Quand Gitane et Peugeot faisaient la légende des Cycles


Des ouvriersau travail dans l'atelier des 
forges de l'usine de Beau lieu, vers 1912.

Ce sont deux marques emblématiques en France. Elles ont connu leur heure de gloire avec de grands champions pour les représenter. Puis, la mondialisation approchant, elles ont été avalées, détricotées et enfin délocalisées.

Éric Serres
Miroir du cyclisme - n. 475/2025

Le cyclisme, au-delà de ses champions, c'est aussi une histoire de bicyclettes et de marques. L'amoureux transi de la petite reine, s'il est attaché aux performances des coursiers, s'identifie aussi aux machines que ces derniers chevauchent. Peugeot et Gitane sont ainsi entrées dans l'histoire du cyclisme «made in France». Faisant le bonheur d'une lignée d'athlètes mais aussi la fierté de territoires bien localisés: Machecoul, près de Nantes, pour Gitane; Beaulieu Mandeure, dans le Doubs, qui deviendra, à partir de 1886, le principal site de production des cycles Peugeot jusqu'aux années 1970. Ces deux grands noms de la petite reine au XXe siècle se battent pour conserver un peu de leur splendeur passée. L'histoire de Gitane remonte à 1925, nous raconte l'ancien président de l'association Machecoul Histoire, Emmanuel Leduc: « Cette année-là, Marcel Brunelière, un forgeron, se lance dans le commerce de pièces détachées pour cycles. L'année suivante, il s'associe à Eugène Redois pour ouvrir un atelier de montage de vélos. » En 1928, les deux associés fondent la marque Gitane. Au fait, pourquoi ce nom? Parce que Brunelière, toujours par monts et par vaux, était surnommé « le Gitan » par sa femme et qu'en retour il l'a baptisée « sa Gitane».

Au début des années 1930, l'entreprise compte une dizaine d'ouvriers pour effectuer le montage des cycles. Il faut attendre la Seconde Guerre mondiale pour que les fondateurs se lancent dans la fabrication des cadres. De l'artisanat au stade industriel, il n'y a qu'un pas. L'organisation du travail, la conception des produits, la logistique de la fabrication en série... est repensée avec un bureau d'études. Le premier objectif est d'atteindre 250 vélos par jour, pendant les mois de production, soit 50000 vélos par an au cours des années 1950. En 1974, 350 000 bicyclettes seront fabriquées par les 600 ouvriers salariés.

L'histoire des cycles Peugeot prend naissance beaucoup plus tôt et de manière déjà industrielle. C'est en 1882 qu'Armand Peugeot lance la fabrication en série du grand bi, devenu un moyen de déplacement très à la mode pour les personnes pouvant se l'offrir. L'ingénieur ouvre un premier atelier avec 300 ouvriers à Montbéliard. Le succès est au rendez-vous et pousse la marque à produire des tricycles puis, dès 1885, les premières bicyclettes dites «modernes». De 16000 unités en 1897, on passe à 20000 en 1900. Entre-temps, en 1886, Peugeot ouvre un atelier à Beaulieu Mandeure, qui deviendra le principal site de production des bicyclettes jusqu'aux années 1970. Cette année-là d'ailleurs, Peugeot devient le premier constructeur français avec 400 000 unités annuelles, chiffre qui passera à 850 000 en 1980.



Marcel Brunelière, l'un des 
deux fondateurs de l'usine Gitane.

Dix Tours pour Peugeot

Gitane et Peugeot, deux entreprises emblématiques qui ont des coureurs pour ambassadeurs. Peugeot remporte le premier de ses dix Tours de France en 1905, grâce à Louis Trousselier, régnant ensuite sur l'épreuve dans les années 1920 et 1930. Dans les années 1960, la marque au lion (celui de Belfort) orne ses vélos et son maillot d'un damier, parce que le noir et le blanc ressortaient mieux à la télévision, pas encore en couleurs. L'une de ses figures de proue d'alors: le jeune Eddy Merckx, puis surtout Bernard Thévenet, double vainqueur du Tour, en 1975 et 1977. L'histoire de Gitane emprunte un chemin assez comparable, les vélos de Machecoul se mettant à remporter le Tour lorsque les champions de Peugeot cessent de le gagner... Ainsi, Gitane commence-t-elle à sponsoriser plusieurs équipes à partir de 1949: Gitane-Hutchinson de Jean Stablinski, Rapha-Gitane-Dunlop de Rudi Altig, Saint-Raphaël-Gitane-Dunlop de Jacques Anquetil... C'est entre 1978 et 1982 que la marque écrit sa légende, en devenant cosponsor de Renault-Gitane, dirigée par Cyrille Guimard. L'équipe s'illustre en remportant six Tours de France grâce à Lucien Van Impe, Bernard Hinault et Laurent Fignon. Gitane se forge un palmarès exceptionnel et réinvente le vélo, notamment avec son fameux vélo de contre-la-montre, le Delta. Au grand dam de ceux qui ont œuvré pour construire ces machines, une multitude de fusions-acquisitions, dépôts de bilan et délocalisations vont voir les deux marques peu à peu avalées, et presque effacées face à une concurrence mondiale de plus en plus acharnée. Aujourd'hui, Peugeot et Gitane sont assemblés par Re-Cycles (Cycleurope a été racheté en novembre 2024 par le groupe Rebirth) sur le site de Romilly-sur-Seine, dans l'Aube. Des mobilisations contre les fermetures d'usine ont eu lieu au début des années 2000, aussi bien en Loire-Atlantique que dans le Doubs, mais le tocsin avait sonné pour ces deux marques.

« À Machecoul, la fin de Gitane 
a été un vrai choc pour nous tous. »

Dernier repreneur

« On vendait des vélos jusqu'en Amérique du Nord!» s'étranglait, en 2014, Didier Salvador, militant CGT aux cycles Peugeot dans les pages de l'Est Républicain. Même son de cloche à Machecoul, où Patrick Lamy, lui aussi militant CGT et quarante ans de boîte, n'a toujours pas accepté le sort de Gitane: « J'ai uu Greg LeMond débarquer avec Cyrille Guimard à l'usine, alors que cela faisait seulement deux jours qu'il était en France. Gitane et Machecoul, c'est la même chose! Un village gaulois! Il n'y a pas une famille de la commune qui n'ait eu un membre y ayant travaillé. Moi, j'y ai commencé à 15 ans. À Machecoul, la fin de Gitane a été un urai choc pour nous tous. Tout le monde s'est mobilisé contre le départ vers Romilly puis la fin de Gitane dans la commune. » Il restait encore 645 salariés, intérimaires compris, sur le site de Machecoul en 2024, qui assemblaient 334 000 bicyclettes, dont 134 000 vélos à assistance électrique. Mais la grande histoire Gitane a laissé la place à d'autres marques du groupe Intersport, le dernier re- preneur. En attendant, peut-être, qu'un autre repreneur rachète l'un ou l'autre des deux grands noms et décide de relancer la saga Peugeot ou Gitane...
Éric Serres


PEUGEOT cycles
c.charle Lucas 17
Archives Terre Blanche / Roger-Viollet

ça roule
c'est gitane

PARIS-NICE - Grand sport GITANE
Equipement luxe et léger. Fait main 10 vitesses à grands rapports permettant de pédaler sans effort Dérailleurs HURET 
Freins MAFAC 
Course Pédalier type course dural emmanchement carré Moyeux grandes joues MAILLARD PELISSIER à blocages rapides. 
Jantes dural rigides MAVIC Pneus à chambre façon boyaux 
Guidon dural course Garde-boue plastique noir-argent, éclairage réglementaire démontables permettant la transformation instantanée en cycle façon course 

Documentation PN13 sur demande à GITANE-44270 MACHECOUL/Magasin d'exposition: 9. av. de la Gde-Armée-75016 PARIS Cale-pieds et pompe course Version dame : Enghien GS, Evry.

Des publicités vantant les mérites de Peugeot et Gitane.

***

Operai al lavoro nella fucina della 
fabbrica Beau Lieu, circa 1912.

Quando Gitane e Peugeot hanno fatto la leggenda delle biciclette

Si tratta di due marchi emblematici in Francia. Hanno vissuto il loro momento di gloria con grandi campioni a rappresentarli. Poi, con l'avvicinarsi della globalizzazione, sono stati fagocitati, smantellati e infine delocalizzati.

Éric Serres
Miroir du cyclisme - n. 475/2025

Il ciclismo, al di là dei suoi campioni, è anche una storia di biciclette e marchi. L'appassionato della reginetta, sebbene affezionato alle prestazioni dei corridori, si identifica anche con le macchine che questi cavalcano. Peugeot e Gitane sono così entrate nella storia del ciclismomade in France”. Fonte di gioia per una schiera di atleti, ma anche orgoglio di territori ben precisi: Machecoul, vicino a Nantes, per Gitane; Beaulieu Mandeure, nel Doubs, che dal 1886 diventerà il principale sito di produzione delle biciclette Peugeot fino agli anni '70. Questi due grandi nomi del ciclismo del XX secolo lottano per conservare un po' del loro passato splendore. La storia della Gitane risale al 1925, ci racconta Emmanuel Leduc, ex presidente dell'associazione Machecoul Histoire: «Quell'anno, Marcel Brunelière, un fabbro, si lancia nel commercio di pezzi di ricambio per biciclette. L'anno successivo, si associa a Eugène Redois per aprire un'officina di assemblaggio di biciclette». Nel 1928, i due soci fondano il marchio Gitane. Ma perché questo nome? Perché Brunelière, sempre in giro per monti e valli, era soprannominato «le Gitan» (“lo Zingaro”) da sua moglie e lui, in cambio, l'aveva battezzata «sa Gitane» (“la sua Zingara”).

All'inizio degli anni '30, l'azienda contava una decina di operai addetti all'assemblaggio delle biciclette. Bisognerà attendere la Seconda Guerra Mondiale perché i fondatori si lanciassero nella produzione dei telai. Dall'artigianato alla produzione industriale il passo è breve. L'organizzazione del lavoro, la progettazione dei prodotti, la logistica della produzione in serie... vengono ripensati con un ufficio tecnico. Il primo obiettivo è quello di raggiungere le 250 biciclette il giorno durante i mesi di produzione, ovvero 50.000 biciclette l'anno nel corso degli anni '50. Nel 1974, 350.000 biciclette saranno prodotte dai 600 operai dipendenti.

La storia delle biciclette Peugeot ha inizio molto prima e in modo già industriale. È nel 1882 che Armand Peugeot avvia la produzione in serie del grand bi, diventato un mezzo di trasporto molto alla moda per chi poteva permetterselo. L'ingegnere aprì una prima officina con 300 operai a Montbéliard. Il successo fu immediato e spinse il marchio a produrre tricicli e, a partire dal 1885, le prime biciclette cosiddette “moderne”. Da 16.000 unità nel 1897 si passa a 20.000 nel 1900. Nel frattempo, nel 1886, Peugeot apre un laboratorio a Beaulieu Mandeure, che diventerà il principale sito di produzione di biciclette fino agli anni '70. Quell'anno, Peugeot diventa il primo produttore francese con 400.000 unità l'anno, cifra che salirà a 850.000 nel 1980.


Marcel Brunelière, uno dei due 
fondatori della fabbrica Gitane.

Dieci Tour per la Peugeot

Gitane e Peugeot, due aziende emblematiche che hanno dei corridori come ambasciatori. 

La Peugeot vinse il primo dei suoi dieci Tour de France nel 1905, grazie a Louis Trousselier, dominando poi la competizione negli anni '20 e '30. Negli anni '60, il marchio del leone (quello di Belfort) decorava le sue biciclette e la sua maglia con un motivo a scacchiera, perché il bianco e il nero risaltavano meglio in televisione, che ancora non era a colori. Una delle sue figure di spicco dell'epoca era il giovane Eddy Merckx, seguito soprattutto da Bernard Thévenet, due volte vincitore del Tour, nel 1975 e nel 1977

La storia di Gitane segue un percorso abbastanza simile, con le biciclette di Machecoul che iniziano a vincere il Tour quando i campioni della Peugeot smettono di farlo... Così, la Gitane iniziò a sponsorizzare diverse squadre a partire dal 1949: la Gitane-Hutchinson con Jean Stablinski, la Rapha-Gitane-Dunlop con Rudi Altig, la Saint-Raphaël-Gitane-Dunlop con Jacques Anquetil... È tra il 1978 e il 1982 che il marchio scrive la sua leggenda, diventando co-sponsor della Renault-Gitane, guidata da Cyrille Guimard. La squadra si distingue vincendo sei Tour de France grazie a Lucien Van Impe, Bernard Hinault e Laurent Fignon. La Gitane si costruisce un palmarès eccezionale e reinventa la bicicletta, in particolare con la sua famosa bici da cronometro, la Delta

Con grande disappunto di coloro che hanno lavorato per costruire queste macchine, una serie di fusioni-acquisizioni, fallimenti e delocalizzazioni vedranno i due marchi gradualmente assorbiti e quasi cancellati di fronte a una concorrenza mondiale sempre più agguerrita. 

Oggi, Peugeot e Gitane sono assemblate da Re-Cycles (Cycleurope è stata acquistata nel novembre 2024 dal gruppo Rebirth) nello stabilimento di Romilly-sur-Seine, nell'Aube. All'inizio degli anni 2000 ci sono state mobilitazioni contro la chiusura degli stabilimenti, sia nella Loira Atlantica sia nel Doubs, ma il campanello d'allarme era già suonato per questi due marchi.

« A Machecoul, la fine della Gitane 
è stata un vero shock per tutti noi. »

Ultimo acquirente

«Vendevamo biciclette persino in Nord America!», si lamentava Didier Salvador, dipendente della CGT presso la Peugeot Cycles, sulle pagine dell'Est Républicain nel 2014. Stesso discorso a Machecoul, dove Patrick Lamy, anch'egli dipendente della CGT e quarant'anni di servizio, non ha ancora accettato il destino della Gitane: «Ho visto Greg LeMond venire con Cyrille Guimard alla fabbrica, quando era in Francia solo da due giorni. Gitane e Machecoul sono un'unica cosa! Un villaggio gallico! Non c'è famiglia del comune che non abbia avuto un membro che vi abbia lavorato. Io ho iniziato a 15 anni. A Machecoul, la fine della Gitane è stata un vero shock per tutti noi. Tutti si sono mobilitati contro il trasferimento a Romilly e poi contro la fine di Gitane nel comune. Nel 2024 rimanevano ancora 645 dipendenti, compresi i lavoratori interinali, nello stabilimento di Machecoul, che assemblava 334.000 biciclette, di cui 134.000 elettriche. Ma la grande storia della Gitane ha lasciato il posto ad altri marchi del gruppo Intersport, l'ultimo acquirente. In attesa, forse, che un altro acquirente rilevi uno dei due grandi nomi e decida di rilanciare la saga Peugeot o Gitane...
Éric Serres


PEUGEOT cycles
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Archivi Terre Blanche / Roger-Viollet

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Pubblicità che esaltano i pregi di Peugeot e Gitane.

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