À jamais dans les coeurs
Lille a réussi l’exploit de se qualifier pour les huitièmes de finale de la Ligue des champions en se jouant d’un calendrier terrible. Son match contre Feyenoord, hier, a été l’apothéose de son parcours de géant.
Les joueurs du LOSC, larges vainqueurs de Feyenoord (6-1) et qualifiés pour les huitièmes, exultant devant leur public hier.
30 Jan 2025 - L'Équipe
HERVÉ PENOT
VILLENEUVE-D’ASCQ (NORD) – Magique. Héroïque. Renversant. Le stade Pierre-Mauroy n’oubliera pas cette soirée magnifique d’un hiver finissant, ce match majestueux, cette victoire face à Feyenoord (6-1) et ce classement (7e) comme dans un rêve. Après le sixième but de Rémy Cabella (80e), le vieux grognard au passeport tamponné de tant de voyages, les murs ont tremblé, les chants ont redoublé dans une ambiance rarement aperçue ici. Et comment calculer les décibels entendus quand le speaker a annoncé la place définitive des joueurs, eux qui attendaient sur la pelouse, impatients, de connaître enfin leur sort ?
La communion qui a suivi restera à jamais tatouée dans les coeurs comme ces danses, ces refrains entonnés avec les tribunes. La nuit allait certainement être courte pour certains et le réveil ce matin légèrement embrumé. Mais qui en voudra à ce peuple du Nord de profiter d’une nuit incandescente pour fêter ses héros ?
Une qualité collective inattendue
Non, vous ne rêvez pas, Lille devance, dans cette nouvelle formule si excitante de la Ligue des champions, Dortmund, le Bayern Munich, le Real Madrid, l’AC Milan, le Paris-SG ou Manchester City. Et on en oublie un paquet. Oui, le LOSC a décroché dans ce Championnat des géants ce ticket direct vers les huitièmes, ce qui lui épargnera deux matches de barrages et remplira les caisses du club avec une manne à venir de près de 70 millions d’euros, suivant les calculs internes. Olivier Létang aura du mal à ne pas doubler les primes…
Au tirage au sort, on souhaitait – Atalanta Bergame (9e) – ou Dortmund (10e) – ou Sporting (23e) – ou Club Bruges (24e) p o u r t a n t u n e s a c ré e d o s e de chance à ces Dogues tombés dans un groupe de caïds au sang froid. Et la défaite initiale face au Sporting CP (2-0, le 17 septembre), alors quasi imprenable, ne venait qu’ajouter des nuages sur des nuages. On imaginait même le pire au vu de la concurrence.
Mais voilà, cet effectif, amputé au fil du temps de joueurs majeurs, avait en lui une force surnaturelle, une qualité collective inattendue. Et un entraîneur, Bruno Genesio, qui a géré les contretemps avec la justesse d’un champion de fléchettes : il a chaque fois visé juste. Ses choix, ses idées, ses déplacements de position ont renversé des montagnes.
Comment imaginer ces Dogues baffer le Real (1-0), à la maison, l’Atlético de Madrid (3-1) et Bologne (2-1) à l’extérieur, ne céder que sur la fin à Liverpool (1-2) à dix contre onze dans un Anfield médusé par tant de résistance ?
Hier encore, le LOSC avait sorti une armada bis avec Jonathan
David, la star locale, Hakon Haraldsson, l’homme en grande forme, et Gabriel Gudmundsson sur le banc dans un rappel du déplacement à Madrid où Ousmane Touré, gamin parti depuis en prêt à Valenciennes, avait débuté.
Pronostics déjoués, obstacles repoussés
Mais ici, dans le Nord, on change, on interchange, on déplace sans jamais toucher à l’idée que l’équipe passe devant les individualités. Et devant les statuts. On surinterprète parfois les attitudes, mais on ne croit pas se tromper de beaucoup sur celle de David, sanctionné visiblement avant le match par son entraîneur, d’après Canal+, qui lui a sauté dans les bras après sa réalisation, la quatrième comme pour sceller la réconciliation. Ou plutôt s’excuser peut-être d’avoir enfreint une règle interne. Ces attitudes disent parfois beaucoup plus que des mots des rapports internes, des équilibres humains. Chacun y est ainsi allé de son écot, hier, face aux Néerlandais et notamment Osame Sahraoui ( lire page 8), plutôt remplaçant d'habitude, auteur de l’ouverture du score et de deux assists sur des c.s.c. (Trauner, 38e,77e), ou Angel Gomes de retour récemment d’une longue blessure à un mollet (57e). Encore une fois, Genesio n’a pas eu peur de lui renouveler sa confiance à un moment décisif de la saison. Lille a donc survolé sa Ligue des champions dans des proportions inattendues.
Quand cette équipe s’est lancée dans la belle aventure, au tout début du mois d’août, quand déjà le tirage au sort lui avait offert le Fenerbahçe de José Mourinho, le LOSC a toujours répondu présent, a repoussé les obstacles, brisé tous les pronostics pour obtenir les plus beaux résultats de son histoire européenne.
Ce parcours marquera à jamais un club et des supporters. Car c'est dans ces instants-là qu’on entre définitivement dans le coeur des gens...
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«Une récompense pour tout le club»
30 Jan 2025 L'Équipe
JOËL DOMENIGHETTI
Bruno Genesio, l’entraîneur de Lille, a tenu à féliciter tout son effectif et son staff après son succès face à Feyenoord, ouvrant au LOSC la porte des huitièmes de finale sans passer par les play-offs.
“Ce groupe est très bien préparé athlétiquement. On a aussi un peu de réussite de temps en temps
«Est-ceunmatchparfait?
Oui, si le match parfait existe, je peux le dire. En tous cas, la soirée a été parfaite. On a gagné. C’ était le premier objectif. Ensuite, les résultats nous sont favorables. On va en huitièmes et cela nous épargne deux match es supplémentaires, ce qui n’ est pas du luxe avec notre programme cette saison.
Si on vous avait dit que vous seriez en 8 es en août 2024?
Apr es le tirage, on pouvait difficilement se le dire. On avait envie d’ être dans les 24. Delàà avoir16pointset de terminer 7 es… Surtout dans notre groupe qui était un des deux plus difficiles avec celui duPSG. Cela récompense les joueurs, tout le groupe, les blessés et ceux qui jouent moins. Je tiens à féliciter tous les staffs. Ils m’ aident et font un travail extraordinaire. C’ est une récompense pour tout le club.
Pourquoi cette compos'itio'n surprenante?
On a beaucoup de match es. On est l’ équipe qui a le plus joué en Europe depuis le début de saison. J’ ai besoin de ménager les uns et les autres. De redonner du temps de jeu aux joueurs qui en ont besoin. Je pense àAngel( Gomes). J’ ai aussi confiance en tous les joueurs qui doivent se montrer. Et nous avons encore trois match es à domicile qui arrivent.
Quelle a été la clé de votre réussite enphasedeligue?
Elle a été multiple. L’ esprit du groupe, la considération des uns et des autres qui règnent. Un groupe de joueurs qui applique à la lettre la plupart du temps. Je parle des consignes tactiques. Ce groupe est très bien préparé athlétique ment. On a aussi un peu de réussite de tempsentemps.
Le public a scandé votre nom. Quelle importance cela a àvosyeux?
Les scènes de joie, c’ est assez rare que je m’ exprime comme je l’ ai fait ce soir( hier ). Que j’ extériorise. C’ était instantané. J’ ai beaucoup aimé ce moment. C’ est toujours une reconnaissance. On est toujours très contents. Mais c’ est tout le monde qui participe à ce genre d’ aventure humaine.
On nous dit que vous vous êtes exprimé dans le vestiaire. Qu’avez-vousexpliqué àvosjoueurs?
J’ ai été assez court. Je les ai félicités pour le parcours. Ils se rendront compte de ce qu’ il sont réalisés après leur carrière. Mais ce n’ est pas terminé. J’ ai salué ceux qui ont joué ettouslesabsents.
Jonathan David n’ a pas débuté. A-t-ilétésanctionné?
Je vous ai dit pourquoi auparavant. Jona (David), Hakon (Haraldsson) et Gaby (Gudmundsson) n’ont pas débuté. Il était sous le coup d’ un carton jaune. S’ il le prenait, il était suspendu.»
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C’était le «Sahraoui Show»
30 Jan 2025 - L'Équipe
FRANÇOIS VERDENET
Premier buteur d’un match inoubliable, l’international marocain a été quasiment dans tous les coups en étant passeur décisif et en maltraitant en permanence la défense adverse.
38e minute: Osame Sahraoui tacle et trompe Gernot Trauner,
qui marque contre son camp.
VILLENEUVE-D’ASCQ (NORD) – Comme pour mieux saluer le festival total de son homme du match, Bruno Genesio a attendu le bout du bout pour sortir Odame Sahraoui (23ans) à la 90e + 1. Le Marocain a alors reçu la standing ovation d’un stade Pierre-Mauroy en transe avec ce score de tennis face à un Feyenoord réduit en lambeaux (6-1). L’ailier gauche virevoltant restera un des grands acteurs de cette soirée magique qui a envoyé leLOSCdansletop8decettenouvelle formule de la Ligue des champions.
Ilaétédanstouslesbonscoups et dès l’entame de cette partie de rêve qui est déjà gravée dans la légende nordiste. Pour ce petit bonhomme (1,70 m) aux jambes de feu, une grande histoire vient de commencer. Sa première période a été totale. Il aurait déjà pu marquer dans les premières secondes. Bien lancé par Rémy Cabella, sa frappe trop molle est passée juste à côté. Mais il se rattrapera dans la foulée. Encore mis sur orbite par le numéro10 lillois, acolyte intenable comme lui, Sahraoui glissa une frappe croisée subtile dans un angle fermé pour ouvrir le score (4e). Toujours très mobile, disponible et précis dans ses passes, l’ex-prodige de Valerenga (Norvège) déroulait sa technique en mouvement. Les colosses néerlandais, et surtout Gernot Trauner, en perdirent la tête. Sahraoui se jetait sur le côté gauche pour redresser un ballon que le défenseur central du Feyenoord déviait dans son but sous la pression de Mohamed Bayo (38e).
Il a participé à tous les matches européens de Lille cette saison
Cette action de l’ailier nordiste valait quasiment une passe décisive. Sa première période aboutie en appelait une seconde du même acabit où les Néerlandais n’allaient encore voir son numéro 11 qu’en relief. Ses appels dans le dos ont été saignants et souvent à la limite du hors-jeu. À la 77e minute, l’arbitre Slavko Vincic devait même attendre la VAR pour confirmer le 5e but du LOSC. L’international marocain (1 sélection) était dans le coup en centrant pour Hakon Haraldsson qui provoquait le nouveau c.s.c. du pauvre Trauner (77e).
Mais le « Sahraoui Show » n’était pas terminé. Après avoir glissé derrière Jonathan David comme meneur de jeu voire deuxième attaquant plus près du Canadien, l’ancien joueur d’Heerenveen se rappelait encore aux bons souvenirs de ses adversaires, qui avaient déjà pu apprécier ses arabesques de dribbleur en Eredivisie pendant une saison et demie.
Au départ de l’action, il perforait la défense, filait sur son aile pour redresser de l’extérieur du gauche et renvoyer l’ascenseur à Cabella, pour la clôture du score (80e). Le régal devenait un festin pour le petit lutin marocain. Le président Olivier Létang ne doit pas regretter les 8M€ investis sur lui au mercato estival. Buteur face au Sturm Graz pour ouvrir son compteur en C1 (3-2, le 11 décembre), il a été un des rares Lillois à avoir participé aux douze matches européens depuis le 3e tour de qualification contre Fenerbahçe jusqu’à ce feu d’artifice face au Feyenoord. L’investissement lillois est déjà rentabilisé.
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8 - Lille a gagné 8 de ses 11 derniers matches de phase de ligue de Ligue des champions (1 nul, 2 défaites) après n’avoir enregistré qu’un seul succès sur les 16 précédents (4 nuls, 11 défaites).
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