Emportés par le vent


Les rafales ont chamboulé la journée d’hier, passée d’étape reine à une course d’une vingtaine de kilomètres. Quinn Simmons a gagné, Juan Ayuso reste leader avant l’ultime jour et les « familles » se sont encore déchirées.

30 Mar 2025 - L'Équipe
PIERRE MENJOT

BERGA (ESP) – La grande famille du cyclisme vit bien. Du moins, elle vit, et la journée d’hier en Catalogne en a été une belle preuve, avec une étape modifiée plusieurs fois au fil des heures, jusqu’à la victoire de Quinn Simmons dans l’incompréhension et la colère de certains coureurs face aux organisateurs.Avant le départ fictif, hier matin à Berga, balayée par les rafales de vent, les discussions sont animées entre Juan Ayuso (maillot UAE), leader de l’épreuve, Primoz Roglic (de face) et Geraint Thomas.

Le départ Trop de vent, pas d’ascension

Geoffrey Bouchard (DecathlonAG2R La Mondiale) faisait mine de se tenir à une barrière, sur le podium protocolaire de Berga, pour ne pas s’envoler. Une blague pas si innocente. Partis en cars de Barcelone, à une heure de là, les coureurs « ont senti le bus soufflé tout le long de la route, alors c’était assez effrayant de se dire qu’on allait monter sur un vélo », rigole Quinn Simmons (Lidl-Trek). Les organisateurs, la veille, avaient déjà raboté l’étape du coll de Pradell, son point culminant (1715 mètres). Dans la matinée, ils décapitent carrément le parcours, surtout l’arrivée en altitude à Queralt (1150m), où des rafales à plus de 100km/h se font sentir.

Le temps que l’info circule, tout est un peu flou. «Je ne sais pas du tout ce qui se passe, il y a tellement de versions depuis une heure, sourit le leader Juan Ayuso, fataliste. Évidemment que j’aurais voulu courir l’étape prévue, mais le vent est fou, et si c’est une décision pour notre sécurité, notre santé, elle est totalement compréhensible. » Le Français Lenny Martinez, qui comptait profiter de l’étape pour taquiner le podium, est sur la même ligne. «Je pense qu’on va partir, et on verra bien, comme souvent», prophétise Dorian Godon (Decathlon-AG2R La Mondiale).

Certaines équipes votent pour annuler l’étape, d’autres veulent tenter,lesyndicatdescoureurss’en mêle. «On aura une partie en ligne puis un circuit de 60 kilomètres, sans montagne, parcouru deux fois, la première neutralisée»,explique RubenPeris,ledirecteurdel’épreuve.

La course De deux tours à un

Les coureurs retournent tous aux cars pour un nouveau briefing de leurs directeurs sportifs et, un peu avant 14 heures, comme prévu, le départ est donc donné. Les cyclistes avalent les kilomètres derrière la voiture du directeur de course, tranquilles. Les sprints intermédiaires sont annulés, les temps pour le classement seront gelés à 5 kilomètres de l’arrivée. Mais, au bout de 47 bornes au rythme de facteurs sans assistance électrique, et alors qu’il reste la moitié de la première boucle, Primoz Roglic remonte discuter avec Peris.

Le Slovène se fait porte-parole d’une partie du peloton. «Si on faisait la boucle entière, tout le monde était endormi, on se faisait plus mal qu’autre chose, et ça aurait terminé très tard, explique Rémy Rochas (Groupama-FDJ). Le vent s’engouffrait peu dans cette zone, donc on était motivés pour courir dans de bonnes conditions. Le bon compromis était de lancer la course. » Le local Marc Soler (UAE) vient au renfort de Roglic, enfoncer le clou.

À Berga, les policiers sont contraints de replier les gros parasols qui se cabraient sous le vent. Et en fin d’après-midi, l’Américain Quinn Simmons, qui pensait « passer une étape de montagne dans le gruppetto », remporte son premier succès en World Tour, au terme d’une étape de... 20 km.

Les organisateurs n’ont pas vraiment le choix. Une fois la partie scabreuse passée, le départ sera donné, deux kilomètres plus loin. L’information passe à la radio, en espagnol, anglais, puis français, et de bouche en bouche au sein du peloton. Mais, comme lors de Paris-Nice, pas à la même vitesse chez tout le monde. «C’était un peu le bordel, on a eu les informations super tard, on n’était pas bien placés et on s’est fait fouetter, on a dû prendre des risques pour remonter », rouspète Dorian Godon. «J’étais tranquille à ma voiture à en le ver mes vêtements quand c’est arrivé, j’ai dû revenir dans les descentes », abonde Quinn Simmons. À 15h56, le drapeau s’agite. Il y a 28 kilomètres à parcourir, sans vent. Une course de minimes. Quatre hommes s’extirpent du peloton, dont Rémy Rochas. « Ma semaine a été compliquée avec les allergies, là je me sentais mieux donc je voulais faire mes efforts au max», explique le grimpeur. À 10 kilomètres du but, tout le monde est repris. À 5, les coureurs du général se relèvent et la victoire se joue en petit comité.

La fin Coup du kilomètre et fâcheries

À la flamme rouge, Simmons attaque. «Je devais passer une étape de montagne à me reposer dans le gruppetto, et je me retrouve avec une arrivée qui me convenait », rigénéral gole l’Américain. Il ne sera jamais repris et remporte, après 25’04’’ d’efforts, son premier succès en World Tour, devant la foule et les drapeaux catalans. Au moment de retrouver les cars, beaucoup sourient, entre fatalisme et sensation d’avoir vécu une journée à part. « On ne pouvait rien faire de plus, on voulait courir et on a fait ce qu’on a pu», juge Marc Soler.

Ruben Peris, lui, est beaucoup moins rieur. «Ça a été une journée désagréable, peste le directeur de course, l’air grave. On avait prévu quelque chose avec les coureurs et cela n’a pas été respecté. Je suis très fâché, c’est un manque de respect envers les organisateurs, le public, les collectivités qui ont collaboré depuis deux jours. Certains coureurs ont manqué de hauteur. Je sais qu’il est question de sécurité, je le comprends tout à fait, mais il y a un moment pour tout, et aujourd’hui, ce n’était pas le moment d’arrêter la course.»

Leader d’un classement qui n’a pas bougé, Juan Ayuso ne cesse de féliciter les organisateurs, avoue sa gêne («je compatis avec eux, c’est vraiment dommage de ne pas avoir couru un autre tour, ils méritaient davantage») et se projette sur aujourd’hui. Il n’a qu’une seconde d’avance sur Primoz Roglic avant l’étape de Barcelone, qui donne rarement lieu à des renversements de hiérarchie malgré des écarts toujours riquiqui. Mais rien ne se passe tout à fait comme prévu, ces dernières heures, sur ce Tour de Catalogne.

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