DERNIER COUP DE GRIZOU



Après 137 sélections, Antoine Griezmann a décidé de mettre un terme à une carrière internationale de dix ans, riche en émotions et en victoires, mais dont les deux dernières saisons l’ont fatigué.

1 Oct 2024 L'Équipe
DAMIEN DEGORRE

Il faudra sans doute quelques rassemblements internationaux avant de réaliser vraiment, quelques victoires d’envergure, aussi, avant, de tourner la page. Parce que l’annonce d’Antoine Griezmann, hier matin, quelques heures après le «triste» derby de Madrid – un nul 1-1 émaillé d’incidentes en tribunes -, a retenti comme una déflagration, un coup de tonnerre dans le monde du foot français : il ne portera plus le maillot de l’équipe de France. Le meilleur passeur de l’histoire des Bleus (20 passes décisives) n’offrira plus d’autre caviars, il n’enchaînera pas une 138e sélection qui l’aurait rapproché du record d’Hugo Lloris (145) et il ne gratifiera plus le public français de ses prestations délicieuses. À 33 ans, l’actuel meilleur joueur de l’Atlético de Madrid met un terme à sa carrière internationale «le cœur plein de souvenirs», dit-il, et il ne veut conserver que les plus beaux, les plus chaleureux.

Une reflection nourrie 
par un statut affaibli

Cela faisait plusieurs semaines que cette décision mûrissait dans son esprit. Déjà, l’épisode du capitanat qui lui avait échappé, en mars 2023, au profit de Kylian Mbappé, avait marqué un premier virage dans son histoire avec les Blues. Porter le brassard de son équipe nationale lui tenait à cœur, il le voyait comme une forme de couronnement. Ne pas le recevoir a été vécu comme une vraie douleur. Mais «Grizou» avait respecté la décision de Didier Deschamps et, le match d’après, contre les Pays-Bas (4-0, le 24 mars), il ouvrait le score sur un service de son nouveau capitaine et laissait éclater sa joie comme si de rien n’était.

Puis, au sortir de l’Euro 2024, où il avait vu son statut chahuté, sa place d’indiscutable discutée, il avait commencé à s’interroger. Il se demandait s’il avait encore envie de revenir lors des séquences internationales, de relancer la machine et de se projeter vers une nouvelle compétition sans savoir s’il jouissait toujours de la même considération de la part du sélectionneur. À ce moment-là, le quatrième meilleur buteur de l’histoire des Blues (44 réalisations) était marqué, aussi, par l’élimination en demi-finales contre l’Espagne (1-2, le 9 juillet) et ne voulait pas prendre de décision à chaud qu’il aurait regrettée ensuite. Il avait juste confié son ressenti à sa sœur, Maud, sa représentante et sa confidente, puis ne lui en avait plus reparlé de l’été.

En septembre, Griezmann est donc revenu à Clairefontaine. Il n’y avait plus d’Hugo Lloris, depuis longtemps, ni d’Olivier Giroud, ce qui était nouveau, deux de ses grands potes en bleu. Il ne se sentait pas isolé pour autant, mais l’ambiance était différente. Cette trêve internationale fut d’autant moins évidente à traverser qu’il ne devait pas être titulaire pour le premier rendez-vous, contre l’Italie (1-3, le 6 septembre), jusqu’à ce que le forfait de dernière minute de Randal Kolo Muani (malade) le replace dans le onze. Il était passé à côté de son match.

Si l’équipe de France a fini ce rassemblement sur une bonne note avec une victoire sur la Belgique (2-0, le 9 septembre), lui est rentré à Madrid lassé. Un peu plus éprouvé encore. Il eut beau déclarer, lors d’une interview à Téléfoot, le 8 septembre, entre les deux matches du rassemblement, «avoir toujours envie de jouer, de représenter la France», il ne faisait que repousser l’inéluctable dans son for intérieur. Quelques jours après son retour en Espagne, il a ainsi téléphone à sa sœur et lui a dit que l’idée de mettre un terme à sa carrière internationale avait fait son chemin.

Avant, les Bleus étaient son oxygène quand sa situation en club pouvait être contrariante. La tendance était en train de s’inverser et il ne le souhaitait pas. Depuis le début de saison, il était le cœur de l’Atlético de Madrid, avec qui il enchaînait buts et passes décisives, mais n’était ce joueur autour duquel le sélectionneur organisait son équipe, ce qui l’affectait. Au contraire, il était positionné un coup à droite, un autre en soutien de l’attaquant, un autre en peu plus au milieu. Il a même été remplaçant en Allemagne, ce qui ne lui était jamais arrivé depuis que Griezmann était devenu «Grizou».

Désireux de quitter 
les Bleus sans amertume

À part Maud et son épouse, personne d’autre n’était au courant de sa réflexion puis de sa décision, pas même les dirigeants de l’Atlético qui ont appris la nouvelle comme tout le monde, hier matin. Griezmann s’était donné encore quelques jours avant d’appuyer sur le bouton, histoire de voir si ce sentiment n’était que passager. Il ne l’était pas.

Il préférait quitter les Bleus sans aucune forme d’amertume, le plus proprement possible, soucieux, aussi, que sa relation avec Deschamps ne sa délite pas. Il ne se voyait pas, alors, repartir pou une saison pleine en sélection sans certitude sur ce à quoi elle ressemblerait et se dire, à mi-parcours, qu’il fallait arrêter parce que ce n’était plus possible.

La décision fut difficile à prendre. Elle fut actée en fin de semaine dernière avec l’intention de la rendre publique quelques jours avant l’annonce de la prochaine liste pour ne pas la parasiter. Hier matin, au lendemain du derby contre le Real Madrid (1-1) auquel avait assisté Guy Stéphan, l’adjoint du sélectionneur, afin de superviser les Bleus sur le terraine (Griezmann donc, Aurélien Tchouaméni et Ferland Mendy), le numéro 7 des Colchoneros a d’abord tenu à prévenir Deschamps de son choix. Celui-ci ne s’y attendait pas.

«Antoine était et restera
un monument du football
français, l’un des plus
grand jouers de son histoire»
   - Didier Deschamps, sélectionneur de l’équipe de France

Ce la ne l’a pas empêché de lui rendre un hommage appuyé ensuite : «Ce n’est jamais évident de tirer un trait sur l’équipe de France, surtout quand on l’a aussi bien représentée, aussi bien incarnée. Il faut du courage, de la lucidité et de l’honnêteté, et Antoine, dans son analyse, n’en a pas manqué. C’est tout à son honneur. Même si sa carrière en club n’est pas terminée, Antoine était et restera un monument du football français, l’un des plus grands joueurs de son histoire (…) Bien évidemment, c’est avec beaucoup d’émotion que je prends acte de sa retraite internationale. »

Une fois raccroché avec le sélectionneur, Griezmann révélait sa décision sur ses réseaux sociaux, habité d’un mélange de nostalgie et de soulagement. Il ne participera pas à una quatrième Coupe du monde, c’est sûr, mais il peut être assez fier de ce qu’il a accompli. L’équipe de France de ces dix dernières années était la sienne. Il laisse un bel héritage.

***

EN BREF
33 ans
milieu de terrain ou attaquant
137 sélections, 116 titularisations
44 but
30 passes décisives

Palmarès international:
Coupe du monde 2018;
Ligue des nations 2021;
Euro U19 2010;
finaliste de l'Euro 2016 et de la Coupe du monde 2022;
meilleur buteur de l'Euro 2016 (6 buts)

***

84 - Antoine Griezmann détient le record de sélections consécutives en équipe de France, avec 84 apparitions entre août 2017 et novembre 2023. C’est près du double du précédent record, établi par Patrick Vieira (44 entre octobre 1999 et octobre 2002).

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