UN PETIT BIJOU

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17 Mar 2024 - L'Équipe
DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL ALEXANDRE ROOS

Malgré deux attaques de Tadej Pogacar dans le Poggio, Jasper Philipsen s’est accroché jusqu’au bout pour s’imposer via Roma, avec l’aide de Mathieu Van der Poel, qui s’est mué en équipier.

SANREMO (ITA) – S’il fallait une idée de la beauté de Milan - San Remo, de son suspense, le final d’hier nous en a offert une illustration ultime. Une guerre ouverte dans un périmètre de cabine téléphonique (disparue), un feu d’artifice comme on n’en avait pas vu depuis longtemps avec tant de mouvements pour empocher le magot, dans l’ascension du Poggio, dans son dévers, mais aussi dans les rues de San Remo.

L’essence de la course suintait de ce final de la Primavera, son imprédictibilité nous escortait dans les derniers kilomètres, une poignée de grains de sable qui nous glissaient entre les doigts. Elle a laissé quelques-uns de ses plus valeureux guerriers mourir les armes à la main dans des tentatives de crève-la-faim, Matej Mohoric qui bondit dans le bas de la descente du Poggio, Matteo Sobrero qui croit son heure de gloire arrivée et remet un coup de bovin, puis Tom Pidcock qui pense ramasser les morts aux abords de la fontaine de San Remo. Quelle régalade, quelle baston et nous n’avons pas encore évoqué le plus beau des perdants, Tadej Pogačar, qui aura tout tenté, personnage central qui cristallisa toutes les attentions.

Milan - San Remo demeurera 
un cassetête pour Pogacar

Le Slovène a cravaché ses équipiers de bonne heure, dès le capo Mele, encore dans le Capo Berta, puis dans la Cipressa, où Isaac Del Toro et Tim Wellens mirent un coup de vis. Le Mexicain s’écarta à 1,7 km du sommet de l’avant-dernière bosse, Wellens fut livré à luimême et si Pogacar retrouva un peu de soutien de la part de Marc Hirschi vers le Poggio, il dut à nouveau fouetter son équipier belge à 2,4 km du sommet du balcon de San Remo. Wellens laissa ce qu’il lui restait sur les pentes du Poggio et à une borne du sommet, Tadej Pogačar alluma un premier pétard, qui n’ébranla pas Mathieu van der Poel, Alberto Bettiol ou Filippo Ganna. On pensait alors que le leader d’UAE Emirates pouvait remballer ses ambitions, mais c’était un peu mal connaître l’animal, puisqu’à 200 mètres du terme du Poggio, il repartit au front en filou et lâcha une nouvelle grenade, une deuxième accélération qu’on n’avait pas vue depuis longtemps dans cette côte, et à ce moment-là Mathieu van der Poel en personne dut se faire la couenne pour boucher le trou.

Pogačar mena la descente avec le champion du monde dans la roue, mais derrière, cela respirait encore et les deux favoris ne parvinrent pas à se faire la malle. S’il fallait une dernière preuve que Tadej Pogačar avait des jambes de feu, on notera que via Roma, il domina au sprint un gaillard comme Mads Pedersen pour monter sur le podium (3e). Alors que lui a-t-il manqué ? Sans doute un équipier entre la Cipressa et le Poggio, au moment où Wellens était un peu seul et où l’on vit Pogačar s’activer pour demander un rythme plus soutenu.

Il y avait encore une cinquantaine d’éléments dans le peloton qui virevoltaient aux abords du Poggio, bien trop pour que le Slovène puisse y faire la décision et, sans leur faire injure, le fait que les Tudor entrent en tête dans la bosse décisive donnait bien un indice que le ménage n’avait pas été assez efficace. Plus largement, Pogačar s’est une nouvelle fois mesuré aux difficultés de conquérir le Monument italien et s’il a déjà annoncé qu’il reviendrait plus fort pour tenter sa chance, il sait aussi que malgré les meilleures jambes possibles, et même s’il ne lui a sans doute manqué que quelques mètres, rien n’est acquis et la Classicissima demeurera pour lui un casse-tête.

Avec cette victoire, 
Philipsen confirme 
qu’il n’est pas qu’un sprinteur

Quant à Mathieu van der Poel, il y a deux manières de lire sa course. Personnellement, il n’a pas vraiment été en mesure de jouer sa carte pour son premier jour de course de la saison, il n’a rien pu tenter dans le Poggio même si c’est lui qui a privé Pogacar d’une victoire en solo via Roma en allant le repêcher en haut du Poggio. En revanche, il a été un élément indispensable de la victoire de son équipier Jasper Philipsen car il est allé manger les mollets de ceux qui tentaient de filer dans la dernière partie de la course.

Avec son succès dans la Primavera, le Belge a confirmé qu’il n’ était pas qu’ un sprinteur, dans la droite ligne de sa deuxième place dans Paris-Roubaix l’an passé. Cette victoire va forcément le propulser dans une nouvelle dimension et il aura eu le mérite de croire jusqu’au bout qu’il pouvait s’imposer, malgré les coups de butoir du meilleur coureur du monde, même s’il n’était que la deuxième option de sa formation derrière van der Poel, dans un hommage à la nature de la Primavera, qui ne sacre pas toujours le candidat évident mais livre des deuxièmes chances à ceux qui savent s’accrocher.

À ce propos, la Classicissima aura une nouvelle fois démontré sa cruauté et ses mâchoires se sont refermées sur ce pauvre Michael Matthews. L’Australien a toutes les qualités pour s’imposer à San Remo, son troisième podium (2e) sur la course en est la preuve, mais à 33 ans, rien ne dit qu’il aura une autre opportunité. Le sprinteur-puncheur a tenté de se réconforter avec sa fille dans les bras, mais c’était un déchirement, il était en train de réaliser que la chance d’une vie était peut-être passée, d’ un boy au sur Philipsen.

Milan - San Remo, Monument insaisissable, ne s’offre pas toujours à l’évidence et que Tadej Pogačar et Mathieu van der Poel soient repartis bredouilles de la Riviera hier soir en était un bel exemple.

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