LAPORTE AU BOUT DE LA BOUE


Sans succès depuis plus d’un an, perturbé par les chutes et blessures, le Français est sorti vainqueur hier de la gadoue de Paris-Tours, en costaud, pour s’offrir une classique qui lui permet de tourner avec plus de légèreté la page de 2024.

"On se demande toujours si on va à nouveau réussir à lever les bras, 
on n’est sûr de rien"
   - CHRISTOPHE LAPORTE

"Les Jeux, un moment fort, extraordinaire, qui a un peu sauvé ma saison, 
mais pas une victoire"
   - CHRISTOPHE LAPORTE

7 Oct 2024 - L'Équipe
PIERRE MENJOT

TOURS – On ne reconnaissait rien parmi ces visages maculés de boue, ces vélos crottés, ces maillots monochromes, jusqu’à ce qu’une bouteille d’eau vidée sur le museau des uns et des autres permette d’y voir plus clair. La ligne d’arrivée de Paris-Tours ressemblait hier à celle d’un cyclo-cross au coeur de l’hiver, la faute à cette pluie fine qui a transformé les chemins de vigne en champs de patates et offert une course qui s’est décantée plus loin qu’à l’accoutumée (lire par ailleurs).

Mais dans cette mêlée de coureurs enfin sortis de la mine après cinq heures d’efforts, Christophe Laporte, même pas encore nettoyé à grands coups de lingettes, était aisément reconnaissable. Car il était celui qui souriait. Le Varois n’y croyait pas vraiment, il avait même envisagé un temps de plutôt s’aligner aux Mondiaux de gravel remportés par Mathieu van der Poel hier (lire par ailleurs), mais son équipe, Visma-Lease a bike, avait encore besoin de lui une dernière fois, dans cette saison si compliquée. Et Laporte s’est imposé. «Je ne l’espérais plus trop cette victoire, mais voilà, elle est venue, j’ai bien fait de persévérer», appréciait-il enfin.

Voilà plus d’un an et son titre européen, le 24septembre 2023 aux Pays-Bas, que cet homme de classiques n’avait pas levé les bras, à cause de soucis multiples qui ont plombé sa première partie de saison où il a enchaîné les forfaits. «Ça a été une année com pliquée, rembobinait-il volontiers hier, comme pour mieux savourer son succès. J’ai eu pas mal de pépins (grippe intestinale, opération du périnée) qui m’ont fait manquer les classiques, des courses qui me tenaient à coeur comme Gand-Wevelgem ou À Travers la Flandre. Je les avais gagnées l’an dernier, j’allais démarrer avec le dossard n° 1, le maillot de champion d’Europe, et je n’ai même pas pu participer. Ensuite, je suis allé au Giro, puis je chute et j’abandonne (non-partant sur la 8e étape). Donc je me suis préparé pour le Tour.»

Adieu le printemps dont il rêvait, ce rôle de leader unique à Milan-San Remo (abandon) et de coureur protégé à Paris-Roubaix, où il est arrivé sans préparation idéale (25e). Oubliés les rêves de remporter un monument avec le maillot étoilé, son objectif annoncé au coeur de l’hiver, une suite logique après deux saisons de progression linéaire depuis son arrivée chez les Néerlandais, remplies de succès (32 au compteur désormais).

Au contraire, Laporte (31 ans) a commencé à s’interroger. «Bien sûr qu’il y a eu des moments de doute, a-t-il avoué. AprèsleChampionnat d’Europe (9e, le 15 septembre), je me suis rendu compte que je n’avais pas gagné depuis un an, ça ne m’est pas arrivé souvent dans ma carrière. On se demande toujours si on va à nouveau réussir à lever les bras, on n’est sûr de rien, car j’ai eu les occasions et je n’ai pas réussi à les saisir, encore la semaine dernière aux Pays-Bas où je fais 3e (de l’Elfstedenrace).» S’il est resté dans un rôle d’équipier au Tour de France en juillet, poisson-pilote de Wout Van Aert lors des sprints, garde du corps de Jonas Vingegaard dans les étapes accidentées, et notamment celle des chemins de vigne autour de Troyes (9e étape), c’est en août que le garçon formé à Hyères a revu le jour dans la Ville Lumière.

Aux Jeux de Paris, il avait sprinté au cas où, sans savoir pour quelle place il se battait, et décroché la médaille de bronze de la course en ligne, derrière Remco Evenepoel, titré, et Valentin Madouas, en argent. «Un moment fort, extraordinaire, qui a un peu sauvé ma saison, mais pas une victoire, resituait-il. Et depuis, les jambes étaient là mais niveau motivation, c’était difficile, après tous les aléas de cette année. J’avais hâte que la saison se termine, de fermer le chapitre 2024 avant d’entamer celui de 2025, et maintenant je suis encore plus heureux que ça se finisse avec cette victoire, une classique qui me tient à coeur, que je regardais à la télé quand j’étais petit. »

Taillée pour ses qualités de pilote, encore davantage depuis l’apparition des chemins de vigne en 2018, Paris-Tours réussissait pourtant peu au Varois, souvent malchanceux, une seule fois dans le top 10 lors de ses neuf participations précédentes (6e l’an dernier). En costaud, sorti au bon moment puis lucide au moment du sprint, l’ancien de Cofidis a enfin réussi à faire tourner la chance en sa faveur. «Il faut savoir rester concentré et motivé», répétait-il hier.

Une belle leçon en vue de 2025 où il partira encore en quête de gloire sur les pavés belges et Paris-Roubaix, la course de ses rêves où la malchance, là aussi, le poursuit depuis plusieurs années. Mais hier, Laporte a un peu mieux appris à chasser la fatalité.

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