Ligue 2 : quand l’engouement gagne le Paris FC
ANNA KURTH/AFP - Les supporteurs du Paris FC encouragent
leur équipe face à Lorient, le 8 mars, au stade Charléty.
En course pour la montée en Ligue 1, le club parisien attire tous les regards depuis son rachat par la famille Arnault.
« Il y a à la fois beaucoup d’ambition et d’engouement,
et, en même temps, la volonté des dirigeants que je représente de,
non pas calmer le jeu en termes d’ambition,
car je pense qu’il faut les afficher,
mais calmer le jeu en termes d’étapes à franchir »
- Pierre Ferracci Président du Paris FC
31 Mar 2025 - Le Figaro
Sébastien Ferreira
Ils esont nombreux, les curieux, à s’agglutiner au 99 boulevard Kellermann, adresse du stade Charléty, où évolue le Paris FC. Le 25 janvier, le club qui évolue dans le 13 arrondissement de la capitale a battu son record d’affluence lors d’une victoire pendant le derby francilien face au Red Star (4-1, 17 748 spectateurs). Ils étaient un tout petit peu moins (17 635) le 8 mars pour un autre succès, contre Lorient (3-2). «Au-delà d’avoir plus de monde, je sens aussi dans le stade que les gens sont plus participatifs, actifs. Il y a de l’enthousiasme dans la façon de supporter» , témoigne, au Figaro, Rai, champion du monde brésilien et ancienne gloire du PSG, qui a investi au PFC dès 2022 et joue le rôle d’ambassadeur de luxe.
Ce ressenti a évolué depuis le 17 octobre 2024 quand Agache, holding de Bernard Arnault (3e plus grande fortune au monde selon Forbes), est devenu propriétaire du Paris FC à hauteur de 52 %, en partenariat avec Red Bull (11 %) et l’opérateur de téléphonie Lycamobile (7%), le président Pierre Ferracci conservant 30 % des parts jusqu’en 2027 avant de les céder à Agache. « On nous voit tous en Ligue 1 et on calme les ardeurs, on ne veut pas mettre la charrue avant les boeufs, il y a des étapes à franchir », tempère Ferracci qui reconnaît tout de même : « Il y a beaucoup plus d’attractivité du côté des supporteurs, des partenaires et, même, de l’environnement global du club. Les autres clubs aussi s’intéressent à nous. »
L’effervescence frappe désormais par vagues à Charléty. Le 11 janvier, Jürgen Klopp, mythique entraîneur du Borussia Dortmund et de Liverpool, aujourd’hui directeur du football mondial pour Red Bull, avait assisté à une victoire parisienne face à Amiens (1-0). « On a simplement joué devant l’un des meilleurs entraîneurs du monde », appréciait le coach du PFC, Stéphane Gilli. Une présence qui a contribué à faire parler du projet. « En tant qu’ambassadeur, je le sens au quotidien. Quand je suis à Paris, quand je vais prendre mon petit-déjeuner à la boulangerie, quand j’ai des rendez-vous… C’est un sujet qui est devenu incontournable », partage Rai, présent lors de la venue de Klopp et qui sera de nouveau en tribunes ce lundi soir pour la réception de Caen.
Les informations affluent et la dernière en date, tombée le 12 février, n’est pas anodine : le Paris FC partagera, à compter de la saison prochaine, le stade Jeanbouin, à deux pas du Parc des Princes, avec les rugbymen du Stade Français «a minima jusqu’en 2029, le Stade Français demeurant naturellement le club résident et l’utilisateur principal», précisait le communiqué. «La dernière fois que j’avais vu un match aussi loin, c’était à la télé », s’était en effet étonné Klopp lors de sa venue à Charléty, en référence à la distance entre les tribunes et la pelouse. La patience prônée par la famille Arnault n’empêche pas l’ambition, mais le tartan de la piste d’athlétisme de Charléty, dont la capacité est identique à Jean-bouin (20000 places), si. «Jean-bouin est un beau stade pour les supporteurs parce qu’ils seront près du terrain, pour les joueurs et les joueuses parce qu’ils les entendront un peu mieux, et pour les partenaires, parce que les hospitalités sont royales. Pour développer nos revenus, c’est un superbe outil», justifie Ferracci. Le Parc des Princes, que le PSG, en conflit avec la Mairie de Paris, se dit prêt à abandonner, serait encore plus profitable. « C’est quelque chose qui n’existe pas dans notre esprit aujourd’hui », balaye le président de 72 ans.
Il s’agit désormais de savoir quand et comment le Paris FC va vraiment changer de dimension. À l’aube du sprint final (mais avec un match en retard), il pointe à la 3e place de Ligue 2 à 4 points de Metz, 2e, et 6 du leader, Lorient. Seuls les deux premiers sont directement promus. Les trois suivants sont reversés en barrages. Il y a donc encore du chemin pour les protégés de Stéphane Gilli, 50 ans, symbole de la modestie du club de la capitale, lui qui n’avait eu que des rôles d’adjoint (Grenoble, Sochaux, Bosnie-herzégovine, Maroc…) avant de se voir confier les clés de l’équipe à l’été 2023.
Ce n’est pas demain que le deuxième club parisien - fondé en 1972, soit deux ans après le PSG -, accueillera des vedettes internationales. Le nom le plus ronflant de l’effectif, jusqu’ici, est celui de Maxime Lopez, 27 ans, ancien milieu de L’OM arrivé l’été dernier. « Nous n’avons pas du tout envie de brûler les étapes, d’aller à mille à l’heure et de recruter des stars du foot pour essayer de monter en Ligue 1 le plus vite possible », confiait Antoine Arnault au Figaro en novembre dernier. «La stratégie est de continuer à investir dans la formation, d’être un club qui ne veut pas faire des folies », acquiesce Rai.
Ce n’est donc que le début de grands travaux, au sens propre et figuré. « J’ai également visité le centre d’entraînement qui m’a rappelé celui de mon premier club (Mayence) il y a vingt ans », avait tancé Jürgen Klopp. Une manière d’annoncer la couleur : le Paris FC doit, à l’instar du leitmotiv du PSG, « rêver plus grand ». Et concurrencer le voisin ? « On est sur une autre planète pour l’instant. On essaye d’arriver en Ligue 1 », rappelle Ferracci.
Le savoir-faire de Red Bull dans le football s’annonce cependant comme un accélérateur de particules. La société autrichienne a racheté le club phare de son pays, Salzbourg, en 2005. Une sorte de centre de formation qui a vu passer Sadio Mané, Erling Haaland ou Dayot Upamecano, et qui participe presque tous les ans à la Ligue des champions. Elle a aussi fondé le RB Leipzig en 2009. L’équipe a grimpé les échelons jusqu’à gagner deux Coupes d’allemagne (2022 et 2023) et atteindre les demi-finales de la Ligue des champions en 2020.
« Red Bull est un aiguillon très important pour le club», souligne Ferracci, impatient de voir, comme dans tous les pays où l’entité autrichienne a tissé sa toile (Allemagne, Brésil, États-unis…), « des infrastructures se développer ». «Ilyaàla fois beaucoup d’ambition et d’engouement, et, en même temps, la volonté des dirigeants que je représente de, non pas calmer le jeu en termes d’ambition car je pense qu’il faut les afficher, mais calmer le jeu en termes d’étapes à franchir », résume Ferracci. Monter en Ligue 1 dès cette saison constituerait déjà un pas de géant.
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Malgré Mbappé, Caen en zone de très fortes turbulences
« Le Stade Malherbe est un élément constitutif de la ville,
un emblème qui contribue à sa fierté.
Chuter à l’échelon inférieur serait un coup très rude »
- Aristide Olivier Maire de Caen
31 Mar 2025 - Le Figaro
Frédéric de Monicault
C’est un choc des extrêmes qui va se dérouler ce lundi soir au stade Charléty. Le Paris FC reçoit un Stade Malherbe de Caen (SMC) qui semble déjà condamné à la relégation en National, l’équivalent de la troisième division, avec, pour l’heure, seulement 19 petits points. L’été dernier, personne, dans le Calvados, n’imaginait une telle annus horribilis. Car non seulement l’équipe avait clôturé la saison précédente aux portes des barrages Ligue 1-Ligue 2, mais, surtout, le club venait d’être racheté en septembre 2024 par Coalition Capital, l’entité d’investissement de Kylian Mbappé. Celle-ci détient 80% des parts, contre 20% pour l’homme d’affaires Pierre-antoine Capton, précédemment actionnaire de référence.
Contactées par Le Figaro, les deux parties n’entendent pas commenter la situation, encore alourdie par le dernier rapport (pour la saison 2023-2024) de la Direction nationale du contrôle de gestion (DNCG), qui pointe l’aggravation du déficit structurel du SMC. Aujourd’hui consultant sur Ici Normandie (ex-france Bleue), Patrice Garande a entraîné « Malherbe » pendant six saisons (2012-2018). Il connaît tellement bien l’écosystème local que ses propos ont du poids. « D’abord et avant tout, il faut saluer l’engagement de la fafication mille Mbappé. Elle a permis de sauver le club (sur le plan économique, NDLR). Cela étant, les résultats sur le terrain sont le fruit d’une lourde accumulation d’erreurs. » L’intéressé pointe, pêlemêle, un effectif déséquilibré, en plus d’être trop nombreux, un investissement parfois défaillant des joueurs, un mercato approximatif, l’oubli des exigences d’un championnat aussi relevé que la Ligue 2. Pour, à l’arrivée, un projet mal ficelé.
Que dire des techniciens en place ? Depuis la première journée, ils sont trois à s’être succédé sur le banc. Patrice Garande n’a toujours pas compris l’arrivée du portugais Bruno Balthazar, la veille du jour de l’an. « Sa personnalité n’est pas en cause, mais quel est le processus qui a conduit à faire appel à un entraîneur ayant multiplié les expériences au cours de sa carrière, ne connaissant pas le championnat de France et qui, à l’occasion de sa première conférence de presse, se met à parler de qualieuropéenne…» Le résultat est sans appel : 7 matchs, 0 point. Exit donc Balthazar, place à Michel Der Zakarian, technicien ultra-expérimenté mais qui, pour l’heure, ne fait pas de miracles.
Avant Balthazar et Der Zakarian, les supporteurs malherbistes ont très mal vécu l’éviction brutale de Nicolas Seube. Sur les rives de l’orne, celui-ci n’est pas loin d’avoir une statue. Joueur à l’incroyable longévité sous la tunique bleue et rouge (16 saisons et 520 matchs), ses premières armes à la formation se sont révélées probantes, avec notamment une place en finale de la Coupe Gambardella (réservée aux moins de 18 ans). Propulsé à la tête de l’équipe fanion à l’automne 2023, il avait su instaurer une dynamique. Seube incarnait par excellence cet esprit de corps qui permet à Malherbe de naviguer entre la première et la seconde division depuis plus de quarante ans, avec une identité bien identifiée.
Les supporteurs, parlons-en. Ils incarnent l’âme du club : plus de 17 000 dans les travées du stade Michel-d’ornano, à l’occasion du dernier match contre Laval. « Si le club descend en National, il y a fort à parier qu’ils seront toujours plus de 10 000 au stade », avance Garande. Pas sûr que cela réconforte la mairie, dont Aristide Olivier est le premier édile. « Le Stade Malherbe est un élément constitutif de la ville, un emblème qui contribue à sa fierté. Chuter à l’échelon inférieur serait un coup très rude. » Signe cruel du destin : la cité de Guillaume le Conquérant fête cette année son millénaire. L’heure est donc à l’enthousiasme. Sauf à Malherbe.
Et après ? « Si la relégation survient, il serait impensable que le club ne se donne pas les moyens de remonter immédiatement. Mais avec quel projet à la clé ? Pendant longtemps, la continuité et la stabilité ont permis au club de maintenir un certain standing. Il faudra retrouver ces atouts.» Quoi qu’il en soit, avec plus d’une dizaine de joueurs en fin de contrat, une refonte complète de l’effectif est déjà programmée. Certains éléments seront impossibles à retenir, comme l’attaquant Alex Mendy (meilleur buteur de l’histoire du SMC), le milieu Noé Lebreton ou le défenseur Brahim Traoré, rares valeurs monnayables mais avec les limites de l’exercice, car un club relégué n’a aucune marge de manoeuvre financière.
Mais l’équipe première n’est pas tout : depuis des années, le SMC est réputé pour son centre de formation, un vrai ADN tant cette structure a permis au fil des saisons d’alimenter le vivier des titulaires et de renflouer les caisses. Or le centre de formation d’un club de troisième division est, par définition, beaucoup moins attractif. Bref, après le chemin de croix de cette saison 20242025, la pente s’annonce très rude pour Malherbe.
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