Tournant amer
Tadej Pogacar remonte sur son vélo après sa sortie de trajectoire.
À la lutte avec Mathieu van der Poel pour remporter son premier Paris-Roubaix, Tadej Pogacar a perdu ses chances de victoire dans un virage en plein secteur pavé. Une erreur sans doute liée à son inexpérience sur cette course.
14 Apr 2025 - L'Équipe
ALEXANDRE BARDOT
Dos à la route, debout mais dans l'herbe, un pied planté au milieu du cadre, le vélo dans le sens inverse du parcours. Il est 16h05 sur la route de Paris-Roubaix, et Tadej Pogacar est dans le pétrin. Lancé à pleine vitesse dans la fin du secteur pavé numéro 9, « Pont Thibault à Ennevelin », le champion du monde se retrouve soudainement à l'arrêt en sortie d'un virage en angle droit. Il se retourne, essaie de replacer sa chaîne sur son grand plateau, galère, reçoit l'aide de trois spectateurs puis d'un membre de son équipe, et finit par changer de monture.
Quand il repart, 25 secondes se sont écoulées et Mathieu Van der Poel a pris le large. «Je pense qu'il a mal jugé le virage », dira ce dernier, placé juste derrière Pogacar au moment décisif. L'analyse des images et les données affichées par France 3 permettent de comprendre comment «Pogi» s'est retrouvé sur le bas-côté.
Une accélération sèche dans un virage à angle droit
Rembobinons jusqu'au début du secteur « Pont Thibault à Ennevelin», long d'1,4 km et classé 3 étoiles. Pogacar y entre en deuxième position puis, après avoir parcouru un tiers de cette portion, il accélère sèchement sur la gauche de van der Poel : en 200 m, il fait passer le compteur de vitesse de la télé de 43 à 64 km/h. Espérant décrocher son rival néerlandais, sans doute pour éviter une arrivée au sprint, il continue son forcing sur plusieurs hectomètres, aidé par une route quasi rectiligne. Mais un virage sec approche, situé à exactement 359 m de la sortie du secteur.
Vingt-sept mètres avant ce virage, le compteur de la téléaffiche 58 km/h. Pogacar continue d'accélérer. Neuf mètres avant, il roule à 53 km/h et il continue de tourner les jambes alors que « VDP » stoppe son effort (capture 1).
« Pogi » donne précisément deux coups de pédale de plus que son rival. Ces derniers sont-ils une des raisons de sa sur vitesse à l'entrée du virage? Quand il entre dans la courbe, le Slovène roule en tout cas encore très vite : 48 km/h selon les données de la télé. À l'entrée d'un virage à angle droit sur des pavés, c'est beaucoup. Derrière lui, van der Poel avance quasiment à la même allure. Mais un comparatif entre une capture prise à moins de 10 mètres du virage et une autre à l'entrée du virage montre qu'il roulait un peu moins vite, puisqu'il a perdu un mètre sur Pogacar dans l'approche finale de la courbe.
Cela permet à Van der Poel de prendre le virage un peu plus à l'intérieur que son adversaire (capture 2) et de garder tant bien que mal sa roue avant dans la trajectoire du virage, pendant que celle de Pogacar part vers l'extérieur (capture 3).
On savait Pogacar moins bon pilote que Van der Poel, septuple champion du monde de cyclocross. Mais entre Pont Thibault et Ennevelin, à 38 km de l'arrivée de son premier Paris-Roubaix, c'est sans doute l'inexpérience de cette course qui lui a été fatale.
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