Célébré par la scène


Ci-dessus, Julien Clerc au côté de Michel Platini lors de la remise du 
trophée du meilleur buteur du Calcio en 1983. Ci-dessous, le rappeur Hatik.

La popularité durable de Michel Platini est perceptible auprès des musiciens, qui sont nombreux à avoir chanté ses mérites au travers de plusieurs générations. 
À l’occasion des 70 ans du footballeur aujourd’hui, Julien Clerc, Mathias Malzieu et Hatik se confient sur leurs liens avec la légende des Bleus.

21 Jun 2025 - L'Équipe
PIERRE-ÉTIENNE MINONZIO

Michel Platini peut s’enorgueillir d’être, avec Zinédine Zidane, le footballeur français qui a inspiré le plus de chansons. Dès 1982, dans un 45 tours lunaire, Il n’y aura pas de match retour, un certain Rémy Tarrier chantait avec élégance : « T’es belle comme un coup franc de Platini qui va dans la lucarne» . Depuis, le triple Ballon d’Or n’a cessé d’être célébré par des musiciens, parfois même hors de France, comme en a témoigné, ces dernières années, un réjouissant air d’accordéon signé de l’Italien Davide Salvi (Platini, 2011) ou un rap martial du Polonais Miszel (Platini, 2021).

En France, on constate également une réelle diversité dans les hommages rendus à l’ancien meneur de jeu, réalisés par des artistes hip-hop émergents (Og Lil, K8 Skelet…), un groupe de hardcore clermontois (Sofy Major) ou des figures installées de la chanson française, comme Charlélie Couture ( Numéro 10, 1998), JeanLouis Murat ( Achille à Mexico, 1998), Julien Doré ( Platini, 2013) ou encore Vincent Delerm qui, dans Quatrième de couverture (2004), imaginait qu’une fille prenait ses distances avec lui parce qu’il lisait un ouvrage intitulé Les années Platini. Pour décrypter le foisonnant héritage musical de Platini, L’Équipe a donné la parole à trois chanteurs, de générations différentes, qui ont développé un rapport singulier avec lui.

« Chambreur, c’est sa manière d’être »

«Michel Hidalgo, quand il était sélectionneur (1976-1984), emmenait souvent les Bleus assister à mes spectacles. Au point qu’un jour Michel (Platini) m’a dit, en faisant semblant de se plaindre: “Mais qu’est-ce qu’on a pu te voir en concert…” (Rires). Il a toujours été super sympa avec moi, mais aussi très chambreur : c’est sa manière d’être. Pendant la Coupe du monde 1998, il m’avait croisé en compagnie de mon grand ami Jeannot Tigana et de Luis Fernandez. Quand il les a vus, il avait lancé : “Tiens, voilà mes porteurs d’eau”. Je pense que si (Alain) Giresse avait été présent, il n’aurait pas osé dire ça, mais je n’en suis pas non plus certain…

Sur le coup, sa sortie m’avait fait bizarre, car je n’aime pas qu’on dise du mal de mes amis, puis je m’étais rappelé que c’est son mode de fonctionnement. Une autre fois, Jeannot m’avait invité à un voyage qui regroupait les Bleus de cette génération, et Michel m’avait demandé ensuite de ne pas venir, ce que j’avais parfaitement compris, car je ne fais pas vraiment partie de leur bande.

J’avais réalisé alors à quel point il reste le chef de ce clan, encore aujourd’hui.

Malgré ce refus, et malgré ses chambrages, je lui voue une admiration sans borne. Parce que j’ai assisté en tribunes à énormément de ses matches en équipe de France, que ce soit à Séville ( la demi-finale de la Coupe du monde 1982 perdue face à la RFA, 3-3, 4-5 aux t.a.b.) ou au Parc. Et à chaque fois, il m’avait impressionné par sa capacité à inscrire des buts décisifs et à conduire le jeu des Bleus. Récemment, je l’ai croisé dans un restaurant à Cassis, et il a accepté d’être pris en photo avec mon fils… Sans me chambrer, je crois ( Sourire). »

Hatik « Il fait partie de la pop culture » « Même si je suis trop jeune (32 ans) pour l’avoir vu jouer, je considère que Michel Platini fait partie des cinq plus grands joueurs de l’histoire de l’équipe de France avec, disons, Zizou ( Zinédine Zidane), Thierry Henry, ( Kylian) Mbappé et (Antoine) Griezmann. Pour les gens de mon âge qui aiment le foot, Platini c’est le vieux briscard dont on nous parle depuis toujours, quelqu’un qu’on reconnaîtrait sans problème si on le croisait dans la rue.

Le fait qu’il ait récemment été président de l’UEFA (2007-2015) a renforcé sa notoriété pour notre génération. C’est pourçaquedans un de mes titres ( Finir un texte, 2022), je dis: “J’suis dans l’coeur des Français comme Platini”. Après, je dois avouer que je serais bien incapable de décrire l’un de ses buts, même s’il m’est arrivé de regarder des extraits de matches de son époque, comme la légendaire demi-finale perdue face à la RFA en 1982. Ces vidéos ressemblent un peu à FIFA quand tu joues en mode amateur: personne nemontesurleporteurduballon,etçadonne l’impression que le jeu était lent, ce qui doit aussi s’expliquer par la manière dont c’était filmé. De même, j’imagine qu’un jeune de 15ans doit rigoler en regardant des images de la Coupe du monde 1998. Une fois que j’ai dit ça, je pense que Platini, comme Zidane, avait manifestement un tel talent qu’il pourrait s’adapter au foot moderne s’il jouait aujourd’hui, car il se préparerait différemment sur le plan physique. Quand tu domines à ce point une génération, ce n’est pas un hasard. Au final, il fait partie de la pop culture, au même titre que Poulidor par exemple: même si on ne connaît pas forcément bien leur carrière, tout le mondeles identifie.»

Mathias Malzieu « Mon héros absolu, l’équivalent de Goldorak »

«En 1981, à l’âge de 6ans, j’ai assisté à un match Valence – Saint-Étienne ( 0-1, en 16es de finale aller de Coupe de France), qui se disputait à 10km de Montéléger, la commune où j’habitais. J’y étais allé avec mon père pour voir jouer Platini, et évidemment il avait marqué, de la tête, le seul but du match. C’était mon héros absolu, l’équivalent de Goldorak. D’ailleurs, j’avais constamment peur pour eux deux.

De la même manière que je craignais que Goldorak finisse par mourir, même si un épisode était programmé le lendemain sur Récré A2, je redoutais qu’il arrive malheur à Platini quand il jouait avec l’équipe de France. J’étais admiratif non seulement de ses coups francs, des Ballons d’Or qu’il avait remportés, mais encore plus de ses ouvertures millimétrées, réalisées dans un timing parfait, dont mon père m’avait fait ressentir la dimension poétique.

En 2012, avec mon groupe Dionysos, on avait sorti une chanson qui lui rendait indirectement hommage (Platini[s]). Quelque temps plus tard, il nous avait invités à Nyon, au siège de l’UEFA, dont il était alors le président. Platini avait été adorable, il nous avait fait visiter les lieux, puis on avait mangé des frites au réfectoire avec lui. Pendant le repas, il nous avait raconté que, quand il était sélectionneur (1988-1992), il fulminait parce que (Jean-Pierre) Papin, au lieu de marquer des buts faciles en reprenant des ballons de la tête, tentait des bicyclettes, qu’il ratait parfois. Comme JPP est une autre de mes idoles, j’avais l’impression sur le moment que Goldorak me disait : “Spiderman, il est bien gentil, mais ses toiles, là, ça marche un coup sur deux”. J’avais 38ans et j’étais redevenu un enfant admiratif en l’écoutant.»

Julien Clerc, Une vie

(Parlophone Music), sorti le 23 mai. Mathias Malzieu, L’homme qui écoutait battre le coeur des chats ( Tôt ou Tard), sorti le 12 mars.

Hatik, + 1 ( Epic), sorti le 22 novembre 2024

***

Une influence moindre dans le cinéma et la littérature

Au cours de sa carrière, la trajectoire de « Platoche » a fasciné un certain nombre d’artistes de premier plan, comme les acteurs Lino Ventura, avec qui il avait développé une réelle complicité, ou Francis Huster, qui avait rédigé dans nos colonnes, au surlendemain de la demi-finale de Séville, une « lettre ouverte à Michel Platini » , dans laquelle ce dernier était comparé, dans sa quête de panache, à « Cyrano, Molière, Jean Moulin » . En décembre 1987, Libération avait organisé un entretien croisé entre le joueur, tout juste retraité, et Marguerite Duras. Il en a résulté des échanges parfois absurdes, qui ont donné lieu à une pièce de théâtre, mise en scène en 2023 par Barbara Chanut ( Duras-Platini). Il s’agit d’un rare exemple de production littéraire inspirée par l’exmeilleur buteur des Bleus (41 buts), au-delà des biographies qui lui ont été dédiées (dont Platini, le roman d’un joueur de Jean-Philippe Leclaire, ancien directeur adjoint de la rédaction de L’Équipe). Platini fait malgré tout une apparition crépusculaire, digne du colonel Kurtz dans le film Apocalypse Now, dans la très réussie BD Les fantômes de Séville de Didier Tronchet (2021). De même, quand on a sollicité Gérard et Julien Camy, les auteurs de l’ouvrage Le Foot à l’écran, au sujet d’un éventuel impact platinien sur le Septième Art, ils ont simplement mentionné un courtmétrage, Boniek et Platini, réalisé par Jérémie Laurent en 2016, qui met en scène deux jeunes cousins, prénommés Zbyszek et Michel, dans les rues de Varsovie en 1982.

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