LA VRAIE PRISE DE POUVOIR


TADEJ POGACAR a repris le maillot jaune abandonné la veille en portant cette fois une attaque décisive dans le Galibier, qui relègue JONAS VINGEGAARD à cinquante secondes au classement général.

3 Jul 2024 - L'Équipe
ALEXANDRE ROOS

VALLOIRE (SAVOIE) – Tadej Pogacar s’est réconcilié avec le Galibier, ses mâchoires de pierre féroces, leurs languettes de neige comme des filets de bave, où il avait été concassé il y a deux ans par l’entremise des Jumbo de Jonas Vingegaard, qui l’avait ensuite achevé dans le Granon. Le versant n’était pas le même hier, mais peu importe, cette fois, il était seul au monde tout là-haut, et c’est Vingegaard qui a subi ses coups. Le Danois s’est fait très mal pour récupérer la roue de son rival au moment de son attaque à 800 mètres du sommet, mais la seconde lame, 400 mètres plus loin, l’a transpercé.

Vingegaard n’a pas explosé, mais il ne pouvait plus rester au contact, en apnée, alors que Pogacar continuait de marteler, de fendre l’air de ses coups d’épaule, remuant, frénétique comme les petits chiens qu’on pose sur les plages arrière des voitures, pour des raisons mystérieuses qu’on ne veut d’ailleurs pas connaître. L’orgueil est un ressort puissant chez le Slovène. Il aime revenir sur les scènes de ses défaites pour y laver l’affront, comme il a pu le faire au Tour des Flandres, comme il s’y est employé hier sur les pentes du géant des Alpes. C’est une dimension essentielle de sa quête dans ce Tour de France. Victorieux hier lors de cette 4e étape, il veut bien sûr remporter un troisième sacre, après 2020 et 2021, mais il a aussi une revanche plus personnelle à prendre sur Vingegaard, à qui il voudra rendre la monnaie de sa pièce pour les deux dernières éditions, à qui il voudra briser les reins.

Visma-Lease a bike aux abois

La petite musique qui l’a accompagné en Italie pour l’ouverture l’a forcément piqué. Il n’avait pas réussi à décramponner son adversaire dans le raidard de San Luca, dimanche à Bologne, son équipe ne serait pas si forte que ce à quoi on s’attendait, il y aurait déjà lieu de s’inquiéter… Pour l’entrée du Tour en France, hier, et la première étape de montagne de cette édition, Pogacar a sorti la batte de baseball pour régler ses comptes et prendre un premier avantage solide. De cette accélération maousse dans le dernier kilomètre du Galibier, où il a effacé tous les chronos du passé, malgré le vent de face qui soufflait dans le Lautaret. De cette descente à tombeau ouvert, où Vingegaard a réussi un temps à maintenir l’écart autour d’une dizaine de secondes, avant de plier les ailes dans la deuxième partie, après Plan-Lachat.

À l’arrivée, le Danois laissa 50 secondes – 37 sur la ligne et 13 de bonifications –, l’écart, désormais, au général. Le leader de Visma-Lease a bike reçut un deuxième coup sur la tête quand il vit revenir sur ses talons, à 4 km du terme, un groupe composé de Carlos Rodriguez, Primoz Roglic, Remco Evenepoel, Juan Ayuso, qui avaient tous été soufflés dans les réacteurs de l’attaque de Pogacar mais ne s’étaient pas désunis dans la descente. Une aide pour la poursuite, mais une mauvaise nouvelle pour les bonifications, et d’ailleurs Vingegaard était tellement sec à Valloire qu’il prit une cassure de deux secondes dans le sprint. Evenepoel gratta la deuxième place de l’étape et du général par la même occasion, la concrétisation d’un début de Tour aux petits oignons, où le Belge s’est montré fringant et un peu plus à l’aise que Roglic.

Au-delà des classements, Vingegaard peut également avoir des motifs d’inquiétude pour son équipe, démantelée hier pour ce premier volet en montagne, avec Matteo Jorgenson, dernier soutien, qui passa par la fenêtre à plus de 4 bornes du sommet du Galibier. En contraste, les UAE ont roulé sur tout le monde, depuis le relais de pachyderme de Nils Politt jusqu’à l’envoi des brigades légères dans le Galibier, et chacun a pu constater à quel point cela piquait quand tout l’orchestre se mettait à jouer ensemble.

Une première semaine déjà déterminante dans le duel Pogacar-Vingegaard

À commencer par Richard Carapaz, qui a calé après le sommet du Lautaret, là où la pente s’accentue, et ainsi laissé son maillot jaune à Pogacar. Pour chipoter, on notera qu’il a fallu taper sur les doigts de Juan Ayuso, qui a cru qu’il pouvait sauter son quart dans le Galibier, ce pour quoi Joao Almeida lui a immédiatement tiré les oreilles. Le jeune effronté espagnol a pris la 3e place à Valloire et occupe désormais la 4e du général, une carte supplémentaire que la formation émirienne pourra abattre.

On se demandera aussi quel fut l’intérêt, du point de vue de Pogacar, de lâcher le maillot jaune lundi soir, pour roulerhiercommes’ill’avaitencoreetle récupérer, au détriment d’une échappée à fort potentiel – Mathieu Van der Poel, Stephen Williams, Oier Lazkano, Bruno Armirail, Valentin Madouas, David Gaudu, notamment –, si ce n’est pour déstabiliser ses adversaires, qui n’avaient pas besoin de ça pour trembler. Après les brumes du triptyque italien, l’impression hier soir était d’être revenu à la case départ à Florence.

Avec un Pogacar favori, à la tête d’une armada injouable et qui a bien l’intention de mettre rapidement la tête sous l’eau de Vingegaard, pour ne pas lui laisser l’opportunité de monter en puissance sur les trois semaines, et cette première semaine, avec le contre-la-montre vendredi et les chemins blancs autour de Troyes dimanche, est un terrain propice pour cela. On se gardera bien d’en tirer des conclusions définitives. L’an passé déjà, le duel avait connu des changements d’avantage les premiers jours, qui n’étaient qu’une illusion. Mais dans le ballottement des faveurs, dans les balbutiements de ce Tour, Pogacar a repris les commandes d’une main de fer.

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