Val Kilmer, une tête brûlée s’éteint
Photo Andy Fallon. CAMERAPRESS.
Gamma Val Kilmer en 2004.
Val Kilmer, top gueule
Beau gosse à mâchoire saillante des années 8090, l’acteur célèbre pour ses rôles dans «Top Gun», «Heat» ou «The Doors» a vu sa carrière flancher sous l'effet d’une mauvaise réputation. Il est mort mardi à 65 ans.
3 Apr 2025 - Libération
Léo Soesanto
Beaucoup ont été éberlués par la beauté et le charisme de Val Kilmer, à juste titre, au détour d’une partie de beach-volley entre pilotes de chasse dans Top Gun (1986) de Tony Scott ou de son incarnation hantée de Jim Morrison dans The Doors (1991) d’Oliver Stone. Son arme secrète était cette mâchoire saillante, impossiblement carrée (comme la «partie inférieure, tranchante, d’un panneau STOP», selon un portrait du New York Times en 2020), qui le distinguait du toutvenant des stars hollywoodiennes des années 80-90, sans le ranger dans la case Schwarzenegger –on ne voit qu’elle dépassant de son masque dans Batman Forever (1995) de Joel Schumacher ou dans le Saint (1997) de Phillip Noyce, où il est censé être un aventurier caméléon multipliant les déguisements. Sa différence aussi fut de ne pas vouloir ou pouvoir rentrer totalement dans le moule mou de l’industrie malgré les blockbusters. Sans doute aspirait-il à davantage et à mieux. «Je suis frustré parce que ce que je veux faire n’est pas filmé, parce que le réalisateur n’est pas c apable de le faire sortir», dira-t-il dans une interview à Larry King.
Né à Los Angeles en 1959, Val Kilmer devient à 17 ans le plus jeune candidat accepté à la section théâtre du prestigieux conservatoire new-yorkais qu’est Juilliard. Il écrit une pièce, de la poésie, refuse un rôle dans Outsiders (1983) de Francis Ford Coppola, réservoir de futures belles gueules classiques comme Tom Cruise et Patrick Swayze, joue Euripide ou Shakespeare, et débute sur scène à Broadway avec de jolis garçons plus ambigus comme Sean Penn et Kevin Bacon. Il pousse la chansonnette dans son premier grand rôle, une parodie convaincante d’Elvis Presley dans la comédie Top Secret ! (1984) et le cinéma va s’arracher sa blondeur – pour Top Gun, Tony Scott persuade Kilmer, sceptique devant le bellicisme du film, que ses «cheveux auront l’air fantastiques à l’écran». Y rouler des mécaniques en «Iceman», rival de Tom «Maverick» Cruise, lui va très bien, tout comme dans le film d’heroic fantasy Willow (1988) – tous les gamins de l’époque se souviennent de sa manière d’y éructer avec mépris le mot «peck» (pas pour parler de ses pectoraux mais d’une race de personnes de petite taille).
Tête brûlée. Mais sur la route vers la gloire, on sent très vite Kilmer plus ou moins investi selon son intérêt pour le film. Pour The Doors, il y est en pure identification à Morrison, très Actor’s Studio. Dans le western Tombstone (1993) de George Pan Cosmatos, il potasse la vie de son personnage, le pistolero dentiste tuberculeux alcoolique Doc Holliday, et sera salué par la critique tout en ayant du recul sur le genre. «Nous [les Américains, ndlr] aimons les westerns. Nous apprenons à la fois tout et rien d’eux. Nous continuons à nous entretuer de façon inadmissible, écrivait-il dans ses mémoires, I’m Your Huckleberry (titre tiré d’une réplique fameuse du film). C’est pourquoi j’ai saisi l’opportunité de jouer Doc Holliday.» Passé l’excitation d’être Batman (un rôle que son agent lui propose le jour où il décide d’explorer une caverne africaine remplie de chauve-souris), il doit déchanter une fois le costume enfilé et coincé dans le latex.
Mais il n’a pas besoin d’être la star : dans le Heat (1995) de Michael Mann, saturé par la testostérone d’Al Pacino et Robert De Niro, il s’aménage son propre espace et convainc, touche par son rôle de braqueur tête brûlée et infantile et se comporte en groupie avec ses modèles : «Imaginez pouvoir dire “Al et Bob” pour le reste de votre vie. Peu de gens peuvent le faire, répondait-il à des internautes sur Reddit. J’ai vu Bob glousser comme une écolière dans une camionnette la nuit, parce qu’on devait garder le silence pendant qu’ils filmaient dehors…» C’est pour travailler avec Marlon Brando qu’il accepte ainsi l’adaptation de l’Ile du docteur Moreau (1996) de John Frankenheimer, avant tout réputé par ses problèmes de tournage, et qui devient l’acmé de la mauvaise réputation de Kilmer sur les plateaux, notamment accusé d’avoir brûlé un technicien avec une cigarette. Schumacher l’avait traité de «psychotique», Frankenheimer déclarera : «Il y a deux choses que je ne ferai jamais: gravir l’Everest et travailler à nouveau avec Val Kilmer.»
A partir des années 2000, une étoile ternie et un déclassement vers des navets (Mindhunters de Renny Harlin), la télévision (il est la voix de la voiture-robot KITT dans le reboot de K2000) et des seconds rôles plus ou moins remarqués, dont sa prestation de détective gay au côté de Robert Downey Jr dans Kiss Kiss Bang Bang de Shane Black.
Retrouvailles. Après deux ans de rumeurs, il annonçait en 2017 avoir surmonté un cancer de la gorge, nécessitant une opération de la trachée le privant de sa voix et l’éloignant des tournages jusqu’à de pudiques retrouvailles avec Tom Cruise dans Top Gun : Maverick. Val Kilmer faisait un bilan mélancolique de sa carrière dans le documentaire Val (2021) où il se révélait un avide vidéaste amateur, emmagasinant 800 heures de films maison au caméscope. Il est mort mardi d’une pneumonie à l’âge de 65 ans à Los Angeles. Sur le tard, il s’était pris de passion pour l’écrivain Mark Twain, au point de lui consacrer une pièce en 2012. Sans doute souscrivait-il à ses mots: «Le travail est tout ce qu’on est obligé de faire ; le jeu est tout ce qu’on fait sans être obligé de le faire.»
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Val Kilmer, una testa calda, muore
Val Kilmer, volto di punta
Il bellissimo attore degli anni '80 e '90, famoso per i suoi ruoli in “Top Gun”, ‘Heat’ e “The Doors”, ha visto la sua carriera deragliare a causa di una cattiva reputazione. È morto martedì all'età di 65 anni.
3 Apr 2025 - Libération
Léo Soesanto
Molti sono rimasti sbalorditi dalla bellezza e dal carisma di Val Kilmer, e a ragione, durante una partita di beach volley tra piloti di caccia in Top Gun (1986) di Tony Scott o nella sua tormentata incarnazione di Jim Morrison in The Doors (1991) di Oliver Stone. La sua arma segreta era la mascella sporgente e incredibilmente squadrata (come la “parte inferiore appuntita di un cartello di STOP”, secondo un profilo del New York Times del 2020), che lo distingueva dalla media delle star hollywoodiane degli anni '80 e '90, senza per questo etichettarlo come Schwarzenegger - la si vede sporgere dalla maschera solo in Batman Forever (1995) di Joel Schumacher o in The Saint (1997) di Phillip Noyce, dove si suppone che sia un avventuriero camaleontico dai molti travestimenti. Ciò che lo distingueva era anche la sua riluttanza o incapacità di adattarsi completamente allo stampo morbido dell'industria, nonostante i blockbuster. Senza dubbio aspirava a fare di più e meglio. “Sono frustrato perché quello che voglio fare non viene filmato, perché il regista non riesce a farlo uscire”, ha detto in un'intervista rilasciata a Larry King.
Nato a Los Angeles nel 1959, a 17 anni Val Kilmer diventa il più giovane candidato ad essere accettato nel dipartimento di teatro del prestigioso Conservatorio Juilliard di New York. Scrisse un'opera teatrale e una poesia, rifiutò un ruolo in Outsiders (1983) di Francis Ford Coppola, si mise in gioco con future bellezze classiche come Tom Cruise e Patrick Swayze, interpretò Euripide e Shakespeare e fece il suo debutto sul palcoscenico di Broadway insieme con più ambigui ragazzini come Sean Penn e Kevin Bacon. Canta una canzone nel suo primo ruolo importante, una convincente parodia di Elvis Presley nella commedia Top Secret! (1984) e il mondo del cinema inizia ad accaparrarsi la sua chioma bionda: per Top Gun, Tony Scott convince Kilmer, scettico nei confronti del film bellicista, che i suoi “capelli sarebbero stati fantastici sullo schermo”. Il ruolo di “Iceman”, il rivale di Tom “Maverick” Cruise, gli si addiceva perfettamente, come nel film fantasy eroico Willow (1988) - tutti i ragazzi dell'epoca ricordano il modo in cui ruttava con disprezzo la parola “peck” (non per riferirsi ai suoi pettorali, ma a una razza di persone basse).
Testa calda. Ma sulla strada della celebrità, Kilmer è stato presto più o meno coinvolto, a seconda del suo interesse per il soggetto. Nel film The Doors, si identificava puramente con Morrison, in un vero studio d'attore. Nel western Tombstone (1993) di George Pan Cosmatos, ha studiato la vita del suo personaggio, il dentista pistolero alcolizzato e tubercolotico Doc Holliday, ed è stato acclamato dalla critica per la sua distanza dal genere. "Noi [americani] amiamo i western. Da essi impariamo tutto e niente. Continuiamo a ucciderci l'un l'altro in modi inaccettabili", ha scritto nel suo libro di memorie, I'm Your Huckleberry (il titolo è tratto da una famosa battuta del film). Ecco perché ho colto al volo l'occasione di interpretare Doc Holliday". Una volta superata l'emozione di essere Batman (un ruolo che il suo agente gli ha offerto il giorno in cui ha deciso di esplorare una grotta africana piena di pipistrelli), è rimasto deluso una volta indossato il costume e rimasto bloccato nel lattice.
Ma non ha bisogno di essere il protagonista: in Heat (1995) di Michael Mann, saturato dal testosterone di Al Pacino e Robert De Niro, si ritaglia il suo spazio ed è convincente, toccando il ruolo di rapinatore di banche infantile e testardo e comportandosi come una groupie con i propri idoli: “Immaginate di poter dire ‘Al e Bob’ per il resto della vostra vita”, ha risposto agli utenti di Reddit. Non sono in molti a poterlo fare". "Ho visto Bob ridacchiare come una scolaretta in un furgone di notte, perché dovevamo fare silenzio mentre giravano fuori...". Fu per lavorare con Marlon Brando che accettò l'adattamento de L'isola del dottor Moreau (1996) di John Frankenheimer, noto soprattutto per i suoi problemi durante le riprese e che divenne l'apice della cattiva reputazione di Kilmer sui set, accusato in particolare di aver bruciato un tecnico con una sigaretta. Schumacher lo aveva definito “psicotico” e Frankenheimer aveva dichiarato: “Ci sono due cose che non farò mai: scalare l'Everest e lavorare di nuovo con Val Kilmer”.
Dagli anni Duemila in poi, una stella appannata e un declino verso i flop (Mindhunters di Renny Harlin), la televisione (è la voce dell'auto robot KITT nel reboot di K2000) e ruoli da spalla più o meno noti, tra cui l'interpretazione di un detective gay accanto a Robert Downey Jr in Kiss Kiss Bang Bang di Shane Black.
Una reunion. Dopo due anni di voci, nel 2017 ha annunciato di aver sconfitto un cancro alla gola, che ha richiesto un intervento chirurgico alla trachea che lo ha privato della voce e lo ha tenuto lontano dalle riprese fino a una modesta reunion con Tom Cruise in Top Gun: Maverick. Val Kilmer ha tracciato un bilancio malinconico della sua carriera nel documentario Val (2021), in cui ha rivelato di essere un appassionato cineamatore, accumulando 800 ore di filmati casalinghi su videocamera. È morto di polmonite a Los Angeles martedì all'età di 65 anni. In tarda età ha sviluppato una passione per lo scrittore Mark Twain, al punto da dedicargli un'opera teatrale nel 2012. Senza dubbio, ne ha sottoscritto le parole: “Il lavoro è tutto ciò che si deve fare; il gioco è tutto ciò che si fa senza doverlo fare”.
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