Punchy Martinez


En difficulté toute la semaine, le Français s’est remis à l’endroit en allant remporter la dernière étape du Dauphiné. Sa troisième victoire de la saison, toutes en World Tour, valide un travail hivernal spécifique.

"J’ai noté que son deuxième relais, il le prenait un peu moins fort, 
j’ai vu sa tête, qu’il était un peu moins bien, 
moi c’était plutôt l’inverse, donc j’ai essayé d’attaquer et voilà"
   - LENNY MARTINEZ
     AU SUJET D’ENRIC MAS

16 Jun 2025 - L'Équipe
ALEXANDRE ROOS
DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL

MONT-CENIS (SAVOIE) – Beaucoup d’étoiles se sont télescopées hier dans le ciel du cyclisme français et, plus que la haie d’honneur au départ le matin ou la meule de beau fort de 40 kilos offerte à l’arrivée, les victoires de Lenny Martinez au Dauphiné, de Romain Grégoire en Suisse et de Paul Magnier en Belgique furent la plus belle manière de dire au revoir à Romain Bardet, qui a tiré sa révérence à 34ans sur le plateau du Mont-Cenis, un magnifique endroit pour un crépuscule.

Beaucoup de petits coeurs se sont serrés au moment de voir l’Auvergnat franchir sa dernière ligne, tant il a été un point d’ancrage pendant quatorze ans, au long d’une carrière où il aura réussi à mener sa quête obsessionnelle du Tour de France, sans y perdre son âme. Il aura incarné le mariage de la science et de la romance, de l’ascèse et du panache, et au moment où les première sont trop pris le pas sur les seconds, il a préféré arrêter, mais il sera ravi de constater que la continuité est assurée, que les héritiers ont éclos.

C’est beau de voir ce bouillonnement, auquel on peut ajouter Kévin Vauquelin, 2e en Suisse hier, qui est la garantie de beaux jours à venir et il ne faudra pas l’oublier quand les temps seront plus moroses pour les coureurs français. Le vivier est là, la formation en France fonctionne et chacun des grands talents naissants est en train de se développer, d’affiner son registre et son caractère. Lenny Martinez, lui, devient petit à petit un méchant gagneur, à 21 ans, un redoutable finisseur, malin de surcroît. Au moment où la notoriété de Paul Seixas, brillant 8e du Dauphiné à seulement 18ans, s’est accrue de manière exponentielle cette semaine, il est intéressant de noter que la pression populaire enferme déjà le jeune Lyonnais dans la chasse au classement général, on lui demande de gagner un grand Tour, et devinez lequel de préférence, alors qu’on embête beaucoup moins Lenny Martinez avec cela.

Mais les attentes ne font pas les carrières et rien ne dit que le grimpeur de Bahrain ne finira pas un jour sur le podium des Champs-Élysées. En attendant, il gagne. Il avait pourtant débarqué au départ du Dauphiné avec plutôt des visées sur le classement final, mais il prit des grandes claques dans les deux premières étapes alpestres, peut-être en raison d’un stage en altitude mal digéré, peut-être parce que cela forçait sa nature, lui qui a encore un peu de peine à enchaîner les jours en restant toujours branché. Oubliée la bagarre avec les meilleurs, il se jeta dans l’échappée hier, ce qui n’était pas une mince affaire car à peu près tout le monde voulait y être, jusqu’à se retrouver en tête à tête avec Enric Mas dans le col du Mont-Cenis. On pensait le Français proche de la rupture face à l’expérimenté Espagnol (30ans), mais c’est lui qui le déposa à 8km de l’arrivée. «J’étais un peu à fond dans sa roue quand il a attaqué, j’ai failli exploser complet, décryptait

Martinez. Il s’est mis un peu dans le rouge, il montait super vite tandis que moi, je ralentissais toujours quand je passais mes relais. À un moment, je me suis dit qu’on allait essayer d’y aller à deux ( à l’arrivée), qu’il fallait se mettre à fond complet. J’ai noté que son deuxième relais, il le prenait un peu moins fort, j’ai vu sa tête, qu’il était un peu moins bien, moi c’était plutôt l’inverse, donc j’ai essayé d’attaquer et voilà.»

Sur le Tour dans trois semaines avec la même approche

Derrière, Tadej Pogacar et Jonas Vingegaard ne lancèrent jamais vraiment la bataille, et voilà un troisième succès cette saison, tous acquis en World Tour. Pour obtenir ces résultats, Martinez a travaillé cet hiver la filière des efforts courts, entre 30’’ et 1’, qui lui a donc permis de déposer tout le monde, notamment Matteo Jorgenson, à 200m du haut de la côte Saint-André sur Paris-Nice, de battre au sprint Joao Almeida en Romandie et donc de planter Mas hier. «Avec mon nouvel entraîneur, on a un peu changé mon approche, détaillait Martinez hier après l’arrivée. Il a vu que j’avais de bonnes capacités sur ces efforts très courts, voire un peu punchy. On a énormément bossé ça, et je me sens aussi plus en confiance sur les arrivées, ça ne m’aurait pas posé problème si j’étais arrivé avec Enric Mas au sprint. C’est bien de bosser ce côté punchy car c’est ce qui peut faire la différence entre gagner et ne pas gagner.»

Il se présentera au départ de son deuxième Tour de France dans trois semaines avec la même approche. Pas besoin de lui parler du classement général, il veut une victoire d’étape. Et c’est très bien comme cela.

***


Paul Seixas, grimaçant mais heureux hier à l’arrivée.

Seixas a «souffert comme jamais»

Victime d’une chute dans l’ascension du col du MontCenis, le jeune coureur a vécu une fin d’étape difficile. Il finit 8e du général et premier Français.

Ar. V.

La semaine presque parfaite de Paul Seixas a connu son premier gros contretemps, hier. Le jeune grimpeur de Decathlon AG2R La Mondiale a chuté à 10,5 kilomètres du terme de la dernière étape, dans l’ascension du col du Mont-Cenis. «Un coureur m’a fauché, ce n’était pas de chance », a-t-il estimé après l’arrivée. Tombé à basse vitesse dans cette montée, le Lyonnais de 18 ans a toutefois été décroché du groupe des favoris, dont il faisait jusqu’alors partie. S’il a goûté au goudron avant de remonter sur son vélo, dont le guidon a été tordu, Seixas, 6e du général à 6’50ʼʼ de Tadej Pogacar au départ de l’étape, a reculé au 8e rang, à 8’25ʼʼ du Maillot Jaune, mais reste le meilleur Français. L’Américain Matteo Jorgenson (6e, Visma-Lease a bike) et l’Espagnol Enric Mas (7e, Movistar), présents dans l’échappée, l’ont dépassé sur le fil. « C ’était extrêmement dur. J’étais très, très mal. Toutes les montées, j’ai souffert comme si c’était la dernière, a confié la pépite de Decathlon AG2R La Mondiale. J’avais des sensations de merde et ça roulait à bloc. Une troisième journée difficile de suite, ça commençait à faire beaucoup trop. Cette semaine, j’ai souffert comme jamais, mais beaucoup appris.» Avant d’ajouter, épuisé et ravi : « Je suis très content de finir 8e. L’équipe a tout sacrifié pour me permettre de faire une bonne place. Je les remercie tous.»

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Trois as et un valet

L'Équipe
PIERRE MENJOT

Les quatre premiers du Dauphiné avancent démasqués vers le Tour. Alors que Tadej Pogacar et Jonas Vingegaard semblent au-dessus de Remco Evenepoel, Florian Lipowitz a montré qu’il pourrait jouer un rôle.

Pogacar sur motivé Remco Evenepoel.

Après des premiers jours hésitants, le Slovène a vite remis les choses au clair en montagne: le plus fort, c’est lui. Vainqueur à Combloux en reprenant le Maillot Jaune, deuxième succès samedi, à chaque fois en décrochant Vingegaard en à peine 100 mètres, et une journée plus tranquille hier où il a suivi le Danois sans forcer. « Une semaine avec beaucoup de positif, et le peu de négatif s’est transformé en positif, expliquait-il en frétillant, hier. Gagner le Dauphiné, c’est un objectif de coché dans ma carrière (riche de 99 victoires désormais) et un boost mental pour toute l’équipe en vue du Tour. » En stage à Isola 2000 ces prochaines semaines avec ses équipiers d’UAE, avant de couper quelques jours juste avant le départ de Lille, il travaillera notamment le contre-la-montre. « Je sais ce que j’ai à faire », affirmait-il en souriant.

Vingegaard autocentré

Le Danois a bien tenté d’attaquer hier, pour la forme, et Pogacar a été le seul à le suivre. Les deux hommes ont ensuite discuté et choisi de ne pas se dépouiller pour chercher la victoire d’étape. Le leader de Visma-Lease a bike quitte le Dauphiné avec des enseignements clairs : son équipe est solide (Jorgenson termine 6e), lui aussi (2e du chrono notamment), mais paraît inférieur à son rival. « On s’intéresse à nous, au process, pour être aussi forts qu’on peut au Tour, peu importe ce qu’il s’est passé ici », disait-il hier après sa 2e place au général, à 59 secondes du champion du monde. Lui ira se préparer à Tignes, comme d’habitude, avec sa garde rapprochée (Van Aert et Yates en plus de ceux présents cette semaine). « Je dois travailler un peu tout, imaginait Vingegaard. L’accélération, les ascensions plus longues. J’espère franchir une marche de plus d’ici au Tour. »

Lipowitz révélé

Sa deuxième place sur ParisNice en mars, sans les ogres, était un premier indice. Cette semaine, avec un plateau toute autre, a confirmé que Florian Lipowitz était à prendre très au sérieux sur toutes les courses où il s’alignerait désormais. Y compris le Tour, puisque l’Allemand a lui-même glissé qu’il disputerait la Grande Boucle pour la première fois, dix mois après sa 7e place à la Vuelta. « En arrivant ici, je n’aurais jamais imaginé être aussi haut », savourait-il hier après sa 3e place au général (à 2’38’’), maillot blanc en prime. L’ancien biathlète va rejoindre à Tignes Primoz Roglic, leader annoncé sur le Tour, mais il devrait jouer plus que les domestiques, dans une équipe Red Bull-BoraHansgrohe multicartes (Dani Martinez, Vlasov). « Il a franchi une nouvelle étape, il est plus stable, plus solide et ne commet pas d’erreurs », loue Rolf Aldag, son directeur sportif.

Evenepoel rassuré

Maillot Jaune après sa victoire éclatante au contre-la-montre, le Belge a tout perdu quand la montagne s’est invitée, remis à sa place par le duo infernal, mais aussi débordé par Lipowitz et par d’autres rivaux, parfois. « Je n’ai pas été à mon meilleur niveau, mais aujourd’hui ( hier), c’était mieux, positivait-il au sommet du Mont-Cenis. C’est plus ou moins un copier-coller de l’an dernier ( 7e du général contre 5e cette année, vainqueur du chrono). » Il y a un an, le double champion olympique revenait d’une lourde chute au Pays basque et sa progression avait été réelle jusqu’au Tour (3e et une victoire d’étape). Pour un bis repetita? « Je vais essayer de travailler sur les changements de tempo, quand ça roule vite et qu’il faut ensuite y aller à fond pendant quatre, cinq minutes, jugeait le leader de Soudal QuickStep, en stage à Tignes avant le Tour. J’espère me rapprocher des deux ( Pogacar et Vingegaard). »

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