DRÔLE DE FINALE
Ousmane Dembélé, Nuno Mendes,
Yehvann Diouf et Keito Nakamura.
S’OUVRIR L’APPÉTIT
Si les deux équipes rêvent d’un succès de prestige ce soir au Stade de France, elles auront à l’esprit leur prochaine échéance : la finale de la C1 pour le PSG et le maintien en Ligue 1 pour Reims.
24 May 2025 - L'Équipe
VINCENT DULUC
Entre le premier finaliste européen de l’histoire du football français et le dernier en date, entre le premier qui a envoyé sa star au Real Madrid (Raymond Kopa) et le dernier à l’avoir fait, même sans l’avoir choisi (Kylian Mbappé), les chances sont assez élevées que le dernier soit le premier ce soir : il y a soixantedix ans entre le sommet du Stade de Reims et celui du PSG, et c’est à peu près l’écart supposé entre les deux équipes, entre un champion de France impitoyable quand cela compte et un barragiste sur un fil.
On a bien remarqué que Reims n’a pas perdu face au PSG cette saison (1-1, le 21 septembre et 1-1, le 25 janvier), mais dès qu’il s’agit d’argenterie, les Parisiens sont très peu gaspilleurs.
Reims, barragiste, pourrait bien penser à autre chose
Sous l’ère qatarienne, Paris a été champion de France onze fois sur quatorze, il a remporté la Coupe de la Ligue six fois sur neuf, et la Coupe de France sept fois sur treize. Si l’on pousse un peu, on dira que c’est dans la compétition française la plus ancienne qu’il s’est le plus dispersé, et c’est en tout cas la seule dans laquelle il ait perdu une finale au Stade de France, face à Rennes (2-2, 5 t.a.b. à 6) en 2019.
Mais ce matin, pour être honnête, personne ne voit comment le PSG pourrait perdre la 107e finale de Coupe de France (1) et seule cette certitude, au fond, ressemble à une menace, pour une jeune équipe parisienne peu faite pour le confort et les a priori.
Ce n’est pas la première transhumance du Stade de Reims et de ses escortes, après que le club rémois a disputé ses mat- ches européens au Parc des Princes, à la fin des années 50, dont la première finale de Coupe d’Europe des champions perdue face au Real (2-3) en 1956, puis la finale de la Coupe de France 1977 face à l’AS Saint-Étienne (1-2), dont il reste l’image de José Santamaria, accroché au filet, quasi christique, pour fêter le but de l’espoir rémois, éteint dans les cinq dernières minutes par Dominique Bathenay et Alain Merchadier.
La finale de la Coupe est régulièrement le dernier rendez-vous de la saison française, l’apothéose de tous ceux dont les finales ne sont pas l’habitat naturel, c’est-à-dire à peu près tout le monde en dehors du PSG, et celle-ci se présente étrangement. D’abord, car Reims, qui n’est pas vraiment sûr de gagner s’il alignait sa meilleure équipe, pourrait bien penser à autre chose : s’il peut conquérir un trophée et une place en Ligue Europa, ce soir (2), il jouera son maintien en L1 et une partie de son avenir dans son barrage face à Metz (aller : 1-1), jeudi.
Ensuite, parce que le PSG a presque plus besoin de gagner encore : la victoire doit rester un état permanent, chez lui, à une semaine de la finale de la Ligue des champions, et il a besoin d’entretenir son rythme autant que sa férocité, depuis qu’il joue une fois par semaine, selon une cadence qui peut le déstabiliser en provoquant quelque ennui, d’autant que ses dernières sorties en Ligue 1 l’ont éloigné des exigences et de l’intensité de la haute compétition.
Paris doit produire du jeu et de la joie
Bien sûr, si remporter une finale de Coupe de France apprenait à gagner une finale de Ligue des champions, il est probable qu’on l’aurait remarqué. Mais à une semaine de son rêve de couronnement à Munich face à l’Inter Milan, à une semaine de devoir livrer son meilleur match de la saison, ou au moins de montrer la meilleure version de luimême, le PSG doit produire du jeu et de la joie, après avoir mieux réussi dans le second domaine, en fin de Championnat.
Face à des Rémois qui ont un très bon gardien, une certaine vitesse et quelque qualité en transition, mais à peu près personne pour finir le boulot de manière régulière, les Parisiens doivent étaler leur marge, leur force, du haut de ce que l’on imaginera être l’équipe de la finale. Cette saison, en Coupe, ils ont toujours été menés, sauf au Mans (2-0, le 4 février) puis à Saint-Brieuc (7-0, le 26 février), et Luis Enrique n’a jamais aligné sa meilleure équipe. À une semaine de Munich, l’idée du jour serait plutôt quetoutchange.
(1): Il y a eu 108 éditions depuis 1918, mais la finale de l’édition 1992 n’a pas été jouée en raison de la catastrophe de Furiani, avant la demi-finale Bastia-OM, le 5 mai 1992.
(2): Si Reims gagne, l’OL (6e) disputera la Ligue Conférence; si le PSG gagne, l’OL (6e) disputera la Ligue Europa et Strasbourg le barrage de la Ligue Conférence.
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Le latéral gauche Nuno Mendes, ici face à l’OM (3-1) le 16 mars, constitue
offensivement un poison permanent par sa vitesse et la qualité de ses centres.
Nuno Mendes, la cuisse et l’aile
Le latéral, essentiel dans le parcours parisien en C1, se distingue par une dimension athlétique exceptionnelle. Qu’il associe désormais à une qualité de pied rare, notamment sur coups de pied arrêtés.
"Il a une bonne qualité de passe,
mais il peut encore apporter
davantage offensivement"
- VINCENT GUÉRIN, ANCIEN JOUEUR DU PSG
HUGO DELOM (avec A. H. et R. Laf.)
Sur les plages espagnoles, entre deux baignades, Paul Joly doit encore y songer, parfois. Le latéral auxerrois est la dernière victime en date de Nuno Mendes. La semaine dernière, le Parisien, par ses accélérations, ses appels, a, une nouvelle fois, tourmenté la défense bourguignonne et de nouveau montré ses aptitudes athlétiques exceptionnelles. Celles-là même qui lui ont permis de devenir ce latéral capable, cette saison, de limiter l’influence de Mohamed Salah et de Bukayo Saka. Celles-là même qui pourraient troubler la soirée du Rémois Hiroki Sekine ce soir au Stade de France : « Ce qui me marque avec lui, bien au-delà de son activité incroyable et de son volume de jeu, c’est sa capacité à changer de rythme, salue le champion d’Europe 1996 Vincent Guérin. Il y a cette accélération et grâce à ses appuis cette faculté à changer de rythme. À s’arrêter et à réaccélérer.»
«L’avion de chasse» a pris du muscle
La machine Nuno Mendes (1,80 m, 70 kg) a mis du temps à se mettre en place. Le jeune Portugais (22 ans) n’a pas toujours été posé sur des cuisses XXL et ce haut du corps si musculeux. Loin de là : « Entre les U13 et les U15, il était tout petit, mais je me rappelle qu’il était déjà très rapide, nous racontait, il y a quelques mois, Pedro Coelho, son entraîneur en U13, U15 et une demisaison en U19. En U15, il était très rapide mais pas costaud. Physiquement, il n’était pas fort pour les un-contre-un et n’avait pas encore franchi un cap niveau physique. Ensuite, il s’est amélioré dans ce domaine, il a grandi aussi.»
Le Portugais, régulièrement confronté à des blessures musculaires ces dernières années, a bien grandi. Deuxième Parisien le plus rapide en Ligue des champions cette saison – 35,7km/h contre 36,9km/ h pour Achraf Hakimi –, le gamin de Sintra, arrivé à Paris en 2021, est désormais cet « avion de chasse » voulu par Luis Enrique. « Je revois le joueur hyper rapide, explosif, capable de multiplier les sprints à haute intensité que nous avions, souligne Leonel Pontes, son exentraîneur avec les U23 du Sporting Portugal. Il a eu des fragilités musculaires, mais c’est un joueur qui s’est toujours distingué par sa dureté dans le duel, sa force. Au sol, comme dans les airs, avec de très bons appuis et une bonne détente.»
En ce printemps 2025, au-delà de l’impression de domination athlétique, ses erreurs de placement ou d’inattention, souvent coûteuses en C1, se sont espacées. L’ex-crack du Sporting Portugal fait parler la justesse de son pied, peu commune à ce poste. Six buts, six passes décisives cette saison. Et cette impression depuis les réajustements de Luis Enrique – davantage de libertés accordées – que le gaucher a encore pris une autre dimension dans le dernier geste. Avec une marge de progression dans certains de ses choix : « Il a une bonne qualité de passe, mais il peut encore apporter davantage offensivement, relève Guérin. On l’a vu frapper. Mais il a, je pense, dans ces zones-là, un espace de progression pour être capable d’être encore plus efficace. »
Signe de la confiance accordée par Luis Enrique, Nuno Mendes est désormais ponctuellement en charge des coups de pied arrêtés. Des corners comme des coups francs. « NM » n’a pas encore la précision du pied de son modèle Marcelo, mais sur ce qu’on a vu récemment, il a montré de réelles qualités : « Ce n’est pas une surprise, il les a frappés avec nous. Il a ce pied gauche fantastique, relève Pontes. Il a toujours eu de la diversité dans ses centres, avec des puissants au premier poteau par exemple ou des flottants au second. »
Et si, dans la nuit munichoise dans une semaine, face à l’Inter Milan, le Lusitanien portait le PSG sur l’un de ses gestes ?
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Luis Enrique ne veut « rien changer »
Ne pas changer ses habitudes, ni son état d’esprit. Et mesurer, avant une semaine décisive, l’opportunité d’être dans la situation que ce groupe rêvait de vivre en début de saison. Hier, en conférence de presse, Luis Enrique et Marquinhos ont martelé ce double message. Pas question de penser à autre chose que la finale de ce soir face à Reims. « Ce n’est pas difficile de se motiver. Il n’y aura aucun joueur qui pensera à la prochaine finale », martelait l’entraîneur. Avec un groupe quasi au complet – seul Presnel Kimpembe est en phase de reprise –, le technicien va-t-il se servir de ce rendez-vous face à une équipe de Reims contre laquelle Paris a concédé deux nuls cette saison comme une répétition pour la finale de Ligue des champions contre l’Inter Milan ? L’une des incertitudes concerne l’identité du trio offensif. Désiré Doué, remplaçant contre Auxerre la semaine dernière (3-1), reste sur des sorties moins abouties. Bradley Barcola, pas inintéressant quand il est passé à droite contre le club bourguignon, a une vraie carte à jouer. Gianluigi Donnarumma devrait être préféré à Matveï Safonov, qui avait pourtant été titulaire lors de quatre des cinq matches du PSG en Coupe.
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