Trois chats noirs portebonheur
Si les Black Cats de Sunderland réussissent un début de saison aussi abouti en Premier League, c’est en grande partie grâce à trois personnalités influentes du club.
20 Nov 2025 - L'Équipe
PIERRE-ÉTIENNE MINONZIO
Samedi, le promu Sunderland se déplacera à Fulham avec l’étiquette de favori. Quatrièmes de Premier League, les Black Cats enchaînent les performances convaincantes, après s’être imposés à Chelsea (2-1, le 25 octobre) et avoir contenu le leader Arsenal (2-2, le 8 novembre). Une réussite inattendue, quand on songe que, avant le début de saison, seuls cinq joueurs de l’effectif avaient goûté à l’élite anglaise et qu’il faut remonter à l’exercice 2008-2009 pour trouver la trace d’un club issu du Championship comptant plus de points que Sunderland cette année, après 11 journées (Hull City à l’époque). Un petit miracle qui doit beaucoup à deux Français et à un Suisse.
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FLORENT GHISOLFI
40 ans, directeur sportif.
L’architecte de l’été
Lorsqu’il a commencé à oeuvrer, courant juin, comme directeur du football de Sunderland, Florent Ghisolfi s’est d’abord attaché, en compagnie notamment du directeur sportif Kristjaan Speakman, à négocier la venue du Strasbourgeois Habib Diarra, officialisée le 1er juillet. Le coup d’envoi d’un mercato ambitieux, qui a vu le club attirer 15 recrues pour une somme estimée par Transfermarkt à 187 M€, soit le 9e plus gros total de dépenses de la Premier League cet été. « Ce montant peut sembler élevé mais il faut prendre en compte qu’on avait auparavant très peu investi dans les transferts, souligne-t-on au sein du club. Si on regarde le classement des effectifs qui ont coûté le plus cher, on se situe seulement au 22e rang anglais, derrière des clubs de Championship, Southampton et Leicester. » Mais si le mercato de Sunderland a marqué les esprits, c’est aussi par sa dimension francophone (8 des nouveaux venus comprennent notre langue) et en raison des choix judicieux de Ghisolfi. À l’exception de Simon Adingra et de Bertrand Traoré, toutes les recrues ont fait forte impression, depuis le gardien néerlandais Robin Roefs (qui compte aujourd’hui le meilleur pourcentage de tirs arrêtés au sein des portiers du Championnat anglais, avec 79,2 %, selon Opta) jusqu’à son compatriote, l’attaquant Brian Brobbey (qui exploite au mieux son faible temps de jeu), en passant par le défenseur français Nordi Mukiele (qui a remporté 69,8 % de ses duels, soit le troisième meilleur total de PL en 2025-2026). L’ex-Parisien est représenté par Meïssa Ndiaye, qui conseille quatre autres Black Cats, ainsi que l’entraîneur Régis Le Bris, ce qui a suscité des interrogations sur l’éventuelle influence qu’aurait cet agent sur le fonctionnement de Sunderland. Une théorie balayée en privé par Ghisolfi, qui rappelle que deux des joueurs accompagnés par Ndiaye (Abdoullah Ba et Timothée Pembélé) n’ont pas disputé une minute cette saison.
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GRANIT XHAKA
33 ans, Suisse, milieu de terrain.
Le taulier d’emblée
Au sein du contingent ayant intégré Sunderland durant l’intersaison, Granit Xhaka s’est particulièrement mis en valeur, au point que Wayne Rooney, dans son podcast, l’a désigné la semaine dernière « comme la meilleure recrue de l’été en PL » . Car le Suisse de 33 ans, qui a débarqué en provenance de Leverkusen contre 15 M€, brille à la fois sur le terrain et en dehors, à travers l’exigence qu’il diffuse auprès de ses coéquipiers, alors que les Black Cats débutent en moyenne avec le deuxième plus jeune onze de départ du Championnat, derrière Chelsea.
« Granit apporte une mentalité de gagnant, même dans les petits jeux à l’entraînement. Si la qualité de la séance n’est pas bonne, il va gueuler » , rappelait récemment dans nos colonnes l’attaquant Wilson Isidor, qui a ajouté sur RMC: « On a peur de le décevoir. » Tandis que le milieu Enzo Le Fée a récemment déclaré à son sujet: « C’est le meilleur capitaine que j’ai eu dans ma vie. »
Dès son arrivée à Sunderland, Xhaka a en effet porté le brassard, conformément à ce qui lui avait été proposé lors des discussions qu’il avait eues avec la direction du club cet été. « Dès qu’on lui a dit qu’il pourrait être capitaine, ses yeux avaient brillé » , indique-t-on en interne, où l’on précise qu’un autre Suisse, le propriétaire des Black Cats, Kyril Louis-Dreyfus, a joué un rôle décisif dans ces négociations: « Kyril s’est démené pour convaincre Granit, mais aussi sa famille. » Les propos du dirigeant ont manifestement marqué l’ancien Gunner car, quelques jours après sa signature, celui-ci a échangé au téléphone avec Mukiele, son ancien coéquipier à Leverkusen, afin de l’inciter à rejoindre à son tour les Black Cats.
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RÉGIS Le BRIS
49 ans, entraîneur.
L’atout tranquillité
Que son équipe mène au score à Stamford Bridge, ou soit malmenée à Old Trafford (0-2 à Manchester United, le 4 octobre), Le Bris conserve généralement la même attitude stoïque au bord du terrain. Selon l’un de ses proches, le technicien français, en poste à Sunderland depuis l’an dernier, «réussit à transmettre à ses joueurs son calme, à travers la constance de son comportement, mais aussi des principes de jeu très clairs ». Concrètement, les Black Cats se sont adaptés aux exigences de la Premier League, en développant un football moins ambitieux que celui qu’ils proposaient en Championship. Ils affichent désormais la quatrième plus faible possession de balle de leur Championnat (43,6 %) et n’hésitent plus à user des contre-attaques et des longues touches en direction de la surface adverse (46 cette saison, soit le troisième plus haut total de la PL). Au-delà de ce pragmatisme, Le Bris s’est signalé par son adaptabilité tactique, en adoptant par exemple une défense à trois fin octobre. L’ex-coach de Lorient est aussi parvenu à faire basculer des rencontres par ses changements (quatre buteurs de son équipe en Premier League sont venus du banc) ou par ses ajustements, comme lorsqu’il a annihilé la menace Alejandro Garnacho, en imposant une prise à deux sur lui en cours du match à Chelsea.
« Il me fait beaucoup penser à (Arsène) Wenger par son caractère et son éthique de travail » , a affirmé sur Canal + cette semaine Xhaka, qui avait connu l’Alsacien à Arsenal. James Copley, journaliste au Sunderland Echo, est, lui, impressionné par l’aplomb que démontre Le Bris face à la pression médiatique propre à la PL: « Rien ne semble l’atteindre… Même après les défaites, Régis ne laisse filtrer aucune émotion et évoque toujours son projet à long terme. » Qui consiste à refaire de Sunderland une équipe établie durablement dans l’élite, en écho à son glorieux passé (6 titres de champion entre 1892 et 1936).

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