Paris-SG Gianluigi Donnarumma, un grand de velours


Le gardien italien du club parisien, conspué après avoir encaissé un but au match aller, a été l’artisan du retour victorieux contre Liverpool à Anfield, mardi en Ligue des champions. 
La revanche d’un joueur taiseux et hermétique au qu’en-dira-t-on.

Très tôt diagnostiqué comme un phénomène, le portier parisien est un joueur encore perfectible, jeune et parfois en mal de repères.

13 Mar 2025 - Libération
Par Grégory Schneider

Gianluigi Donnarumma est un homme assez secret, méfiant. Pas du genre à lâcher le mot de trop. Mardi, dans un couloir du stade d’Anfield, une petite heure après la qualification arrachée de très haute lutte par le ParisSaint-Germain (1-0, 4-1 aux tirs au but après la défaite 0-1 à l’aller), le grand (1,96 mètre) gardien italien du club de la capitale s’est pourtant arrêté devant un micro de Sky Sport Italia, parler à des compatriotes lui donnant sans doute un surcroît de confiance. Le natif de Castellammare di Stabia, au pied du Vésuve, a commencé par aligner quelques banalités collectives comme on prend les mesures, toutefois conclues par celle-là : «Nous avons su souffrir.»

Puis, il a vidé son sac : «Je vois passer beaucoup de critiques de la part des journalistes, si on peut les appeler ainsi. Ils ignorent le rôle du gardien de but. Au match aller, nous avons concédé un tir [deux, en fait, ndlr]et ce tir s’est transformé en but. On a raconté que c’était de ma faute, que je n’étais jamais décisif. Mais je ne m’arrête pas à ça. Je pense ­toujours à sourire, à donner le meilleur de moi-même et à travailler pour l’équipe.»

Albatros

Mardi, celui qui fut élu en 2021 meilleur joueur d’un Euro remporté par la sélection italienne était partout. A la retombée d’une tête piquée de l’attaquant de Liverpool Luis Díaz pour faire l’albatros, l’image tournant depuis en boucle de l’autre côté des Alpes. Dans les airs, où son courage et ses prises de risque pour secourir une défense dominée a mis en échec une équipe anglaise disposant «de l’un des meilleurs jeux aériens d’Europe», selon Luis Enrique, le coach parisien. Etalé de tout son long sur l’herbe grasse pour feindre la blessure et permettre à son équipe, asphyxiée, de recouvrer ses esprits après une minute trente de break.

Et enfin, tout au bout de la nuit, en rempart pour faire échec aux tentatives de Darwin Núñez et Curtis Jones lors d’une séance de tirs au but où l’approche à la fois clinique et ­relâchée du squad parisien, staff technique, gardien ou tireurs, a frappé certains témoins directs. Donnarumma s’est donc donné le droit d’en profiter.

Buteur parisien du soir à l’autre bout du terrain, l’international tricolore Ousmane Dembélé a été invité à s’exprimer sur la performance majuscule du portier : «Gigio… C’est un gardien exceptionnel. Il l’a montré avec l’Italie, avec le Paris-SG… et il n’a que 25 ans [26 ans], donc le meilleur est à venir pour lui. Mardi, il a répondu présent. Il a toute la confiance du club, du staff, des joueurs.» On peut bien sûr entendre la volonté, obsessionnelle dans le cas des joueurs de la capitale puisqu’ils se savent toujours plus seuls ici qu’ailleurs, de protéger leur voisin de vestiaire. Après, on n’est pas obligé de croire Dembélé non plus.

Depuis août 2023 et l’arrivée de Luis Enrique sur le banc parisien, le gardien italien a été progressivement installé dans un rôle étrange, ubique, épousant les avatars sportifs de l’équipe de la capitale. Depuis une semaine et la défaite initiale contre Liverpool, Donnarumma était ciblé. Difficile pourtant de lui mettre sur le dos un but anglais entaché d’un duel perdu par le capitaine brésilien Marquinhos puis d’une erreur de marquage niveau minime première année du défenseur portugais Nuno Mendes mais voilà, le nom du gardien transalpin est venu alimenter les débats, sous le prétexte fourretout d’un «pas suffisamment décisif», pouvant d’autant mieux passer auprès de l’opinion que son vis-àvis, Alisson Becker, avait arrêté tout ce qui s’était présenté à lui. Juger le match d’un gardien au regard de celui, forcément circonstancié, de son adversaire du soir, n’a pourtant aucun sens dans le milieu.

Paratonnerre

Et on en connaît certains qui n’auraient jamais laissé dire. Mais le ­Paris-Saint-Germain est un club où l’on assume en silence, quoi qu’on raconte autour. Et Donnarumma est familier du rôle de paratonnerre médiatique. La saison passée, les joueurs de champ parisiens n’avaient pas été fichus de mettre un but lors des deux demifinales aller-retour de Ligue des champions (0-1, 0-1) contre le Borussia Dortmund, canonnant les poteaux à six reprises, mais c’est encore Donnarumma qui avait écopé pour n’être pas sorti sur le corner amenant le but de Mats Hummels au Parc des princes. Pas impossible, du reste, que l’intense activité et le rayonnement de l’international italien à Anfield prennent leur source dans les débriefings musclés qui avaient suivi l’élimination face aux Allemands. Très tôt diagnostiqué comme un phénomène, parfois à la limite de la bête de foire dans un championnat italien où il a été titularisé dans les bois du Milan AC à 16 ans, Donnarumma est de fait encore un joueur perfectible, jeune pour le poste et parfois en mal de repères. Notamment dans un environnement médiatique qu’il craint, même si sa voix de stentor et son quasi-doublemètre ne le laissent pas instinctivement supposer. Il a cependant compris que le plus simple était encore de se taire. Quand le Napolitain de formation a vu débarquer en juin, au Campus PSG de Poissy, le gardien international russe Matvey Safonov pour quelque 20 millions d’euros, il n’a rien dit. Quand ce même Safonov a fait savoir, via une interview à un journaliste de son pays, n’avoir jamais entendu de la bouche des dirigeants parisiens être venu dans la peau d’un numéro 2, laissant ainsi entendre qu’il est venu piquer la place de l’Italien, il n’a pas pipé mot non plus.

Inconstances

Quand il a été écarté au profit de Safonov lors de l’entrée des Parisiens en Ligue des champions face à Gérone (1-0, le 18 septembre) ou encore à Munich (0-1, le 26 novembre) pour un jeu au pied médiocre et handicapant dans le contexte (Luis Enrique l’a pratiquement dit comme ça), on n’a pas plus entendu Donnarumma. Et quand le club a laissé fuiter en décembre un intérêt pour le Lillois Lucas Chevalier, programmé pour prendre à moyen terme le magistère en équipe de France et qui ne prendra pas le risque d’avoir un concurrent du niveau de l’Italien s’il consent à débarquer dans la capitale, il a ravalé sa frustration et sa colère. Elle est cependant sortie mezzo voce, le 22 janvier, dans un couloir du Parc, après un succès contre Manchester City (4-2) qui ouvrait la route des huitièmes de finale au club parisien : «Il y a tellement de rumeurs… La vérité est que je suis bien au Paris-SG. Et que tout le monde m’aime et m’estime. Je suis très bien, je me suis installé [dans la capitale avec sa famille] et ma priorité est de prolonger mon contrat ici.»

Celui-ci court jusqu’en 2026. Autant dire demain, ce qui relativise l’amour et l’estime évoqués par un joueur qui n’y croit pas plus qu’il n’y a de beurre en branche. Et qui devine forcément le jeu subtil de certains dirigeants le fragilisant pour mieux lui reprocher ses inconstances ensuite, ce qui leur permettrait de tirer l’échelle. Ce sera désormais beaucoup plus difficile après la ­performance majuscule de Donnarumma à Anfield. Dieu merci, les matchs des uns et des autres ­définissent encore l’essentiel des équilibres.

***

Ligue des champions : la dure Lillois du plus fort

13 Mar 2025 - Libération
G.S.

Le Losc a échoué mercredi, à domicile, aux portes des quarts de finale de la compétition, après un match où la domination de Dortmund fut largement supérieure au score final (1-2).

Battus sans rémission par le Borussia Dortmund mercredi dans leur stade PierreMauroy, bien plus nettement que le score l’indique (1-2), les Lillois ont quitté la compétition-reine au lendemain de l’exploit majuscule du Paris-SG en Angleterre. S’ils avaient donné l’impression de pouvoir tenir le choc face aux vice-champions d’Europe en titre lors du match aller dans la Ruhr (1-1), ils sont descendus de très haut mercredi, d’autant plus haut qu’ils ont été soignés par les circonstances (un tombereau d’occasions allemandes enfumées, un but venu de nulle part) dans des proportions bibliques. Il n’y a pas de regret à avoir. Ce qui n’a aucune chance d’atténuer la déception d’une équipe qui aura accroché le scalp du Real Madrid ou de l’Atlético lors d’une campagne européenne fastueuse.

Les footballeurs ont une expression à eux : le «but inscrit dans les vestiaires». Avant que le match ait vraiment commencé, quand les deux équipes se reniflent sans avoir véritablement installé le rapport de force. Ils sont un peu à part : souvent le fruit d’une saute de concentration, le fautif ayant raté quelque chose dans son approche du match (la montée en agressivité ou la connexion avec un coéquipier) et ouvert un espace où l’attaquant adverse se glisse un peu par hasard, sans trop savoir pourquoi. Le buteur canadien du Losc, Jonathan David, aura eu cette bonne fortune: les défenseurs allemands ouvrent un boulevard à Ismaily et celui-ci trouve David, qui reprend le ballon comme on fait mine de frapper quelqu’un avec un gant de toilette tout mou.

Irréel. Le gardien suisse de Dortmund, Gregor Kobel, devait penser à autre chose: la frappe dégouline entre ses jambes et les Lillois ont pris les commandes comme ça (1-0, 5e). C’est peu dire que les Allemands ont ensuite concassé Benjamin André et consorts, imposant leur rythme, leur force, leur sûreté technique et à peu près tout le reste. Partant, la première mi-temps s’est déroulée du point de vue lillois sur un mode irréel et enchanteur, l’un (le gardien Lucas Chevalier) réalisant pas moins de quatre arrêts sur la même action, l’autre (Alexsandro) offrant son torse pour repousser un ballon devant sa ligne, un autre encore (Ismaily) se faisant tirer dessus alors qu’il gît au sol devant son but sans rien voir de ce qu’il se passe, et même une barre.

1-0 aux citrons pour les hommes entraînés par Bruno Genesio: une bénédiction, une anomalie, le petit Jésus en culotte de velours. Voir Emre Can remettre le Borussia à hauteur sur penalty (1-1, 54e) n’a ni étonné grand-monde ni infléchi le cours d’un match que Marcel Sabitzer et ses partenaires disputent en chaussons. On n’exagère pas. Au-delà de la récurrence ahurissante à ce niveau des occasions de but allemandes (une frappe de Karim Adeyemi pour lécher la barre transversale à la 62e, Maximilan Beier seul qui manque le cadre dans la foulée), c’est le confort du Borussia dans le jeu qui frappe. Comme s’il était seul sur le terrain, les Lillois escortant plutôt qu’ils ne contestent les initiatives de leurs adversaires du jour.

Pente.

On veut dire que les locaux ne sont même pas dans la bagarre. Ils sont sur un fil : seule la négligence de l’adversaire, collective (on s’y voit déjà) ou individuelle (une erreur), peut les remettre dans le coup, Chevalier ou l’attaquant islandais du Losc, Hakon Haraldsson, s’époumonant en vain. Quand Beier a enfin traduit la supériorité allemande (1-2, 65e), il ne s’est en vérité rien passé. Tout le stade avait vu venir le but avant qu’il ne survienne. Les Lillois ont glissé inexorablement sur la pente, sans trouver de prise, sortant pourtant tous les instruments (le centre aveugle dans le paquet, les remplaçants lancés en masse, les permutations dans l’axe du terrain…) qui leur tombent sous la main et acceptant l’éventualité du coup décisif allemand en laissant leurs propres défenseurs en un contre un sur les contres allemands. Ça n’avait aucune chance de suffire.

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