Ils sont l’Avenir


Issus d’une catégorie Espoirs particulièrement dense, plusieurs coureurs du Tour des moins de 23 ans ont retenu notre attention tout au long d’une folle semaine.

25 Aug 2024 - L'Équipe
LUC HERINCX

COL DES FINESTRE (ITA) – Ce sont surtout les erreurs de stratégie, les sautes d’humeur et les visages candides éparpillés sur la route de la Moselle à l’Italie qui ont rappelé la jeunesse de ce peloton et provoqué un scénario aussi dingue. Car de tout le reste – préparation, caractère, temps d’ascension –, le professionnalisme est déjà là. Les stages en altitude et l’attention portée àla nutrition ont changé la donne, même chez les moins de 23ans.Pablo Torres, derrière son coéquipier espagnol Jaume Guardeno, tout comme le maillot jaune Joseph Blackmore, ou le Français Léo Bisiaux (en blanc), sont les grandes révélations de ce Tour de l’Avenir.

«Je pense que ça fait longtemps que le niveau Espoirs n’avait pas été aussi incroyable. Ilsuffit de voir la montée qu’a faite Pablo Torres aux Karellis ( jeudi)… C’estjuste fou» , s’enflammait Léo Bisiaux (19 ans) à l’issue de la 5e étape. Comme il est toujours difficile de comparer les générations, les propos du meilleur Français (4e) de ce Tour de l’Avenir étaient àprendre avec des pincettes. Puis Torres en aremis une couche hier: piqué par le scénario de la veille, l’Espagnol de 18ans a réalisé une ascension du col du Finestre (18,2km à 9% dont 8 km gravel) phénoménale et record, pratiquement quatre minutes plus rapide que celle de Christopher Froome lors de son raid victorieux au Giro 2018. Le maillot jaune lui a échappé pour 12secondes (alors qu’il avait 3’55’’ deretard avant l’étape) et le Britannique Joseph Blackmore (21ans) s’est vu récompenser d’une gestion parfaite de ses efforts toute la semaine. Alors Bisiaux a sûrement raison : ce cru 2024 augure d’une belle brochette de champions.

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Pablo Torres
Espagne, 18 ans, grimpeur

Dans l’ombre de Jarno Widar depuis le début de la saison (2e au Giro Next Gen, 5e au Tour de la Vallée d’Aoste), Pablo Torres a enfin volé la vedette au Belge avec deux ascensions époustouflantes au bout des 4e et 6e étapes. «Mes données de puissance étaient tellement élevées, peut-être les meilleures de ma vie sur une heure» , disait-il après son record au col des Finestre. De loin le meilleur grimpeur sur ce Tour de l’Avenir, le Madrilène de 18ans est d’un calme remarquable. «Il est très nature, silencieux, même son visage laisse peu transparaître ses émotions, ce qui pourrait être un avantage » , observe son sélectionneur, Mikel Zabala. Même quand son équipe a échoué à maîtriser la course sur la 5e étape – ce qui lui a fait perdre le Tour –, le coureur de l’équipe développement d’UAE Emirates n’accablait pas ses coéquipiers et songeait déjà au lendemain où il a failli réussir l’impossible. Zabala résume: «Il est comme Valverde: simple et efficace.»

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Joseph Blackmore
Grande-Bretagne, 21 ans, coureur complet

Symptomatique des évolutions récentes, le maillot jaune du Tour de l’Avenir est déjà professionnel. Joseph Blackmore a franchi ce pallier en cours d’année chez Israel-PremierTech et c’est compréhensible, son intelligence en course étant déjà celle d’un coureur d’expérience. «“Jo” est très silencieux, studieux, mais quand il l’ouvre, tout le monde écoute» , décrit son directeur sportif britannique, John Herety. Dans un style à la Primoz Roglic, Blackmore a pris le maillot jaune en revenant au tempo puis en réglant le sprint au sommet de la Rosière, mercredi; il l’a perdu à la pédale, jeudi; il l’a reconquis dans un coup stratégique, vendredi; et il l’a défendu sans paniquer, hier. «J’ai essayé de suivre Torres puis j’ai réalisé que je n’avais pas besoin d’aller si vite » , analysait-il. Pas le meilleur des grimpeurs sur cette édition même s’il estime «avoir trouvé de nouvelles limites » , le vainqueur de Liège-Bastogne-Liège Espoirs se dit taillé « pour les courses par étapes d’une semaine avec des montées un peu punchy».



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Matthew Brennan
Grande-Bretagne, 19 ans, sprinteur/puncheur

4e lundi, 3e mardi, Matthew Brennan n’a pas tellement pris la lumière parce que ses coéquipiers ont mal contrôlé les étapes, mais derrière, le sprinteur de Darlington (Angleterre) a toujours réglé l’arrivée du peloton avecdelamarge. «C’est bien d’être régulier. Je crois que c’est plus parlant qu’une victoire d’étape à ce stade de nos carrières» , se satisfait-il. S’entraînant jusqu’à cet hiver tout seul en parallèle de ses études, lepistard de 19ans a été recruté par la formation développement de VismaLease a bike (il sera pro l’an prochain) et évolue de façon express (trois victoires cette saison). Son directeur sportif John Herety ne voit pas en lui un sprinteur massif mais «dans les arrivées un peu plus réduites au bout d’une course difficile, il fait probablement déjà partie des meilleurs, même au niveau World Tour. Et c’est un sprinteur typique, très émotif, du même tempérament que Cavendish! ( rires) »

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Léo Bisiaux
France, 19 ans, grimpeur

S’il y avait encore une incertitude sur son profil – « oui, je me vois grimpeur mais on verra jour après jour» –, ce Tour de l’Avenir a apporté quelques éléments de réponse. Le phénomène du cyclo-cross français (champion du monde juniors) a terminé à une place de son objectif initial de podium en assurant une montée du col des Finestre prudente (4e de l’étape) après plusieurs journées audacieuses dans la montagne. «J’avais fait une grosse préparation, je ne peux pas avoir de regrets, assure Léo Bisiaux. Il y a encore beaucoup de choses à mettre en place. L’hiver, je fais du cyclo-cross quand les autres font de la route, donc on fait forcément moins de volume. Mais en première année Espoirs, c’est plutôt correct de finir 4e.»

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Jarno Widar
Belgique, 18 ans, grimpeur

Déjà à l’issue du prologue de 7,1km qu’il avait plutôt réussi (9e) malgré son gabarit (1,66m; 54kg) et sur un exercice qu’il avait à peine travaillé, Jarno Widar avait pesté. Battu à La Rosière par Blackmore, il refusait de s’exprimer ; cloué aux Karellis par Torres, il montait sur le podium en faisant la tronche. Cette semaine, celui qui écrasait tout depuis le début de la saison (Giro Next Gen et Tour de la Vallée d’Aoste) a révélé un caractère ronchon dans la défaite. «Je ne sens jamais la pression qui m’entoure, seulement celle que je m’impose» , explique néanmoins le grimpeur de l’équipe développement de Lotto-Dstny. Widar a sûrement payé l’enchaînement de courses et une étiquette de grand favori difficile à assumer mais son entourage s’accorde àdire que cette semaine d’échecs lui aura été plutôt bénéfique. Et son t a le n t s u r le s fo r t s pourcentages reste indéniable.

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Henrik Pedersen
Danemark, 19 ans, coureur de classiques

De larges épaules soutenues par un dos souple et des cuisses énormes mais une taille fine : Henrik Pedersen (1,81 m) est un joli patchwork. Champion d’Europe Espoirs l’an dernier, le futur pro d’Uno-X Mobility (il est pour l’instant dans la formation développement) a aussi la science de la course. « Être dans l’échappée de la bonne manière, garder de l’énergie et en même temps rouler assez fort pour ne pas être rattrapé, c’est un art dans lequel il excelle » , analyse son sélectionneur Anders Lund. Il a été le métronome de celle qui lui a offert la victoire, lundi. Capable de bien passer les bosses – « les petites comme celles-ci (dans les Vosges), comme dans les Flandres, sont mes favorites » , dit-il –, Pedersen est rapide au sprint et a le don de fendre le vent dans une position très aérodynamique. « Je suis danois, donc on fait très attention à cela » , rit-il.

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Bunel prend de l’altitude

En surfant sur sa première expérience du Tour de France, la grimpeuse normande a écrasé le Tour de l’Avenir et confirmé sa belle ascension cette saison.

COL DES FINESTRE (ITA) – « C’est vraiment mon domaine » , a pensé Marion Bunel en découvrant la vraie montagne, pas les petites bosses de sa Normandie natale, sur la première édition féminine du Tour de l’Avenir, l’an dernier. Depuis cette 8e place, la coureuse de St-Michel-Mavic-Auber 93 a trouvé le terrain de jeu idéal. Validant sa progression chez les pros avec une 5e place au Tour des Emirats arabes unis juste derrière les cadors, Bunel a épaté à la Grésivaudan Classic en s’imposant dans le brouillard glacial de Chamrousse, en Isère, début juin. De là, il était légitime de l’emmener sur le Tour de France malgré ses 19 ans la semaine dernière, et même si elle a l’impression de s’y être heurtée à un mur, l’apprentissage fut immédiat. «J’y suis arrivée un peu sousentraînée mais ça m’a permis de monter en régime, racontait-elle hier. Ça a très clairement été la course la plus difficile de ma vie mais c’est ce qui a fait que je ne me sentais pas en souffrance cette semaine.»


Marion Bunel a remporté deux étapes et le général du Tour de l’Avenir.


La France rafle tout

Car trois jours seulement après sa 17e place sur lacourse phare (3e du classement jeunes), Bunel a pris du rab de montagne sur le Tour de l’Avenir, sentant qu’elle «pouvait y faire quelque chose» . Un joli flair: victorieuse aux Karellis avec plus de 30 secondes d’avance, jeudi, elle a achevée tout le monde aux Finestre, hier. «Je ne connaissais pas, j’étais carrément dans l’inconnu mais dès qu’on a attaqué les graviers ça a lancé mon truc, racontait l’étudiante en STAPS. J’étais un peu en pilotage automatique: je me suis mise devant pour choisir ma trajectoire puis j’ai commencé à accélérer, j’ai vu que ça faisait mal donc j’ai insisté.» Pour arriver au sommet 1’55’’ avant tout le monde. «C’est un truc de malade! On gagne trois étapes ( avec celle d’Églantine Rayer), je prends le maillot jaune, jesuis maillot blanc, on a le maillot vert (Rayer aussi) et le classement par équipes!»

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