Chez les hommes, un triplé avec les tripes pour van der Poel


PHOTO JEFF PACHOUD. AFP - Mathieu van der Poel, 
dans un secteur pavé du Paris-Roubaix, dimanche.

En devançant son rival Tadej Pogacar dimanche, le Néerlandais est arrivé en tête de la course pour la troisième fois d’affilée. Un exploit majuscule.

14 Apr 2025 - Libération
Louis Moulin

Apriori, ce n’est pas une riche idée que de s’aligner au départ de Paris-Roubaix montre au poignet. Trente secteurs pavés à parcourir à grande ­vitesse, c’est autant de cahots susceptibles de faire dérailler la trotteuse voir de rayer le cadran, si on est amené à aller au sol, ce qui peut arriver dans l’Enfer du Nord. Ce qui est encore plus dommage quand on parle d’une marque dont le nom indique très imparfaitement la valeur marchande. C’est avec un tel accessoire que le champion du monde Tadej Pogacar (UAE Team Emirates-XRG) s’est aligné, dimanche, pour la première fois sur la course. Mal lui en a pris : une tache de sang est venue maculer son gant gauche une bonne partie de la course, après que le bracelet lui ait peu à peu grignoté le poignet.

Souplesse. Mathieu van der Poel (Alpecin-Deceuninck), lui, s’est pointé sans gants mais avec la même montre : les deux coureurs sont sponsorisés par le même horloger. Pourtant, c’est le poignet intact qu’il s’est présenté seul dans le vélodrome pour remporter un troisième Paris-Roubaix d’affilée. Un exploit majuscule, que seuls Francesco Moser (en 1978, 1979 et 1980) et Octave Lapize (avant la Première Guerre mondiale) avaient accompli avant lui. Et on veut voir dans cette histoire de poignet ce qui a séparé l’impérieux «classicman» néerlandais de l’épouvantail ­slovène. Quelque chose de l’ordre de la souplesse et de la maîtrise, de l’expérience aussi, indispensables pour dompter le plus farouche des cinq Monuments qui jalonnent la saison cycliste.

Le duel entre les deux était ­annoncé, évident tant Pogacar et van der Poel se partagent les ­victoires sur ces courses depuis deux ans. Pas plus tard qu’il y a une semaine, le Slovène venait s’adjuger un deuxième Tour des Flandres… Quand le Néerlandais en a trois dans l’escarcelle. Ce ­Paris-Roubaix avait plus qu’un parfum de revanche : c’était surtout une nouvelle arène pour voir les deux champions s’envoyer des pains. Et même si Pogacar avait déjà eu l’occasion de se frotter aux pavés du Nord pendant une étape du Tour de France 2022, il n’y avait alors que onze parties pavées pour deux heures de moins passées en selle. De la petite bière.

Comme d’habitude dans l’Enfer du Nord, il y a d’abord eu une phase d’attrition, voyant le peloton maigrir au gré des chutes, crevaisons et autres défaillances sur des routes rendues dangereuses par une pluie tombée pendant la nuit, sans parler des incessants changements de vent. Puis la première décision s’est faite dans la mythique trouée d’Arenberg, les plus costauds reprenant l’échappée matinale. Quelques coups de vis plus loin et voilà bientôt cinq hommes en tête, puis seulement trois : Pogacar, van der Poel et son coéquipier Jasper Philipsen, deux fois deuxième les années précédentes à Roubaix. Voici alors Mons-en-Pévèle, une des plus grosses vacheries du parcours, trois kilomètres de chaussée grasse et défoncée. De quoi achever le troisième larron, qui lâchera sur une accélération du Slovène sur le faux-plat à la sortie du secteur. Ils n’étaient plus que deux à se passer des relais pour ne plus se faire revoir.

Bûcheron. C’est alors à 38 kilomètres de l’arrivée, dans le secteur de Pont-Thibault à Ennevelin, que le moment de vérité est intervenu. Tadej Pogacar est parti à la faute en prenant un virage à droite trop large. Sa roue avant est allée buter dans un bas-côté et le maillot arcen-ciel s’est retrouvé à culbuter au ralenti. «J’étais derrière une moto, j’ai cru qu’elle allait tout droit… Je suis arrivé dans le virage très, très, très vite, parce qu’il y avait du vent de dos. Bref, j’allais trop vite», analysera le Slovène après la course. On a du mal à ne pas y voir un certain manque de vécu de la course, d’autant qu’il avait déjà failli s’emplafonner dans un ilot directionnel une heure plus tôt. Un truc qui n’arrive pas à van der Poel, qui connaît le parcours à la perfection et possède une science de la trajectoire et de la chaussée glissante nourrie par le cyclocross – il est septuple champion du monde de la discipline des sous-bois.

Après cet incident, la course n’a plus été la même pour Pogacar. Moins aérien sur les pavés, sans doute échaudé par sa chute, semblant de plus en plus essoré, le Slovène voyait l’écart dépasser rapidement la minute avec van der Poel. Lequel n’en avait aucune idée : il expliquera après la course que sa radio ne marchait plus. D’où ses prises de risques dans les virages et des relances de bûcheron jusqu’aux derniers kilomètres, où il finit par comprendre qu’il avait course gagnée. Pogaçar fait deuxième pour son baptême du feu et Mads Pedersen (Lidl-Trek), un temps au contact des meilleurs mais qui a vu ses chances se dégonfler comme le pneu de sa roue avant, complète le podium.

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