le constat qu’il était capable de s’imposer aussi en réglant un peloton, et il a récidivé, hier, en remportant un succès de prestige auquel il n’était pas du tout destiné. Appelé de dernière minute par sa formation Uno-X Mobility parce que du vent de face était annoncé et pouvait favoriser une arrivée groupée, il visait plutôt la course d’aujourd’hui, Kuurne-Bruxelles-Kuurne : « Je me pince pour le croire, c’est irréel, car cette course se termine rarement au sprint. » Qu’il a gagné donc devant Paul Magnier (à dr., bouche ouverte) et, une référence de la discipline, le Belge Jasper Philipsen (au centre) : « C’est la plus grande victoire de ma carrière », confiait le grand coureur (1,95 m) de 24 ans.

***

TROIS ÉQUIPES FRANÇAISES SUR LE PODIUM

La Belge Lotte Claes (Arkéa-B & B Hotels), échappée dès le kilomètre 0, a maintenu sa position en tête du Nieuwsbald avant de lever les bras, au sprint devant la Polonaise Aurela Nerlo (Winspace Orange). À 31 ans, elle signe sa première victoire de renom, devant Nerlo et Demi Vollering (FDJ-Suez), seulement troisième à 3’25 de Claes. La Néerlandaise a devancé sa compatriote Puck Pieterse (Fenix Deceuninck) au sprint. Et trois équipes francaises sont ainsi montées sur le podium.

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