Cyclisme : la phénoménale Pauline Ferrand prête pour de nouveaux défis


Mercredi, à Kigali, Pauline Ferrand-Prévot (à droite) 
lors d’une reconnaissance du parcours.

Après un printemps étourdissant et un fol été, la lauréate du Tour de France s’attaque à l’automne avec ambition. Au programme : les championnats du monde au Rwanda, puis d’europe en France.

« Pauline va inspirer. 
C’est ça, les champions. Cela donne de l’envie. 
Pour les femmes, pour tout le monde. 
Cela va créer une belle dynamique pour nos clubs, 
qui vont s’emparer de cette emblématique championne » 
   - Florian Rousseau, Directeur technique national du cyclisme français

« Tous les grands champions ont quelque chose de supérieur, 
et ils sont surtout à 100 % dans tous les paramètres de la performance. 
C’est là où ils font la différence » 
   - Paul Brousse, sélectionneur de l’équipe de France

26 Sep 2025 - Le Figaro
Jean-Julien Ezvan

Un an après l’émouvante médaille d’or aux Jeux olympiques de Paris 2024 en VTT, fruit d’une quête effrénée de douze ans, Pauline Ferrand-Prévot s’est hissée le 3 août au sommet du Tour de France (avec 3’42” d’avance sur la Néerlandaise Demi Vollering et 4’ 9” sur la Polonaise Katarzyna Niewiadoma). Une édition magistralement conclue par deux spectaculaires victoires d’étapes (au sommet du col de la Madeleine, puis à Châtel). Avec des records d’audience à la clé (25,7 millions de téléspectateurs ont suivi au moins une minute de la diffusion de la course sur les chaînes de France Télévisions ou sur sa plateforme numérique) et un pic à 7,7 millions de téléspectateurs lors de la dernière étape. « Christian Prudhomme (directeur du Tour de France, NDLR) m’a indiqué qu’il s’agissait de la cinquième meilleure audience du Tour tout court depuis 2006. Cela situe l’impact sur les familles, la jeunesse, et l’envie de pratiquer ce sport », se réjouit Michel Callot, le président de la fédération française.

Les larmes dans les bras de ses parents, les mercis étranglés de sanglots ont touché, propulsé Pauline Ferrand-prévot dans une nouvelle dimension. Paul Brousse, le sélectionneur de l’équipe de France, raconte : « Sur le Tour, Pauline a suscité une formidable popularité avec partout des pancartes “Allez, Pauline”. J’habite à Poitiers, où le Tour est passé, et je vois encore, quand je fais mes sorties vélo, des “Allez, Pauline” sur la route. Elle reste la figure de l’été et va faire naître des vocations, c’est évident. Les petites filles vont rouler avec une tresse. » Souvenir d’un été éclatant. Jaune panache. Jaune rêve. Jaune contagieux. Florian Rousseau, DTN du cyclisme français, assure : « J’ai vibré, comme tout le monde, lors du Tour de France. J’ai pris beaucoup de plaisir à suivre tous les jours Pauline et les autres Françaises (Maëva Squiban a remporté 2 étapes ; Juliette Labous a terminé 7e du classement général final; Cédrine Kerbaol, 8e ; Evita Muzic, 10e…). Pauline va inspirer. C’est ça, les champions. Cela donne de l’envie. Pour les femmes, pour tout le monde. Cela va créer une belle dynamique pour nos clubs, qui vont s’emparer de cette emblématique championne. C’est un exemple pour beaucoup. Jeannie Longo a marqué le cyclisme français, le cyclisme mondial; Félicia Ballanger aussi, sur la piste ; Pauline Ferrand-prévot, c’est la même chose. Et ce n’est pas fini… »

Le cyclisme tricolore, qui se désespère de voir surgir un successeur à Bernard Hinault (dernier vainqueur français du Tour en 1985), s’est laissé emporter par la réussite de la Rémoise (33 ans), qui a fait le lien avec Jeannie Longo (lauréate du Tour féminin pour la troisième et dernière fois en 1989). Pauline Ferrand-prévot, qui a, au printemps, remporté Parisroubaix (comme son compagnon, le Néerlandais Dylan van Baarle, en 2022), est, comme son aînée, une collectionneuse. Elle compte 15 titres mondiaux : en cyclo-cross, en mountain-bike, en gravel, mais également sur route (en 2014) et court après une nouvelle consécration arc-en-ciel à Kigali, au Rwanda, ce samedi. L’autre tête d’affiche de ces premiers championnats du monde organisés en Afrique est le Slovène Tadej Pogacar : «On retrouve chez eux cette caractéristique du champion capable de répondre présent sur les grands objectifs qu’ils se fixent », résume Michel Callot.

À Kigali, le défi dressé (165 km, 3 350 m de dénivelé) et les conditions (« altitude, humidité et un peu de pollution entraînent chaque jour des variations physiques », selon le sélectionneur national) composent au pays des Mille-collines un profil taillé pour plaire à Pauline Ferrand-prévot, qui livre : « Cela va être difficile, mais je m’attendais à des bosses un peu plus longues. C’est un circuit “punchy”, en ville, avec pas mal de virages. Il y a deux bosses qui vont être très dures. Cela me fait un peu penser à un circuit du Tour des Flandres. Il faudra avoir de la puissance, de l’énergie, de la force jusqu’au bout. » Et de souligner, souriante, confiante : « Je me sens très bien. Contrairement à l’an dernier, où j’étais sortie fatiguée mentalement après les JO. Là, je continue sur ma lancée. Je prends plaisir à travers les sollicitations, et cela me permet aussi de remercier le public français qui m’a poussée, m’a donné des ailes lors du Tour de France. Je le vis vraiment bien, je ne suis pas usée, pas fatiguée mentalement. Je suis contente d’être ici avec les filles. Tout au long de l’année, Juliette (Labous), Léa (Curinier), Evita (Muzic) ou Marie (Le Net) courent pour la numéro 1 mondiale (la Néerlandaise Demi Vollering au sein de l’équipe FDJ-SUEZ). Cela va être bien de les avoir de mon côté. J’ai hâte de voir ce qu’on peut faire toutes ensemble et de voir où cela peut nous amener. »

Paul Brousse ajoute : « Pauline, c’est une gagneuse, donc elle a encore envie de performer. Avec les Pays-bas et l’italie, nous figurons parmi les plus belles équipes sur le papier, avec une leader qui a prouvé qu’elle était capable de rivaliser et de prendre le meilleur sur celles qui dominaient le cyclisme mondial sur route. Le fil rouge, avec cette équipe, c’est de courir autour de Pauline, mais de rester vigilant, de ne pas rester obtus sur une décision prise il y a quelques semaines et de s’adapter au mieux. »

Dans la foulée, Pauline Ferrand-prévot et l’équipe de France enchaîneront avec les championnats d’europe (du 1er au 5 octobre, sur les routes de la Drôme et de l’ardèche). La Rémoise livre : « J’essaie de prendre étape par étape, sinon, dans ma tête, cela va être compliqué. Là, je suis focus sur les championnats du monde. C’est une chance d’être ici, de courir dans ce pays. Il faut s’adapter aux conditions différentes. Samedi soir, je ferai la transition et, dimanche, je ferai gentiment la bascule pour retourner en France avec en tête les championnats d’europe. »


Pauline Ferrand-prévost est attendue. Elle sera follement soutenue. La tornade blonde a-t-elle déjà eu un impact sur les licences de la fédération française (110 000 licenciés, dont 13 % de femmes) ? «C’est un tout petit peu trop tôt pour répondre, parce que, contrairement aux sports qui fonctionnent avec la rentrée scolaire, on ouvre seulement notre campagne de licences, qui va se dérouler durant tout l’automne. Nous aurons de premiers indicateurs fiables sur l’effet Pauline aux environs de la fin du mois de novembre », résume Michel Callot.

Artiste tout terrain, à l’aise en toutes saisons, la Rémoise dispose-t-elle encore de voies d’améliorations possibles ? Paul Brousse glisse : « Peut-être dans le contre-la-montre. Si le Tour de France propose une trentaine, une cinquantaine de kilomètres de contre-la-montre, c’est sûr qu’il faudra qu’elle envisage sa préparation différemment pour aller chercher encore quelques secondes. Le reste, c’est parfaitement maîtrisé. Elle a le sérieux, la rigueur, le sens de la course. Tous les grands champions ont quelque chose de supérieur, et ils sont surtout à 100 % dans tous les paramètres de la performance. C’est là où ils font la différence. Ils n’ont pas beaucoup de faiblesses ce qui leur permet d’être au plus haut niveau. »

Revers de la médaille, « PFP » a vu surgir les critiques quand elle a annoncé avoir perdu 4 kilos pour dompter le Tour, symbole d’un cyclisme féminin qui se professionnalise. Au sortir de la Grande Boucle, la Rémoise s’était défendue dans une interview à Rouleur Magazine : « Je ne veux pas rester comme ça, je sais que ce n’est pas sain à 100 %. Mais nous avions un bon plan avec le nutritionniste de l’équipe et tout est sous contrôle. Je n’ai rien fait d’extrême. C’est un sujet délicat, parce qu’il faut trouver la limite, mais je sais aussi que je ne peux pas rester comme ça éternellement. C’est le choix que j’ai fait. » Michel Callot éclaire sur un cyclisme féminin en pleine expansion (29 épreuves dans 12 pays et sur 3 continents pour 84 jours de course par an, avec 4 Monuments sur 5 et les 3 grands Tours du calendrier masculin; 15 formations World Team composant une élite au sein de laquelle le salaire minimum annuel est de 44 000 euros brut, 7 équipes Pro Team complétant le plateau) : «Le cyclisme professionnel féminin grandit très vite sur de nombreux paramètres : le volume, le nombre d’équipes professionnelles, le nombre d’organisations qui se structurent vers le professionnalisme et le nombre d’athlètes. Il se structure également très vite dans sa dimension financière. Les femmes sont de mieux en mieux rémunérées, tant mieux, et un nombre de plus en plus important vit correctement de son sport. Donc tout ça progresse très rapidement. »

Sous contrat avec l’équipe néerlandaise Visma Lease a Bike de Jonas Vingegaard jusqu’en 2027, Pauline Ferrand-prévot (professionnelle depuis 2012, passée par les équipes Rabobank, puis Canyon, avant Visma depuis 2025) ne manque pas de défis à relever. « Notre plus grand espoir, en tous les cas de dirigeants du cyclisme français, c’est qu’elle arrive à renouveler ses performances et à regagner évidemment le Tour de France, notamment, et d’autres courses dans les prochaines années. Et on va avoir un objectif majeur en 2027 avec les championnats du monde en France (en Haute-savoie), sur un terrain qui peut être tout à fait à la convenance de Pauline, avec ce circuit de Domancy particulièrement exigeant. Après, l’histoire le dira, mais on ne peut pas s’empêcher, nous, de penser quand même un petit peu aux JO de 2028 de Los Angeles (pour boucler la boucle avec le titre olympique sur route, trente-deux ans après Jeannie Longo). On ne sait pas, personne ne sait si Pauline prolongera jusque-là, mais, forcément, on y pense un petit peu, et on y pensera peutêtre d’autant plus quand on connaîtra le circuit, puisqu’on sait qu’à Los Angeles il y a de nombreuses options. Et il est possible que ça puisse être un circuit assez exigeant… », indique Michel Callot.

En écho aux attentes, Pauline Ferrandprévot a retracé dans Vélo Magazine : «J’ai revu une interview de moi où j’avais 12 ans. Je disais : “Moi, ce que je veux, c’est la gagne.” Ce n’est plus ce que je veux maintenant. Bien sûr, je m’entraîne pour gagner. Mais vraiment, je fais ce que je fais actuellement parce que j’aime ça. Je me réveille le matin, j’ai envie de partir à l’entraînement. Je prends plaisir à rouler, à avoir cette vie. Je me dis même que je ferai peut-être comme Jeannie (Longo) : ne pas arrêter ! » Championnats du monde à Kigali (Rwanda). Samedi : course Élite femmes (165 km ; départ à 12 h 05, arrivée vers 16 h 45). Dimanche : course Élite hommes (267 km; départ à 9 h 45, arrivée vers 16 h 45).

Sur Eurosport et France 3.

***

J.-J. E.
Les Bleus déjà au rendez-vous des médailles

Après la médaille de bronze de Maxime Decomble, lundi dans le contre-la-montre espoirs et la médaille d’argent du relais mixte mercredi (Cédrine Kerbaol, Maëva Squiban, Juliette Labous, Pavel Sivakov, Bruno Armirail, Paul Seixas), Célia Géry (19 ans) est devenue championne du monde espoirs en s’imposant au sprint (120 km en 3 h 24) devant la Slovaque Viktoria Chladonova (Marion Bunel prenant la 5e place à 12 secondes), ce jeudi à Kigali. Une nouvelle étape pour l’ardéchoise qui a été championne du monde et d’Europe de cyclo-cross chez les juniors en 2024 et a remporté trois étapes du dernier Tour de l’avenir, en août.

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