Alaphilippe : « Le cyclisme “old school” n’est pas fini »
Alaphilippe à fond sur la fin de saison
Alaphilippe à fond sur la fin de saison À 33 ans, et à quinze jours du Mondial, le Français a prouvé en remportant le Grand Prix de Québec vendredi qu’il restait de la place au sommet pour lui et pour les derniers garants d’une approche moins robotisée du vélo.
“Je m’entraîne très dur, mais je ne pourrais pas mener la vie de certains jeunes.
J’ai besoin de cette liberté, de cette joie de vivre ''
14 Sep 2025 L'Équipe
LUC HERINCX
MONTRÉAL (CAN) – Clin d’oeil du destin, son fils Nino (4 ans) a réussi à faire du vélo tout seul pour la première fois hier matin après avoir vu la victoire de son papa la veille. Chambré sur son âge par Alberto Bettiol (XDSAstana) enconférence depresse– «Onaété battus par un vieil homme » –, Julian Alaphilippe est conscient d’être « plus proche de la fin que du début », mais le double champion du monde (2020, 2021) a encore les cannes et la gnaque pour mater la jeune garde. À 33 ans, il en a fait la démonstration à Québec, vendredi, où, pour décrocher sa première victoire de la saison avec sa nouvelle équipe, Tudor, il abernépuis séché ses compagnons d’échappée. Un triomphe « spécial » pour lui après des mois de hauts (un peu) et de bas (surtout), qu’il a racontés durant le trajet entre la Vieille Capitale et Montréal. Troisième du Grand Prix l’an dernier, il le disputera de nouveau ce soir. Et on devrait le retrouver au Championnat du monde au Rwanda le 28 septembre (la liste des Bleus est attendue lundi ).
- Il paraît que vous vous étiez mis une pression de dingue pour gagner avant la fin de la saison. Pourquoi cette obsession ?
Une pression de dingue, oui et non. J’ avais vraiment envie de finir la saison de la plus belle des manières. J’ ai vécu un Tour de France un peu en dents des cie (56e), j’ ai été malade une semaine avant, puis encore après… La décompression a été un peu compliquée, l' équipe m' a accordé du temps alors que j’ aurais dû enchaîner à la C la sic a San Sebastian. Puis les sensations à l’ entraînement se sont améliorées et je me sentais prêt pour ce week-end au Canada.
- La saison blanche vous faisait peur ?
Non, j’ arrivais à mer assurer par mon travail pour l’ équipe. Mais entant que leader, une victoire restait importante à accomplir. Et y être arrivé de cette manière, c’ est encore mieux: l’ équipe a contrôlé toute la première partie, il afallu jouermalin, êtrefort… J’ avais l’ ordre de rester calme, c’ était un peu contre-nature, mais ça fait partie du jeu des avoir gérer son réservoir d’ énergie.
- Pourquoi est-ce contre-nature ?
Parceque je suis généreux dans l’ effort, j’ai toujours pris du plaisir à rouler pour mes coéquipiers, par exemple. Mais quand on voit le niveau du peloton actuel, si j’ avais collaboré d’ entrée de jeu, je n’ aurais sûrement pas eu l’ énergie pour m’ imposer. Il faut prendre sur soi, penser à la performance. Pendant des années, je n' ai pas compté mes coups de pédale. J’ ai parfois été trop généreux et j’ ai manqué de résultats.
- Vos compagnons d’échappée vous en ont-ils voulu ?
Certains m’ ont demandé pourquoi je ne roulais pas. Je leur ai expliqué: “si tu gagnes, je serai content pour toi. Mais c’ est un ordre de mon directeur sportif.” Onavait( Marius) Mayrhofer à l’ arrière et il n’ était pas prévu que je sois à l’avant si loin del’arrivée, je devaisgérer mes efforts. Au final, même les coureurs qui m’ avaient dit quelquechose sur le moment sont venus me féliciter à la fin. Après, je ne vais pas répéter plein de fois ce genre de scénario. Ce succès a suscité chez vous une grande émotion...
C’ était spécial. Je n’ avais pas gagné depuis l’étape du Giro (la 12e) l’an dernier, j’ai rejoint une nouvelle équipe, j’ ai 33 ans, j’ ai encore mes qualités, mais c’ est plus dur qu’ il y a quelques années… Je voulais prouver que je suis encore là, que je peux gagner une des courses les plus difficiles. J’ai vulajoie de mes coéquipiers, de mon staff. C’ est pour ça que je continue le vélo.
- Vous êtes-vous parfois dit que vous étiez “fini” ?
Non, non! Sinon j’ aurais arrêté, je n’ aurais pas signé dans une nouvelle équipe. Je sentais que j’ avais encore des choses à apporter.
- Quels défis vous stimulent encore ?
J’ ai envie de faire une belle fin de saison (il coupe )... mais d’ abord de profiter de ce moment-là. C’ est de plus en plus rare. Je ne pense pas encore à la saison prochaine, je reste foc us sur celle-ci.
- Mais vous pensez évidemment au prochain Mondial? Avec Valentin Madouas, vous êtes les gardiens de l’état d’esprit d'une équipe de France triomphante ?
Bien sûr, et ça reflète le fait que les années passent vite… Mes deux titres ne remontent pas à si loin mais une jeune génération arrive. Je fais partie des derniers coureurs qui ont vécu le cyclisme d'avant-Covid. Je suis confiant pour l’ équipe de France, on a un très bon réservoir de jeunes et j’ espère, avecChristophe( Laporte) et Valentin (Madouas), qu’ on va transmettre à cette génération. C’ est ce qui fait la beauté de cette équipe.
- C’était quoi, le cyclisme d’avant-Covid ?
Ah ça, c’ est un long débat… Là, ça roule plus vite, les jeunes coureurs sont robotisés à propos de l’ entraînement, la nutrition, le sommeil, les stages en altitude. Tout est plus millimétré. Et pour eux, c' est normal. Même si je suis très pro, je n’ aspire pas à cela. Dans l’ équipe, avec MatteoTrent in, on est un peu les deux derniers représentants de cette génération. Et pourtant vous gagnez encore…
Oui, d’ailleurs j’ai écrit hier ( vendredi) sur mes réseaux sociaux que le cyclisme old school n’ est pas fini. Je suis encore capable de gagner sans suivre un plan exact. Je m’ entraîne très dur, mais je ne pourrais pas mener la vie de certains jeunes. J’ ai besoin de cette liberté, de cette joie de vivre… De ce plaisir, surtout! C' est l' un des moteurs de la performance. Je suis papa depuis quatre ans et ça a changé ma vie. Je veux garder ce côté simple, ma vie de papa tout en étant coureur. Il faut vivre, ne jamais oublier qu’ on ne fait que du vélo et qu’ il y a la vie à côté .»
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L. He. à Montréal
À l’offensive à Québec alors qu’il avait suggéré plutôt un rôle d’équipier pour « Jhonny » Narváez et Brandon McNulty, Tadej Pogačar a fini par se résigner dans le dernier tour, le parcours n’étant pas assez sélectif pour lui permettre de lâcher ses sangsues. Pour la première fois depuis trois ans en dehors du top 20 (29e), le champion du monde sera plus à son aise à Montréal, qui accueillera d’ailleurs les Mondiaux en 2026. « C’est plus une course de grimpeurs » , sait le champion du monde, deux fois vainqueur (2022 et 2024) du second Grand Prix canadien. « On aura tous le goût du sang dans la bouche », s’est marré Arnaud De Lie (Lotto), qui anticipe comme tout le monde que l’équipe UAE Emirates-XRG va maintenant passer en mode lessiveuse.
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