Tous fans du Cav
Le 35e succès de Mark Cavendish sur le Tour a permis au peloton d’exprimer son admiration pour cet immense sprinteur.
"Quelque chose de fou, de fantastique.
Cette année, on est venus ensemble
très motivés, et on l’a fait!"
- DAVIDE BALLERINI COÉQUIPIER DE MARK CAVENDISH
"Un coureur qui a tout donné au sprint,
qui en est un vrai passionné,
qui a démarré par la piste,
ce qui lui a donné ce sens des trajectoires"
- ANDRÉ DARRIGADE, VAINQUEUR DE 22 ÉTAPES SUR LE TOUR
4 Jul 2024 - L'Équipe
DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL - RÉGIS DUPONT (avec L. C. et Th. P.)
SAINT-VULBAS (AIN) – Pendant que Mark Cavendish enchaîne les interviews derrière la zone protocolaire, un enfant joue au pied du podium avec son frère et sa soeur, maillot d’Astana sur le dos et médaille autour du cou. Elle est trop grande pour lui et elle le restera pour toujours. C’est celle du vainqueur de la 5e étape du 111e Tour de France, celle du record absolu de succès sur l’épreuve : en s’imposant au sprint devant la référence Jasper Philipsen, le champion de l’île de Man a maintenant gagné 35 fois sur la plus grande courseparétapesaumonde.Une de plus qu’Eddy Merckx.7e étape, Fougères. Après deux ans difficiles chez Quick Step, le Britannique doute. « Il avait toujours besoin d’être rassuré », dit son coéquipier Sylvain Chavanel. Il se libère enfin sur le Tour en dominant André Greipel (en vert), Peter Sagan (à droite) et John Degenkolb.
Alors, quand Alexandre Vinokourov, son manager chez Astana, lui demande s’il a conscience de ce qu’il se passe, il avoue qu’il n’en est pas certain. Il est pourtant tombé dans les bras de ses enfants et de son épouse quelques secondes après cet accomplissement. « Et je peux vous assurer qu’ils réalisent, eux, à part peut-être le dernier qui a continué à jouer pendant la course, sourit Peta Todd Cavendish. Je suis si fière de lui, si fière des garçons, de la façon dont ils ont travaillé pour lui aujourd’hui, ça montre à quel point ils croient en lui. Ce n’était pas une affaire facile, il y a eu des hauts très hauts et des bas très bas, mais lui ne s’est jamais résigné. »
Un peu plus tard, en rejoignant le car de l’équipe, elle lâchera un « Fuck ! » , qui exprime encore mieux son immense satisfaction. Un peu comme Davide Ballerini, qui, en descendant de son vélo, a évoqué devant les micros « quelque chose de fou, de fantastique. Je ne sais pas s’il était obsédé mais quand vous êtes en passe de marquer l’histoire, vous l’avez toujours un peu à l’esprit. Il a continué à travailler pour réussir ça après la grosse chute de l’année passée (fracture d’une clavicule). Cette année, on est venus ici ensemble très motivés, et on l’a fait ! » Deux secondes plus tard, à peine remontées les quelques marches du véhicule Astana, il explose d’un énorme « Yes » !
UnpeucommeRomainBardet samedi à Rimini, la performance de Cavendish a globalement ravi un peloton impressionné par l’acharnement du Britannique. Largué à la moindre montée au début de ce Tour il s’est accroché, a bouclé les deux premières étapes dans les délais. Et, après une première occasion ratée à Turin (113e), a su naviguer de droite à gauche dans la dernière ligne droite pas si droite de Saint-Vulbas. « Il entre encore un peu plus dans la légende, constate Arnaud De Lie (Lotto Dstny, 4e). C’est vraiment un bon gars. Tu peux avoir des discussions très agréables avec lui. Au Tour de Suisse, je l’ai vu souffrir souvent, et le voir gagner ici c’est vraiment génial. Il fait tout à la perfection. Il a quasi 40 ans, il a même l’étape sur le guidon comme si c’était son premier Tour de France. Avoir une passion comme ça à 39 ans, c’est vraiment incroyable, chapeau à lui. »
« C’est un rêve qui se réalise, résume Vinokourov avant de quitter la ligne. C’est énorme, magnifique même. » Le directeur sportif a enfourché son vélo pour parcourir les quelques centaines de mètres entre le car Astana et la zone d’arrivée, où même le directeur du Tour fait un détour pour saluer l’événement : « C’est la première fois que je vois d’autres sprinteurs avoir le sourire bien qu’ils aient été battus, en pensant notamment à Alexander Kristoff (3e) et De Lie. C’est arrivé aujourd’hui parce que c’est Mark Cavendish », assure Christian Prud’homme. Qui rappelle l’épisode du Tour d’Oman, il y a plusieurs années : « Je lui demande : “Tu connais André Darrigade ?” Il me répond : Darrigade 22, Leducq 25, Hinault 28, Merckx 34 ! Il connaissait déjà ça par coeur. Il gagne à nouveau seize ans après sa première victoire sur le Tour, c’est le Poulidor des sprinteurs, un pur talent, une carrière exceptionnelle.» « Ça classe Cavendish tout en haut des plus grands sprinteurs de l’histoire du cyclisme, assure André Darrigade (95 ans). C’est un coureur qui a tout donné au sprint, qui en est un vrai passionné, qui a démarré par la piste, ce qui lui a donné ce sens des trajectoires et cette puissance qui le caractérisent. Il y a quelques années, lors du Tour 2013, nous avions participé à une émission de télévision ensemble à Nice, quelques jours après le départ de l’épreuve en Corse. Nous avions discuté un peu et j’avais été surpris de voir qu’il connaissait très bien ma carrière. Je lui avais alors raconté que j’avais gagné une course sur l’île de Man (le Manx Trophy). C’était en 1960, et j’avais le maillot de champion du monde sur le dos. Le lendemain de cette discussion, je me rappelle qu’il avait réglé tout le monde au sprint à Marseille ( 5e étape)… »
À Saint-Vulbas, Cavendish a gagné l’estime définitive de ses aînés et de ses cadets : « Quand j’étais petit, je regardais Mark à la télé avec mes amis et mon frère et c’était le héros de tellement de gens, il roulait avec une telle classe, s’est enthousiasmé Tadej Pogacar. On est devenus plutôt bons copains. Il est venu me voir dans la zone protocolaire et il m’a demandé de ne pas battre son record. Je le lui laisse ! » Il y a maintenant 21 victoires d’écart entre Cavendish et l’impétueux Slovène (25 ans). Mais on conseillerait bien au vétéran de régler un ou deux sprints de plus, ces prochains jours, pour s’assurer une marge suffisante.
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