À QUI LE TOUR? ÉTOILES MYSTÉRIEUSES


JONAS VINGEGAARD et TADEJ POGACAR, vainqueurs à eux deux des quatre dernières éditions, entament ce matin, à Florence, un nouveau duel sans merci.

Le meilleur coureur du monde contre le meilleur coureur du Tour de France

29 Jun 2024 - L'Équipe
DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL ALEXANDRE ROOS

FLORENCE (ITA) – Quel plus bel endroit pour se confronter à l’histoire que Florence, dans cette ville aux mille statues, sous le regard de ces innombrables visages peints pour l’éternité, ces chefs-d’oeuvre de la Renaissance qui figurent une armée de témoins à la pâleur opalescente, aux visages sereins et aux manières apaisées, figés dans une lueur d’inquiétude, une fragilité, une tension, qui annoncent des tremblements, une bataille à venir. Celle qui s’avance ce matin pourrait être prométhéenne,entreTadejPogacar(25ans) et Jonas Vingegaard (27 ans), qui vont croiser le fer pour la quatrième année, avec chacun un oeil sur un pan d’histoire, une occasion supplémentaire d’avancer vers le panthéon de leur sport. L’un visera un doublé quand l’autre cherchera le triplé.

Le Slovène a en effet l’occasion de remporter le Giro et le Tour de Francelamêmesaison,unexploit d’un autre temps, plus vu depuis 1998 et Marco Pantani. Le Danois, lui, peut empiler un troisième sacre d’affilée et le casting de ceux qui l’ont réalisé avant lui situe la performance : Louison Bobet, Jacques Anquetil, Eddy Merckx, Miguel Indurain et Chris Froome.

Ce duel de poids lourds cannibalise le Tour de France, du moins sa bagarre pour le classement général, et on ne va pas vous jouer du piccolo cette année non plus, on ne voit pas comment la victoire pourrait échapper à l’un des deux Mad Max du peloton. Ni la configuration particulière du tracé qui, en raison des Jeux Olympiques de Paris (26 juillet-11 août), ne s’achèvera pas dans la capitale pour la première fois de l’histoire, mais par un contre-la-montre à Nice.

Ni l’épaisseur de la concurrence, même si le plateau ne saurait être plus beau et que Remco Evenepoel et Primoz Roglic ne sauraient camper meilleurs outsiders. Et si nous devions avoir tort, ce sera sans doute au prix d’un scénario complètement fou, et il sera alors encore temps de se flageller dans ces colonnes.

Il est en revanche plus acrobatique de se mouiller sur l’issue du duel. On entend que Tadej Pogacar est le grand favori, qu’il a roulé sur tout le monde lors de son sacre dans le Tour d’Italie, mais on ne peut pas non plus ignorer le vent qui porte Jonas Vingegaard et un constat implacable: même si le bras de fer a été acharné, que Pogacar est un teckel qui ne lâche jamais prise, le Danois l’a ratatiné les deux dernières années.

Si Pogacar est le meilleur coureur du monde, Vingegaard est le meilleur coureur du Tour de France. Alors bien sûr, le contexte est cette fois particulier, les dynamiques inversées par rapport à l’an passé, mais une part de doute escorte tout de même chaque camp.

Pour le leader de Visma-Lease a bike, évidemment, l’incertitude est liée à sa condition alors qu’il n’a pas couru depuis sa grave chute du Tour du Pays Basque début avril et qu’il a dû soigner ses nombreuses blessures. Dans quel état est-il vraiment? Va-t-il progresser au fil des trois semaines ou, au contraire, coincer par manque de fraîcheur ? C’est le mystère le plus épais et une grosse part du suspense va dépendre de la réponse à ces questions. Pour Tadej Pogacar, les voyants sont tous au vert. Contrairement à 2023, il n’a connu aucun pépin. Il est plus fort qu’il ne l’a jamais été, encore en progression, une perspective effrayante pour ses adversaires, et l’équipe qui sera à ses côtés est la plus solide de tous les temps au départ du Tour de France, avec trois équipiers qui pourraient un jour gagner cette course (Adam Yates, Juan Ayuso, Joao Almeida). Mais il est lui aussi face à une inconnue: comment son organisme va encaisser les efforts du doublé ? Il n’est pas à l’abri d’un jour sans, surtout en troisième semaine, et pour peu que ce soit un jour de montagne et que Vingegaard ait ses bonnes cannes…

Ces deux énigmes pourraient ainsi bien rééquilibrer les débats et faire mentir ceux qui croient la course jouée d’avance. Si l’on devait s’en tenir à ce que les deux rivaux ont dit cette semaine, et s’ils ont dit la vérité, alors la messe serait dite. Mais Florence est aussi la ville des intrigues et ce qui se murmure dans ses labyrinthes, sous ses galeries, ne peut être considéré qu’avec précaution.

Des premiers indices sur leur forme ce week-end

Tadej Pogacar a ainsi annoncé qu’il s’était testé dernièrement et qu’il n’avait jamais été dans une telle condition. Le Slovène aime jouer au candide, mais on ne voit pas bien l’intérêt de montrer ses muscles avant le départ, si ce n’est pour instiller un peu de peur dans le camp d’en face.

L’ encadrement de l’ équipe néerlandaises’ est lui appliqué à mini miser les ambitions des on leader, à le mettre parmi les prétendants à la victoire, mais pas trop, après nous avoir dit pendant des semaines que Jonas Vingegaard serait au Tour seulement s’il est à 100 % de ses moyens. Comme si les « frelons », champions des préparations méticuleuses, au millimètre, allaient se présenter au départ de la plus grande course du monde avec des prévisions au doigt mouillé.

Les premiers indices vont en tout cas tomber assez vite, dès ce week-end italien, où l’on imagine Tadej Pogacar mettre la pression d’entrée, aidé par d’autres zinzins comme le champion du monde Mathieu van der Poel. Le Slovène ne peut s’en empêcher, le terrain est à sa convenance, plus puncheur que grimpeur, et un premier maillot jaune lui tend les bras dès ce soir.

Ce sera un des plus grands défis du staff d’UAE, et une autre clé de la course, que de savoir freiner son lévrier une fois le coup d’envoi donné tout à l’ heure à Florence. Le fief de Gino Bartali, qui repose non loin delà, à Ponte a Ema, au milieu de grands cyprès, dans une tombe ordinaire qui ne le distingue en rien des autres. Lui, le champion parti en 2000 avec son secret, celui d’avoir sauvé des juifs pendant la Seconde Guerre mondiale. Le souvenir de cette main tendue, de cette leçon d’humilité accompagnera le peloton et nous tous au matin d’un nouveau Tour de France, dans le rappel que rien n’y est jamais acquis.

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