Ferrand-Prévôt et Pogacar en or

Le Slovène et la Française ont été récompensés hier des Vélos d’Or masculin et féminin, lors d’une cérémonie tenue à Paris qui a souligné la domination des deux Maillots Jaunes de l’année.

"Quand un coureur de ce niveau et de ce rang 

respecte les événements majeurs de son sport 

et s’y engage, il faut dire bravo"

   -  MARC MADIOT, À PROPOS DE TADEJ POGACAR

6 Dec 2025 - L'Équipe

PIERRE MENJOT

Si les absents ont toujours tort, Tadej Pogacar et Pauline Ferrand-Prévôt font exception à la règle. Le Slovène, malade, et la Française, en stage avec son équipe, étaient excusés pour la cérémonie des Vélos d’Or, qui s’est tenue à Paris. Mais la vidéo d’introduction de la soirée, avec beaucoup d’images des deux Maillots Jaunes, a vite annoncé le thème. « Pogi » et « PFP » ont tout raflé, à savoir les deux titres les plus prestigieux, les Vélos d’Or masculin et féminin, en plus du trophée Eddy-Merckx du meilleur coureur de classique pour le premier, et le trophée Jeannie-Longo de la meilleure cycliste française pour la seconde.Tadej Pogacar (malade) et Pauline Ferrand-Prévôt (en stage avec son équipe) ont participé à la cérémonie du Vélo d’Or 2025 par écran géant interposé, hier soir à Paris.

Une double récompense à la hauteur de leurs saisons respectives. « Tadej a le physique pour gagner les grands Tours, mais mentalement il est plus agressif sur les courses d’un jour, et je ne sais pas comment il réussit à gagner sur les deux terrains, mais il est l’un des meilleurs coureurs du monde », a résumé Andrej Hauptmann, le directeur sportif du double champion du monde chez UAE, qui connaît le garçon depuis longtemps et n’est plus surpris. « Je me souviens quand il avait 15 ans, il m’a demandé d’appeler le sélectionneur des juniors slovènes car il voulait courir Paris-Roubaix. J’ai dit non, il pesait 50 kg avec son vélo… (sourire.) Mais il l’a fait, et a terminé 13e. Alors gagner Roubaix sera très difficile, mais il aime les challenges et va essayer, encore et encore. »

Car Pogacar (27 ans, 3 Vélos d’Or désormais après 2021 et 2024) est un champion total, et il s’est aventuré sur l’Enfer du Nord, terminé 2e derrière Mathieu Van der Poel, avec qui le duel fut bouillant jusqu’à la chute du quadruple vainqueur du Tour. « Et c’est ce que j’aime chez lui, il a le sens de l’Histoire, le félicitait Marc Madiot, deux victoires sur les pavés du Nord. Quand un coureur de ce niveau et de ce rang respecte les événements majeurs de son sport et s’y engage, il faut dire chapeau, l’encourager et le soutenir. J’ai eu la chance de découvrir le cyclisme dans les années 1970 avec Eddy Merckx et Roger De Vlaeminck ( 7 Roubaix et 3 Tours des Flandres à eux deux), et les deux, trois protagonistes de cette année sont dans la même lignée, la même caste. » Madiot a déclaré son amour pour les classiques, « la chose à ne pas toucher en cyclisme si on veut qu’il garde sa grandeur et son élégance », alors le manager de Groupama-FDJ a dû beaucoup aimer la saison de Pauline Ferrand-Prévôt.

« PFP » déjà tournée vers 2026

Pour son retour sur la route après son titre olympique de VTT l’an dernier, la Rémoise (33 ans) a brillé à la fois sur le Tour, gagné en enlevant les deux dernières étapes, et Paris-Roubaix, comme son homologue slovène. Un coup de maître pour la leader de Visma-Lease a bike, pas encore vue à la cérémonie malgré cinq trophées reçus en trois éditions, qui a promis qu’elle tenterait de faire aussi bien en 2026.

Pour la jeune vague française, le thème était même de « faire encore mieux », un mot revenu dans la bouche de Romain Grégoire, Paul Magnier ou Valentin Madouas, présents avant de filer en Espagne pour leur premier stage. Une saison réussie pour le clan bleu-blanc-rouge (86succès au total) et un trophée Bernard-Hinault du meilleur coureur français remis à Kévin Vauquelin (24 ans), devenu le chouchou du public en juillet sur les routes du Tour, dont il a pris la 7e place, « une performance que je n’aurais pas pu faire sans cet engouement du public, c’est vraiment la magie du sport », a-t-il expliqué dans une vidéo.

L’Italien Matteo Trentin, lauréat du prix Gino-Mäder pour son implication dans l’organisation d’événements en soutien aux enfants malades (lire par ailleurs), et Alexandre Léauté, à nouveau élu meilleur para-cycliste français, ont également été très applaudis, comme Jeannie Longo, peut-être le plus beau palmarès de la salle (13 titres mondiaux, 1 olympique, 62 titres nationaux), à la fois fière et timide de remettre un prix à son nom.

Ce sera aussi le cas en 2026 de Mark Cavendish, dont le trophée éponyme récompensera le meilleur sprinteur du peloton, « car c’est une chose à part dans le cyclisme, un jeu d’échecs », a vanté le Britannique. Il sera bientôt l’heure de se projeter sur la saison prochaine mais, hier soir, les Vélos d’Or ont permis de tourner pour de bon la page 2025 marquée par deux étoiles.

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« Le cyclisme est un sport social »

Honoré par le prix Gino-Mäder pour son critérium caritatif à Monaco, Matteo Trentin a insisté sur le rôle fédérateur et inspirant de son sport.

"Nous sommes une petite lumière qui passe 

devant des gens qui nous attendent pour nous 

voir trois ou quatre secondes"

   - MATTEO TRENTIN 

6 Dec 2025 - L'Équipe

LUC HERINCX

Chaque année depuis 2021, Matteo Trentin réunit les stars mondiales du peloton dans la clinquante principauté monégasque pour quelques tours de circuit sans intérêt sportif. Dit ainsi, difficile d’imaginer une connexion directe avec le prix Gino-Mäder récompensant depuis l’an dernier l’implication d’un coureur pour ses actions environnementales et sociétales. Sauf que cet événement annuel sur le Rocher est né d’une réflexion en pleine pandémie de la part du coureur de 36 ans et de son épouse pour soutenir les enfants malades, et que 350 000 euros ont été récoltés en cinq ans pour leur venir en aide à travers les associations Fight Aids Monaco et la Fondation Princesse Charlène de Monaco. Rien d’illogique, finalement, de voir cette initiative mise à l’honneur hier par l’attribution du prix Mäder à l’Italien de Tudor.

« Le soir de l’événement à Monaco, je reste et je vois des enfants continuer à rouler sur le circuit du critérium… a témoigné Trentin dans un discours en français. Quand je vois cela et les mails que l’on reçoit pour nous remercier des dons, je me dis qu’on a atteint notre objectif : inspirer et aider. Et tout ça, c’est grâce au cyclisme. » Une allocution impactante sur la portée du vélo faisant écho au discours déjà émouvant l’an dernier de l’Espagnol Luis Angel Maté, premier lauréat de ce prix imaginé en hommage au coureur suisse tragiquement décédé en 2023 et engagé dans des causes environnementales pendant sa jeune carrière.

Devant la mère et l’une des soeurs de Gino, Maté, présent encore hier et « honoré » de remettre le prix à Trentin, a insisté une nouvelle fois sur la charge qui incombe aux coureurs professionnels dans ces domaines : « Le vélo est le sport le plus social du monde, on doit avoir ça dans la tête, on a une grosse responsabilité. On a les meilleurs stades du monde et la responsabilité de partager et protéger cette maison. »

Trentin est même allé plus loin en soulignant l’aspect crucial de l’accès gratuit pour les spectateurs aux plus grandes courses mondiales, à une époque où les discours sur une potentielle billetterie du cyclisme viennent polluer les perspectives d’évolution de ce sport. « Le cyclisme est un sport spécial, social, un sport du peuple, a

rappelé l’Italien. Sur le bord des routes sur les grands Tours, les classiques, il y a des enfants, des vieux… Je pense que nous sommes une petite lumière qui passe devant des gens qui nous attendent pour nous voir pendant trois ou quatre petites secondes. »

Si tout est encore loin d’être parfait, puisque la logistique d’une course et l’engouement qu’elle suscite génèrent des déplac e m e n t s m a s s i f s , l e c y c l i s m e professionnel est aussi une incitation à la pratique d’une mobilité douce, ce que Trentin s’attelle à répéter dans des écoles monégasques où il sensibilise les enfants à ces questions.