STARS À LA MÈNE


Pour la première fois depuis Magic Johnson et Isiah Thomas en 1989, le joueur clé des deux finalistes NBA est leur meneur, Shai Gilgeous-Alexander à Oklahoma City, Tyrese Haliburton à Indiana.

“Être le meneur, c’est comme être la maman. 
Votre boulot est de vous occuper de tout le monde"    
- TYRESE HALIBURTON, MENEUR DES INDIANA PACERS

5 Jun 2025 - L'Équipe
LOÏC PIALAT

LOS ANGELES (USA) – Stephen Curry et Kyrie Irving sont deux meneurs d’exception, pas de débat. Mais à Cleveland, abonné aux finales contre Golden State (2015 à 2018), Irving jouait dans la même équipe que LeBron James. L’ombre de Kobe Bryant et Paul Pierce condamnaient Derek Fisher et Rajon Rondo au rôle de lieutenant aux Lakers et à Boston (2008, 2010). Tony Parker, MVP de la finale 2007 (face à Cleveland), avait Tim Duncan dans son camp. Ron Harper a battu deux fois le Jazz de John Stockton en 1997 et 1998 mais, aux Chicago Bulls, le patron s’appelait Michael Jordan. Alors il faut remonter à 1988 et 1989 pour retrouver, comme cette année, deux finalistes NBA avec un leader à la mène. À l’époque, Magic Johnson organisait le jeu Showtime des Los Angeles Lakers et Isiah Thomas, celui des Detroit Pistons.

Shai Gilgeous-Alexander, 26 ans, et Tyrese Haliburton, 25, n’ont pas encore l’aura de leurs aînés. Le meneur du Thunder a tout de même ajouté cette saison un titre de MVP et de meilleur scoreur (32,7 points de moyenne en saison régulière) à son CV. Son alter ego des Pacers a brillé en play-offs grâce à sa régularité à la passe (9,8 passes par match) et des coups d’éclat comme ce panier au buzzer improbable contre les New York Knicks (138-135 a.p. lors du match 1 de la finale de Conférence).

Ni l’un ni l’autre n’étaient pourtant promis au statut de franchise player qu’ils ont atteint aujourd’hui. Le Canadien a été drafté en onzième position par Charlotte en 2018, pour être envoyé dans la foulée aux Clippers qui l’ont inclus dans l’échange avec Paul George après sa saison rookie. «Il y a eu des soirs où je me suis dit que je n’étais pas bon au basket, a raconté le Torontois.

Tous ces moments où j’ai été coupé, échangé, méprisé, oublié m’ont aidé à devenir qui je suis.»

Les Sacramento Kings ont drafté Haliburton à sa sortie d’Iowa State en 2020 (12e position) et l’ont sacrifié pour attirer l’intérieur Domantas Sabonis un an et demi plus tard. À Indiana, Rick Carlisle lui a confié les clés du camion, à seulement 21 ans. «Cette franchise m’a donné une chance, salue ce grand fan de catch. Parfois, je me dis qu’ils ont vu en moi plus que ce que je voyais moimême.»

Le Thunder a connu trois exercices compliqués entre 2020 et 2023 avec une défaite de 73 points, la pire de l’histoire de la NBA, contre Memphis en 2021 (Gilgeous-Alexander ne jouait pas). Indiana a été privé de playoffs en 2022 et 2023. Mais la patience – plus facile sur un petit marché – a payé. OKC a terminé la saison précédente et l’actuelle en tête à l’Ouest. Indiana a enchaîné deux finales de Conférence. Les deux meneurs y sont pour beaucoup, chacun à sa façon mais avec un jeu propre en commun. Internet dénonce «SGA le marchand de lancers francs » (seul Giannis Antetokounmpo en a obtenu plus cette saison) en oubliant son efficacité. Il multiplie les pénétrations (20 par match), fait mal à mi-distance (54% entre 3 et 4 mètres) et pique de loin (37,5 %). Si fluide qu’il inscrit 30 points (11 matches sur 16 en play-offs) presque discrètement.

Haliburton n’a pas la même appétence pour le panier (18,6 points cette saison). «Être le meneur, c’est comme être la maman. Votre boulot est de vous occuper de tout le monde» , explique le champion olympique 2024. Pour un adepte des passes aveugles, il perd très peu de ballons (1,6 par match en saison régulière). Dans le match 4 contre New York, il a même réussi un triple-double à 32 points, 15 passes et 12 rebonds sans le moindre ballon perdu (130-121). Du jamais vu en play-offs. Pourtant, ses confrères l’avaient élu « joueur le plus surcoté » de la Ligue dans un sondage de The Athletic en avril. Deux mois plus tard, il joue une finale NBA. Et eux la regardent à la télé.

***


Loin des projecteurs, Oklahoma City et Indiana se sont qualifiés en finale NBA grâce à un jeu collectif séduisant et la maîtrise de leur budget. Une affiche inédite qui consacre le retour en grâce des petits marchés et du basket qui nourrit les passions.

"Les vrais fans de basket vont être gâtés avec cette finale" 
MARK TATUM, No 2 DE LA NBA

MAXIME AUBIN
Sur un air populaire

SAN ANTONIO (USA) – Avec une agglomération respective d’1,4 et 2 millions d’habitants, et un potentiel télé limité à 750000 et 1 million de téléspectateurs, Oklahoma City et Indianapolis, qui s’affrontent en finale NBA, font partie des plus petits marchés de la Ligue nord-américaine. Il faut remonter à 1971 pour retrouver la trace d’une finale jouée entre deux franchises aussi modestes: celle remportée 4-0 à l’époque par les Milwaukee Bucks au détriment des Baltimore Bullets. «On s’apprête à couronner un septième champion différent en sept ans. C’est la première fois que cela se produit dans l’histoire, et nous constatons que l’intérêt pour la NBA n’a jamais été aussi grand» , commente Mark Tatum, no de la NBA, ravi que le niveau du Championnat soit de plus en plus homogène.Le 28 mai, après le match 5 gagné 124-94, le Paycom Center d’Oklahoma City a célébré le Thunder, qui a remporté la finale de la Conférence Ouest face aux Minnesota Timberwolves.

La NBA aurait sans doute apprécié voir une équipe comme New York atteindre la finale. Des matches à enjeux organisés dans la Mecque du basket sont la garantie d’une audience télé mondiale, en plus de partenariats commerciaux et ventes de merchandising juteux. Mais c’était sans compter sur les Pacers, portés par un jeu collectif huilé qui est venu à bout des Knicks en finale de la Conférence Est (4-2). À l’Ouest, Oklahoma City a bâti son succès sur les mêmes bases : celui d’un effectif jeune et soudé qui a réussi à faire tomber Denver, le champion en 2023 (4-3), puis Minnesota en finale de conférence (4-1). «Ces deux équipes pratiquent un jeu fascinant, et les vrais fans de basket vont être gâtés avec cette finale, promet Tatum, qui tient à relativiser l’impact des tailles de marché en NBA. C’est quelque chose qui importe moins aujourd’hui que par le passé. Nos audiences sur ces play-offs sont excellentes, peu importe la taille du marché. De plus, notre engagement sur les réseaux sociaux atteint des niveaux records. Ces contenus digitaux permettent à toutes les équipes et à leurs meilleurs joueurs d’être connus de tous, à la fois aux États-Unis et dans le monde entier.»

Le deuxième point commun entre Indiana et Oklahoma City est d’avoir réussi à façonner deux équipes compétitives avec les moyens du bord. Les Pacers dépensent « seulement » 169 millions de dollars en salaire cette saison, soit le 22e budget de la Ligue. Le Thunder pointe à la 25e place avec 167 millions. Un modèle opposé à celui des superteams et leur empilement de stars, qui devraient se raréfier à l’avenir.

Des ancrages locaux différents mais importants

La raison ? L’instauration en NBA d’une nouvelle convention collective très punitive en avril 2023 («CBA» en anglais), qui restreint la capacité des équipes à trop dépenser et s’endetter. De quoi rééquilibrer le niveau de jeu global. « Ce que nous avons essayé de faire avec ce nouveau CBA, c’est de répartir les talents au sein de la Ligue et de mettre les équipes dans une position où, si elles sont bien gérées, elles peuvent devenir prétendantes au titre chaque année » , résume Tatum.

Les équipes marketing de la NBA ne devraient pas avoir trop de mal à faire la publicité de cette finale. Au-delà du duel de meneurs annoncé entre Shai GilgeousAlexander et Tyrese Haliburton (lire aussi page20), OKC et Indiana ont une histoire riche avec le basket. Le Thunder est né sur les ruines des SuperSonics, franchise de Seattle déplacée dans l’Oklahoma en 2008. Quatre ans plus tard, l’équipe s’est hissée jusqu’en finale grâce à trois futurs MVP : Kevin Durant, James Harden et Russell Westbrook, battus en finale par le Miami Heat de LeBron James (1-4). Ce parcours a attiré une ferveur populaire sans précédent à Oklahoma City, devenu l’un des publics les plus chauds de la NBA aujourd’hui. Un engouement sans doute facilité par l’absence d’une autre franchise de sport majeur en ville.

Du côté de l’Indiana, on remonte carrément aux origines du jeu. Si James Naismith a créé le basketball dans le Massachusetts en 1891, c’est dans l’Indiana que la pratique s’est développée et a pris une ampleur folle au lycée et à l’université. Larry Bird et Oscar Robertson font partie des légendes locales, tout comme l’équipe des Pacers des années 1970, triple vainqueure du Championnat ABA (1970, 1972, 1973), qui fusionnera ensuite avec la NBA en 1976. L’histoire plus récente nous ramène à l’an 2000, quand Reggie Miller qualifiait l’équipe pour sa première finale en NBA (2-4 face aux Lakers), puis aux années 2010 avec Paul George, qui butera trois saisons de suite sur Miami, d’abord en demifinales puis en finale de Conférence (2012, 2013, 2014).

De l’histoire, de la passion populaire et du beau jeu: cette finale inédite entre Oklahoma City et Indiana prouve que les plus belles pages de la NBA peuvent aussi s’écrire loin des projecteurs des grandes métropoles.

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